Frissons à Détroit: Kent Hughes se fait avoir

Frissons à Détroit: Kent Hughes se fait avoir

Par David Garel le 2025-10-07

Kent Hughes doit avoir des frissons dans le dos au moment où l'on se parle.

Dans la vie, il y a des noms qui reviennent comme des coups de poignard à chaque performance. Des noms qu’on essaie d’oublier mais qui s’imposent semaine après semaine, match après match, comme un rappel cruel de ce qu’on aurait pu être.

À Montréal, après Matvei Michkov, après Ryan Leonard, après Dmitri Simashev, voici venu le temps d’affronter la réalité Axel Sandin-Pellikka.

Le défenseur suédois de 20 ans n’est plus un simple prospect intéressant dans le système des Red Wings. Il est maintenant dans la LNH. Et pas comme figurant. Il a carrément fait exploser les derniers doutes.

Sandin-Pellikka a percé l’alignement de Steve Yzerman à Détroit après avoir envoyé Erik Gustafsson et Justin Holl au ballottage, deux vétérans qui cumulent plus de 1500 matchs à eux deux. Un ménage volontaire, un virage jeunesse assumé, pour faire de la place à un véritable bijou.

Certains le voyaient comme un Quinn Hughes. D’autres parlent déjà d’un futur Erik Karlsson. Et ceux qui ont vu ses matchs au Championnat mondial junior de 2024-2025 savent exactement pourquoi.

On a assisté à une domination totale de la glace. On parle ici d’un défenseur qui contrôle le tempo, la relance, le powerplay, la pression, avec une fluidité déconcertante. Il est rapide. Il est créatif. Il est mature. Et surtout : il est prêt.

En trois tournois mondiaux juniors, il n’a fait que progresser. Cette fois, il n’est plus une promesse. Il est un produit fini. Et ce produit-là… aurait pu être à Montréal.

C’est là que la plaie devient douloureuse. En 2023, les Predators de Nashville ont contacté le Canadien de Montréal. Ils offraient leur 15e choix au total, mais surtout : le gardien vedette Yaroslav Askarov, alors considéré comme le meilleur espoir devant le filet depuis Vasilevskiy. En échange? Le 5e choix du CH, celui qui allait devenir… David Reinbacher.

Et que fait Kent Hughes? Il refuse.

Il voulait Reinbacher. Il voulait la “sécurité défensive”. Il voulait prouver qu’il n’avait pas peur de passer à côté de Michkov. Il a résisté à Nashville. Et il a tout perdu.

Car en acceptant ce deal, Hughes aurait pu :

Sélectionner Axel Sandin-Pellikka avec le 15e choix (choisi finalement 17e par Détroit). Il aurait pu aussi l'échanger contre la lune après avoir sélectionné Lane Hutson.

Obtenir Askarov, et solidifier son avenir devant le filet (il aurait pu l'échanger après avoir sélectionné Jacob Fowler)

Échanger Samuel Montembeault.

Ou mettre en place une charnière défensive avec Lane Hutson et Sandin-Pellikka pour les 10 prochaines années. Quoiqu'il pourrait être dangereux d'avoir deux petites défenseurs offensifs dans le même alignement.

À la place, il a préféré un défenseur conservateur, qui n’a rien prouvé, et qui aujourd’hui est encore blessé, encore en retard, encore perdu dans sa tête.

David Reinbacher n’a rien demandé. Il n’a pas exigé d’être repêché au 5e rang. Il n’a pas supplié qu’on le préfère à Michkov, Simashev ou un autre prodige. Mais il est l’otage d’une décision qui le dépasse. Et cette décision est en train de l’écraser.

Il vient de se fracturer la main. Encore un mois à l’écart. Encore une saison qui commence dans le flou. Encore un camp raté. Avant ça? Des performances hésitantes, des confrontations perdues en un contre un, une explosion de frustration pendant un entraînement.

Reinbacher a crié. Il a fracassé la baie vitrée avec son bâton. Francis Bouillon a dû intervenir. Le geste d’un jeune homme à bout de souffle, à bout d’options.

Et pendant ce temps, Sandin-Pellikka patine avec Simon Edvinsson, Moritz Seider, Albert Johansson, dans un top-4 de rêve, à 20 ans, dans une ville qui assume le virage jeunesse et qui n’a pas peur de la fougue.

Ce que Steve Yzerman a bâti à Détroit, c’est ce que Kent Hughes prétend vouloir faire à Montréal. Mais la comparaison est cruelle. Pendant que Hughes parle de “piste d’atterrissage plus longue” pour Reinbacher, Yzerman ouvre la piste dès maintenant pour Sandin-Pellikka.

Les Red Wings ont envoyé au ballottage deux vétérans pour faire de la place à un défenseur de 20 ans. Et ce n’est pas un hasard. C’est une organisation qui n’a pas peur de ses décisions. Qui ne joue pas à la défensive. Qui ne protège pas ses erreurs. Qui fait de la place aux meilleurs, point final.

Sandin-Pellikka, c’est du talent pur, du flair offensif, une lecture du jeu au laser. Il est ce que Reinbacher n’est pas : instinctif. Proactif. Dynamique.

Et Hughes a préféré le profil opposé.

Le cas Sandin-Pellikka ne peut pas être isolé. Il s’inscrit dans une série de décisions qui hurlent le mot “manqué” :

Refuser d’inclure Reinbacher dans un échange pour Mason McTavish

Échanger Logan Mailloux contre Zachary Bolduc

Sacrifier ses choix 16 et 17 (avec Emil Heineman) pour aller chercher un Noah Dobson (un risque qui pourrait faire mal).

Refuser Michkov

Refuser Leonard

Refuser Simashev

Et maintenant? On apprend que Sandin-Pellikka fait l’équipe à Détroit.

C’est plus qu’une crise de profondeur. C’est un naufrage idéologique.

Ce qui est le plus inquiétant dans ce dossier, ce n’est pas seulement la performance. C’est l’impact psychologique sur Reinbacher lui-même. Il n’est pas dans un environnement favorable. Il ne se développe pas en paix. Il craque sous la pression. Et le public l’a déjà jugé.

Chaque fois que Sandin-Pellikka touche la rondelle à Detroit, un partisan du CH serre les dents.

Chaque fois qu’il marque un but ou fait une sortie de zone propre, on se rappelle ce que Hughes a refusé.

Chaque présence de Reinbacher à Laval ou à l'infirmerie est un rappel que le CH a choisi la peur.

Kent Hughes vit désormais avec un frisson permanent dans le dos. Celui de savoir qu’il a dit non à Yaroslav Askarov. Qu’il a dit non à Sandin-Pellikka. Qu’il a dit non à l’opportunité de créer la meilleure charnière défensive jeune de la LNH.

Détroit l’a fait. Montréal a refusé.

Et ça, ce n’est pas une erreur d’évaluation.

C’est une faute stratégique.

C’est la cerise sur le sundae de la catastrophe Reinbacher.

Parce que Sandin-Pellikka, on le savait déjà. Il suffisait de regarder. Il suffisait d’avoir du flair. Du courage. De l’audace.

Et Kent Hughes, à ce moment-là, a choisir... le flop...