C’est un petit pas pour l’organisation, mais un gigantesque soulagement pour Jakub Dobes.
Après des semaines de tension, de discussions intenses et de doutes persistants sur sa place dans l’organigramme du Canadien de Montréal, le jeune gardien tchèque vient de frapper un grand coup : un contrat de deux ans à un volet, garanti, d’une valeur annuelle de 965 000 $.
C’est la première fois de sa carrière qu’il obtient une entente qui le traite comme un joueur de la LNH à part entière. Et à 24 ans, c’est un moment charnière.
Dobes devient donc millionnaire si on combine les deux saisons.. C’est un rêve qui se réalise. Mais attention : ce rêve pourrait rapidement tourner au cauchemar s’il se croit trop vite arrivé.
Car son ennemi sportif, Kaapo Kahkonen, est signé pour un an, à 1,15 million $. Lui aussi a reçu un contrat à un volet. Lui aussi s’attend à jouer dans la LNH.
Autrement dit, le poste d’adjoint à Samuel Montembeault n’est nullement assuré. Dobes a reçu de l’argent, oui. Mais pas de promesse. Pas de garanties sur le plan hockey. Ce contrat, c’est une reconnaissance, pas une couronne.
Il faut aussi rappeler le contexte. Depuis deux ans, le CH jongle avec la gestion de ses gardiens de manière étrange.
On a connu le fameux ménage à trois avec Samuel Montembeault, Cayden Primeau et Jake Allen, où les trois étaient sous contrat à un volet. On s’était mis dans une impasse qui avait paralysé l’équipe pendant une année au complet.
Aujourd’hui, on pourrait se retrouver dans un scénario semblable. Si Kahkonen et Dobes brillent tous les deux au camp, est-ce que le CH va oser garder trois gardiens à nouveau? Ou bien est-ce que l’un des deux va devoir mordre la poussière?
La réalité, c’est que Kahkonen est mieux payé. Il a plus d’expérience. Il a plus de droits.
Attention. Même s’il vient de signer un contrat garanti, Jakub Dobes n’a aucune certitude de commencer la saison dans la LNH.
Oui, il est désormais millionnaire, mais sa place à Montréal est loin d’être assurée. D’un point de vue administratif, Dobes demeure exempté du ballottage, contrairement à Kaapo Kshkonen, qui devra obligatoirement être soumis au ballottage s’il est rétrogradé à Laval.
Cette exemption donne au Canadien une flexibilité énorme : si le club veut éviter de perdre un actif pour rien, il est bien plus simple d’envoyer Dobes dans la Ligue américaine que Kahkonen.
On a beau lui avoir offert un contrat à un volet, le message est clair : l’organisation n’est pas prête à lui confier sans condition le poste de numéro deux. Le ménage à trois rôde à nouveau, et malgré ses efforts, Dobes devra battre un gardien plus expérimenté que lui… ou retourner en bas.
Et à l’interne, ce n’est pas un secret : le Canadien de Montréal mise déjà sur un autre projet à long terme dans les filets. Il s’appelle Jacob Fowler.
Il est jeune, charismatique, bourré de talent, et tout le monde dans l’organisation sait qu’il représente l’avenir. Dobes, dans cette équation, n’est qu’un pont temporaire. Une solution d’attente.
Et ça se sent. Le clan Dobes le sent. Il sait que son développement n’est pas une priorité. Que son ascension dans la hiérarchie est bloquée par un mur invisible. Et que même en signant un contrat à un volet, il n’a pas acheté la moindre sécurité d’emploi.
Il faut dire que les recruteurs du CH, notamment Vincent Riendeau, n’ont jamais été pleinement convaincus de sa technique.
On le trouve encore un peu rigide, prévisible, vulnérable et croche dans ses déplacements latéraux, faible au niveau de sa mitaine. Dobes a de l’athlétisme, du potentiel, mais il ne rassure pas encore.
Et le message que lui a envoyé le Canadien est clair : tu as le droit d’être payé comme un joueur de la LNH, mais tu n’as pas encore gagné le droit d’y jouer. Il y a une différence entre avoir un contrat et avoir une place.
Pendant un moment, on a même cru que le CH allait convaincre Marc-André Fleury de sortir de sa retraite. Le clan du gardien a reçu cinq offres sérieuses le 1er juillet, et bien que l’agent Allan Walsh n’ait pas nommé le Canadien de Montréal, tout indique que l’équipe était parmi les cinq.
Hughes voulait un vétéran. Un vrai. Ce n’est que lorsque le dossier Fleury a été fermé que Kähkönen a été signé. Dans cette optique, Dobes était le plan C?
Et pour lui, ce contrat de deux ans, aussi flatteur soit-il, vient avec une pression écrasante. Il devra briller au camp.
Il devra montrer qu’il est meilleur que Kähkönen. Il devra être solide même sans jouer régulièrement, s’il obtient le poste de numéro 2. Et surtout, il devra prouver qu’il peut bloquer le chemin de Fowler plus longtemps que prévu.
En attendant, le départ de Cayden Primeau vers la Caroline, contre un simple choix de 7e tour, rappelle à quel point les gardiens sont interchangeables dans l’esprit du CH.
Il y a deux ans, Primeau était le sauveur. Aujourd’hui, il est un souvenir. Et demain, Dobes pourrait subir le même sort.
Le message est clair : ce contrat, c’est une victoire temporaire. Rien de plus. Une belle récompense financière, oui. Un vote de confiance, peut-être.
Mais une stabilité? Certainement pas. Pour l’instant, Jakub Dobes est payé comme un joueur de la LNH. Mais c’est tout ce qu’il a gagné.
À lui de remporter quelque chose de bien plus important que les billets verts: sa place.
Et pendant ce temps, Samuel Montembeault, pourtant solidement installé comme gardien numéro un du Canadien, ne peut pas faire totalement abstraction de ce qui se trame dans son ombre.
Le simple murmure du mot « ménage à trois gardiens » suffit à lui glacer légèrement le dos. Ce n’est pas une question de confiance, mais de logistique.
Dans la LNH, un trio de gardiens est toujours synonyme de chaos, surtout aux entraînements. Deux filets, trois portiers : l’un se retrouve à devoir s’entraîner à part, tout seul vec le coach des gardiens Éric Raymond, pendant que les autres s’approprient les répétitions normales avec les tireurs.
Ce gardien isolé, parfois frustré, parfois en attente, peut ralentir toute la dynamique d’un duo bien huilé. Et Montembeault le sait mieux que quiconque : vivre une saison complète avec Cayden Primeau et Jake Allen, dans un triangle inconfortable, a laissé des traces.
Le risque que Kähkönen soit soumis au ballottage, et réclamé, est réel. Mais le risque que le CH tente de jongler avec trois gardiens, ne serait-ce qu’au début de la saison, l’est tout autant.
Et pour un numéro un qui cherche de la stabilité, c’est tout sauf rassurant.