Carrière brisée: Arber Xhekaj sur toutes les lèvres

Carrière brisée: Arber Xhekaj sur toutes les lèvres

Par David Garel le 2025-07-10

Il y a des chutes plus cruelle que d’autres.

Pour Ryan Reaves, ce n’est plus une pente descendante, c’est un effondrement. Ce jeudi matin d’été 2025, les Maple Leafs de Toronto ont officiellement mis fin à la "joke" :

Ryan Reaves est échangé aux misérables Sharks de San Jose pour le défenseur de 24 ans, Henry Thrun.

L'homme fort va se retrouver avec une franchise qui reconstruit et qui va viser la cave encore une fois. Une équipe qui ne gagne rien, qui n’inspire plus rien, sauf peut-être de la pitié. Et c’est là que Ryan Reaves passera sa dernière saison dans la LNH. Comme un exilé. Comme un fantôme. Comme un avertissement.

Le « tough guy » n’a plus la cote. Le « goon » est devenu la risée.. Et cette saga a commencé, ironiquement, avec une seule étincelle : un jeune défenseur montréalais au nom de justicier: Arber Xhekaj.

En juillet 2023, Brad Treliving pose un geste que plusieurs considèrent à l’époque comme une erreur stratégique : il offre à Reaves un contrat de trois ans pour 4,05 millions de dollars (1,35 M$ par saison). À 36 ans, Reaves est déjà un "hasbeen" d’une ère révolue. Le hockey évolue, mais Toronto reste figée, croyant que la peur physique remplacera la constance, le talent, ou la vitesse.

Dès sa première saison avec les Leafs, les doutes se confirment. Reaves est lent. Il est inutile à cinq contre cinq. Il est ciblé.

Et surtout, il est ridiculisé sur le plancher du Centre Bell, en octobre 2023, par un dénommé Xhekaj.
Ce match-là est gravé dans l’histoire récente du hockey canadien.

Xhekaj jette les gants. Reaves accepte. Erreur monumentale. En quelques secondes, Reaves est projeté au sol comme un sac de patates.

Le nom de Xhekaj est alors sur toutes les lèvres.

Une humiliation nationale, virale, planétaire. Les images tournent en boucle sur Sportsnet, RDS, TikTok. Les partisans du CH jubilent. Les partisans des Leafs détournent le regard.

Mais Reaves n’accepte pas sa défaite. Au lieu de reconnaître la supériorité physique de son jeune opposant, il choisit de se poser en victime.

Il accuse Xhekaj d’avoir triché, d’avoir jeté les gants sans prévenir, de ne pas respecter « le code ». Il poursuit même en affirmant que Xhekaj simule une blessure quelques mois plus tard pour éviter une revanche. C’est petit. C’est mesquin. Et surtout, c’est faux. Xhekaj subira une opération à l’épaule, prouvant la véracité de sa blessure.

Le Shérif ne l’a pas évité. Il l’a anéanti.

Malgré tout, malgré les performances catastrophiques de Reaves, Sheldon Keefe continuait de lui faire confiance. On l’envoyait même sur la glace avec deux minutes à faire, Mais le coach, qui est maintenant au New Jersey, ne peut plus rien faire pour lui.

Reaves, au lieu de se faire discret, multiplie les déclarations agressives. Il parle encore de Xhekaj. Il défie Pezzetta car il ne peut pas battre Xhekaj. Il se raccroche à son image de dur-à-cuire pendant que ses statistiques sont dignes d’un joueur de la ECHL.

35 matchs. Deux assistances. Aucun but. Un différentiel de -11. Un impact négatif partout où il passe.

Brad Treliving, celui-là même qui l’a signé, finit par céder. Il envoie Ryan Reaves à San Jose, en retour d’un jeune défenseur gaucher, Henry Thrun, 24 ans, qui n’a rien d’un sauveur mais qui n’est pas un poids mort.

Thrun, choix de 4e ronde en 2019, a disputé 60 matchs l’an dernier avec les Sharks, récoltant 12 points (2 buts, 10 passes). Il n’est pas spectaculaire, mais il est jeune, il patine, et surtout, il ne coûte que 1 million de dollars. Son contrat se termine en 2026, mais il est encore agent libre avec compensation. À ce stade, c’est une victoire.

Toronto se débarrasse d’un contrat embarrassant. San Jose, quant à elle, récupère un vétéran de 40 ans qui n’a plus rien à offrir, sinon des coups de poing inutiles et une réputation surfaite.

Soyons clairs : personne ne veut jouer pour les Sharks. Cette équipe est devenue le cimetière des carrières oubliées. Elle collectionne les défaites, les -4, les blessures et les choix au repêchage. C’est là que vont mourir les rêves. 

Le symbole est fort. Le « shérif » de Toronto, celui qui devait protéger Matthews, Tavares et Nylander, se retrouve banni dans le Far West californien. Dans l’indifférence la plus totale.

Reaves a brisé sa propre carrière. Par arrogance. Par refus de se moderniser. Par incapacité à reconnaître ses limites. Il s’est cru indispensable. Il n’était qu’un accessoire. Et pire encore, il a insulté l’intelligence collective en insinuant que Xhekaj, opéré à l’épaule, simulait.

Dans les coulisses de la ligue, plusieurs le confirment : la réputation de Reaves est éclatée. On ne le prend plus au sérieux. Il ne fait plus peur. Il est lent, prévisible, et complètement dépassé par la nouvelle génération.

Arber Xhekaj, lui, entame la 2e année de son contrat de deux ans à 1,3 M$ par année. Il n’a pas pu s’empêcher de lancer un message clair comme de l'eau de roche :

« Tu ne vas pas t'en permettre avec mes coéquipiers, parce que je suis là pour m'assurer que ça n'arrive jamais. »
Pas besoin de nommer Reaves. Le message était clair.

Le hockey d’aujourd’hui n’a plus besoin de goons. Il a besoin d'attaquants ou de défenseurs mobiles capables de jeter les gants au besoin, mais surtout capables de jouer au hockey. C’est ce qu’incarne Xhekaj. C’est ce que Reaves a refusé de devenir. Et il en paie aujourd’hui le prix ultime.

Toronto, en se débarrassant de Reaves, tourne une page. Tardivement. Mais mieux vaut tard que jamais. Et San Jose, en acceptant cet échange, prouve à quel point cette organisation veut protéger ses jeunes prodiges.

Macklin Celebrini va sentir qu'il mesure deux pouces de plus. 

Mais la réalité est que Ryan Reaves est fini à la corde.

Il terminera sa carrière comme il l’a commencée : sur un quatrième trio ou dans les gradins, loin des projecteurs. Mais cette fois, sans crainte, sans prestige, sans rôle réel. Juste une caricature d’un passé glorieux. Juste un rappel de ce qui arrive quand on refuse d’évoluer.

Et pendant ce temps, quelque part à Montréal, un jeune défenseur du nom de Xhekaj regarde cette saga avec un sourire en coin.

Il n’a pas juste vaincu Reaves.

Il l’a envoyé à la semi-retraite.

Avec un seul combat. Un seul coup. Une seule vérité.