Il y a des échanges qui marquent l’histoire d’une franchise… pour le meilleur ou pour le pire.
Et celui conclu par Daniel Brière le 8 janvier 2024 risque bien d’entrer dans les annales comme l’une des plus grosses bourdes récentes de la LNH.
Envoyer Cutter Gauthier, un futur pilier offensif et probablement l’attaquant le plus complet de la cuvée 2022, accompagné d’un choix de deuxième ronde, pour Jamie Drysdale, un défenseur fragile, irrégulier et incapable jusqu’ici de remplir les attentes d’un 6e choix au total, relève d’une erreur de jugement incroyable.
Aujourd’hui, la vérité saute aux yeux : non seulement Gauthier est en voie de devenir un joueur d’élite, mais Drysdale est déjà sur la sellette à Philadelphie.
Selon plusieurs sources, si l’ancien des Ducks ne convainc pas rapidement Rick Tocchet et son équipe d’entraîneurs, il pourrait être échangé… à peine deux ans après son arrivée.
Le pire, dans cette histoire, c’est que Daniel Brière savait exactement ce qu’il laissait filer. Cutter Gauthier, c’est un gabarit de 6 pieds 3, une puissance offensive naturelle, une intensité dans les deux sens de la patinoire, et un instinct de buteur rare.
Depuis son arrivée dans la LNH, il coche toutes les cases d’un futur joueur de franchise : constance, confiance et production.
Et c’est là que ça devient une catastrophe. Brière, obsédé par l’idée d’acquérir un défenseur droitier de qualité, a cédé à la panique.
L’offre d’Anaheim (Drysdale et un choix de deuxième ronde) lui a semblé être une solution à court terme pour combler un trou urgent dans sa brigade défensive. Mais à long terme, il a sacrifié une pièce maîtresse pour un pari à haut risque.
Oui, Jamie Drysdale était séduisant. Sélectionné 6e au total en 2020 par Anaheim, il sortait des rangs juniors avec la réputation d’être un patineur d’élite, un quart-arrière de jeu de puissance, et un défenseur moderne capable de transporter la rondelle comme peu d’autres.
Mais quatre ans plus tard, la conclusion est brutale : deux saisons complètes seulement depuis ses débuts, un différentiel catastrophique (-26 et -32 lors de ses deux seules saisons complètes), et une incapacité chronique à rester en santé.
La saison dernière, Drysdale a affiché le 7e pire différentiel de la LNH (-32), devant seulement quelques cas désespérés comme Steven Stamkos, Connor Bedard ou Tyler Bertuzzi.
Pour mettre les choses en perspective : Matvei Michkov, pourtant critiqué pour son implication défensive, a terminé à -18, et le défenseur le plus proche chez les Flyers, Egor Zamula, était à -14.
C’est peut-être le détail qui tue : dans une ligue où la tendance est aux défenseurs costauds, Drysdale, avec ses 5 pieds 11 et 180 livres, doit compenser physiquement par une intelligence de jeu irréprochable. Or, non seulement il peine à dominer physiquement, mais il commet aussi des erreurs coûteuses dans son territoire.
Disons qu'il est loin d'un Lane Hutson.
Malgré 152 minutes passées sur le jeu de puissance, le plus haut temps d’utilisation parmi les défenseurs offensifs des Flyers, il n’a pas su convertir cette confiance en résultats probants. Sept buts, 32 points… et un différentiel qui plombe toute crédibilité défensive.
Ses lacunes sans la rondelle sont flagrantes : selon Natural Stat Trick, il a concédé 2,52 buts attendus par 60 minutes, dans la même zone que Roman Josi ou Luke Hughes… sauf que ces derniers génèrent beaucoup plus d’offensive et contrôlent mieux la rondelle. Drysdale, lui, encaisse plus de tirs qu’il n’en provoque.
Ce qui choque le plus, c’est la logique derrière ce mouvement. Les Flyers n’étaient pas dans une fenêtre immédiate de conquête. Ils bâtissaient pour l’avenir.
Et que fait Brière? Il échange un attaquant générationnel potentiel et un choix de deuxième ronde pour un défenseur en réhabilitation constante.
Il ne faut pas oublier un autre élément central dans ce fiasco : la relation explosive entre Cutter Gauthier et John Tortorella.
Tout le monde dans la ligue savait que Gauthier refusait catégoriquement de jouer pour l’entraîneur des Flyers, qu’il jugeait trop rigide, trop conservateur et incapable de tirer le meilleur de jeunes vedettes offensives.
Le simple fait que Daniel Brière ait choisi de conserver Tortorella en poste, malgré le talent générationnel qu’il avait entre les mains, démontre à quel point la décision manquait de vision.
Dans la LNH moderne, il faut de l’audace et, oui, de l’arrogance pour dominer. Gauthier en débordait. Drysdale, lui, est un bon gars, un coéquipier apprécié, mais les bons gars finissent derniers dans le sport professionnel. Miser sur la « gentillesse » plutôt que sur le potentiel élite offensif, c’est ridicule.
On raconte même qu’en 2023, Brière avait un faible prononcé pour David Reinbacher, au point que, si les Flyers (7e) avaient repêché avant le Canadien (5e), il l’aurait choisi devant Michkov.
Aujourd’hui, en voyant ses besoins criants à droite, certains journalistes vont jusqu’à dire qu’il serait prêt à échanger Michkov contre Reinbacher. C’est dire à quel point l’obsession du défenseur droitier le rend aveugle.
Et maintenant?
Avec un an restant à son contrat (2,3 M$), Drysdale joue pour sauver sa carrière à Philadelphie. Rick Tocchet tentera de le relancer, mais le temps joue contre lui.
Si ses performances restent au niveau de 2024-2025, il deviendra une monnaie d’échange au rabais, et l’échange Gauthier–Drysdale sera jugé unanimement comme un désastre.
Pendant ce temps, Cutter Gauthier continue de progresser, accumulant les buts et les points, et confirmant qu’il est non seulement un top- assuré, mais potentiellement un joueur de premier trio pour la prochaine décennie.
Dans dix ans, on pourrait bien résumer cette transaction en une phrase : Daniel Brière a donné une future vedette pour un défenseur de soutien... pour ne pas dire un flop...
Et si, par malheur pour les Flyers, Gauthier venait à éclater offensivement, ce qui est déjà en train de se produire, la pilule sera encore plus dure à avaler pour les partisans de Philadelphie.
Ce n’est pas seulement une erreur d’évaluation. C’est un pari insensé qui a sacrifié l’avenir offensif de l’équipe pour combler une urgence ponctuelle.
Et aujourd’hui, alors que Drysdale lutte pour prouver qu’il appartient au top 4, l’ombre de Gauthier plane comme un rappel constant : certains "deals" devraient rester dans le tiroir des idées folles.