En pleine crise financière chez TVA Sports, les rémunérations des hauts dirigeants de Québecor, en particulier celle de Pierre-Karl Péladeau, ont suscité une vive controverse en 2024.
Pourtant, un nouveau rapport du Centre canadien de politiques alternatives (CCPA), publié ce début janvier 2025, remet les choses en perspective en situant le salaire de Péladeau dans un cadre plus large, celui des PDG les mieux rémunérés au Canada.
On réalise que Péladeau reçoit des peanuts par rapport aux PDG les plus riches du pays.
En 2023, Pierre-Karl Péladeau, président et chef de la direction de Québecor, a perçu une rémunération totale de 4,9 millions de dollars, en hausse de 57 % par rapport à l'année précédente.
Cette augmentation s'explique principalement par des options d'achat d'actions, un mécanisme courant dans les entreprises cotées en bourse.
À cela s’ajoutent les 423 000 dollars qu’il a perçus pour assurer temporairement la direction de Groupe TVA.
Les membres de la famille Péladeau ne sont pas en reste :
Jean B. Péladeau, vice-président à la convergence opérationnelle chez Québecor Média, a reçu une rémunération totale de 1,9 million de dollars.
Érik Péladeau, administrateur de la société, a obtenu 920 700 dollars, dont la majorité sous forme d'une rente de retraite pour ses 32 années de service.
Ces chiffres ont suscité l’indignation, notamment en raison des congédiements massifs à TVA et des pertes accumulées par TVA Sports, qui s’élèvent à près de 300 millions de dollars depuis sa création en 2011.
En 2023, TVA Sports a perdu 9 % de ses abonnés (soit environ 115 000), accentuant les défis financiers de la chaîne.
Ce sera pire en 2024, alors que le rapport de l'année précédente sera publié lors du premier trimestre de 2025.
Les revenus publicitaires ont également chuté, tandis que les coûts liés aux droits de diffusion exclusifs de la LNH sont restés astronomiques.
Ces difficultés ont conduit Québecor à licencier près de 547 employés, soit 31 % de son effectif, après une première vague de 240 licenciements.
Malgré ces coupes, le revenu de Péladeau et le fait que TVA Sports continue de débourser des salaires élevés, notamment pour des figures comme Jean-Charles Lajoie, dont la rémunération annuelle de 400 000 dollars pour des émissions à faibles cotes d’écoute, font polémique.
Surtout que l'ancien vice-président de Québecor Média, Sylvain Chamberland, affirme que le sport est tellement un dada pour Péladeau qu'il est prêt à continuer de perdre des sommes colossales pour maintenir TVA Sports en vie. Perdre plus de 20 millions par année, c'est des peanuts pour PKP (à voir dans l'extrait vidéo suivant).
Après avoir entendu de tels propos, on peut comprendre les employés congédiés de mal digérer le salaire annuel de Péladeau Ce dernier a donc ouvert la bouteille de champagne en prenant connaissance des PDG les plus riches du Canada.
Selon le rapport du CCPA, les 100 PDG les mieux rémunérés au Canada ont gagné en moyenne 13,2 millions de dollars en 2023, soit 210 fois le salaire moyen d’un travailleur canadien.
Le salaire minimum pour entrer dans ce top 100 a atteint un nouveau sommet à 6,9 millions de dollars.
En moyenne, ces PDG gagnent 3 255 dollars de l’heure, contre environ 15 dollars de l’heure pour un travailleur moyen.
En moins de 11 heures lors de la première journée ouvrable de 2025, les 100 PDG les mieux rémunérés au Canada auront déjà gagné 62 661 dollars, soit l’équivalent du salaire annuel moyen d’un travailleur canadien.
À l’échelle horaire, cela représente 5 695 dollars par heure, même en dormant, contre 15 à 20 dollars de l’heure pour un travailleur moyen.
Les primes exceptionnelles représentent 81 % de la rémunération totale des PDG canadiens, avec une moyenne de 10,7 millions de dollars par dirigeant.
Le 2 janvier au matin, les PDG du top 100 auront dépassé le salaire annuel moyen d’un enseignant au Canada, qui gagne entre 55 000 et 70 000 dollars par an.
Un travailleur payé au salaire minimum (environ 30 000 dollars annuels) aurait besoin de plus de 430 ans pour accumuler ce que les 100 PDG gagnent en moyenne chaque année.
Avec une rémunération totale de 4,9 millions de dollars en 2023, Pierre-Karl Péladeau se situe bien en dessous de la moyenne des 100 PDG canadiens les mieux payés, qui est de 13,2 millions de dollars.
S'il était comparé à ces PDG, il aurait travaillé près de 3 jours avant d’atteindre le salaire annuel moyen d’un travailleur canadien, contre moins de 11 heures pour ses pairs dans le top 100.
Le salaire moyen d’un employé de TVA Sports licencié en 2023 était estimé à environ 40 000 dollars, ce qui signifie que Pierre-Karl Péladeau a gagné 122 fois ce montant en une année.
Depuis 2011, les pertes accumulées de TVA Sports s'élèvent à 300 millions de dollars, ce qui équivaut à un déficit annuel moyen de 21,4 millions de dollars.
Avec une rémunération de 4,9 millions de dollars, Pierre-Karl Péladeau est bien loin des standards des PDG les mieux payés au Canada.
À titre de comparaison, le salaire moyen d’un PDG parmi les 100 mieux rémunérés en 2023 était 2,7 fois supérieur au sien.
De plus, la majorité des revenus des PDG du top 100 provient de primes exceptionnelles, souvent déconnectées des performances réelles des entreprises.
Si l’on considère que le seuil minimal pour entrer dans le top 100 des PDG canadiens en 2023 était de 6,9 millions de dollars, Péladeau reste en dehors de cette élite financière, bien qu’il contrôle 76 % des droits de vote de Québecor et détienne des actions valorisées à 2,4 milliards de dollars.
Le cas de Québecor illustre quand même le paradoxe des grandes entreprises canadiennes : alors que les PDG et hauts dirigeants continuent de prospérer grâce à des mécanismes de rémunération avantageux, les travailleurs, eux, subissent les contrecoups des décisions stratégiques.
Chez TVA Sports, cette réalité est particulièrement frustrante. Les employés licenciés, souvent payés autour de 40 000 dollars par an, peinent à concilier ces sacrifices avec les décisions de maintenir des salaires élevés pour certains animateurs et dirigeants.
Péladeau a récemment réaffirmé son engagement envers TVA Sports, notamment en rencontrant Geoff Molson pour discuter des droits de diffusion de la LNH, alors que le contrat d'exclusivité entre le CH, la LNH et la station se termine à l'été 2026.
Cette démarche, bien que risquée financièrement, souligne son attachement à un projet qu’il considère central pour le paysage médiatique québécois.
Pour ses partisans, Péladeau incarne la résilience et la volonté de préserver un média francophone malgré les défis financiers.
Pour ses détracteurs, il représente un homme d’affaires déconnecté de la réalité des travailleurs, prêt à maintenir des dépenses colossales pour satisfaire son ego.
Quoi qu’il en soit, dans ce contexte où les inégalités salariales continuent de s'accentuer, le débat sur la rémunération des dirigeants d'entreprises comme Québecor ne fait que commencer.
Au moin, Péladeau peut relaxer en ce début d'année 2025. Disons que son 4,9 millions de dollars paraît mieux aujourd'hui.