Le 1er septembre est derrière nous. Carey Price a encaissé son dernier boni de 5,5 millions de dollars. Pour les dirigeants du Canadien de Montréal, l’heure des grandes manœuvres est arrivée.
Et dans ce décor électrique, Kent Hughes a enfin brisé le silence lors de la rencontre des directeurs généraux à Détroit. Une sortie médiatique calculée, presque chirurgicale, qui a fait l’effet d’une bombe.
En entrevue avec Sportsnet, le directeur général du Tricolore a lancé un message clair aux autres équipes, à ses homologues et aux partisans. La citation est cinglante et sans pitié :
« Nous allons bien. Nous n’avons pas besoin d’échanger Carey Price. Si nous trouvons une transaction qui a du sens pour nous et pour une autre équipe, nous allons la faire. Mais nous n’avons pas à le faire. »
Voilà qui résume parfaitement le ton : Kent Hughes n’a pas l’intention de se laisser piéger par les demandes exorbitantes de ses vis-à-vis.
Depuis des semaines, les discussions gravitent autour de trois équipes : les Sharks de San Jose, les Penguins de Pittsburgh et les Blackhawks de Chicago.
Trois formations en reconstructiont, trois marchés où le contrat de Carey Price, 10,5 M$ de cap hit pour seulement 2 M$ de salaire réel, ferait parfaitement l’affaire pour booster la masse salariale sans vider les coffres.
Sauf que ces équipes flairent le sang. Elles savent que Montréal veut se libérer. Elles savent que Hughes a besoin d’air pour régler d’autres dossiers, notamment celui du deuxième centre. Et elles poussent leurs exigences au maximum.
Selon Renaud Lavoie, la demande est claire : un choix de deuxième ronde en échange de l’absorption du contrat de Price. Une demande inacceptable pour Hughes, qui a immédiatement répliqué par sa sortie publique.
En réalité, le DG du Canadien espère régler le dossier contre un choix de troisième ronde… et dans ses rêves les plus optimistes, contre un quatrième.
La stratégie de Hughes se heurte toutefois à un obstacle de taille : toutes les équipes de la LNH respectent déjà le plancher salarial de 70,6 M$.
Autrefois, des clubs comme les Coyotes de l’Arizona ou les Sénateurs d’Ottawa se battaient pour ramasser des contrats “morts” afin d’atteindre le minimum.
Mais aujourd’hui, la donne a changé. Les propriétaires sont plus riches, plus investis, et toutes les formations commencent la saison au-dessus du plancher.
Résultat : le contrat de Carey Price n’est plus un trésor universel. Il reste utile, mais seulement pour certaines situations bien précises, une équipe qui voudra liquider rapidement un vétéran en cours de saison, par exemple.
C’est ce qui place Hughes en position de faiblesse : il doit convaincre que Price est encore un atout financier, alors que ses vis-à-vis savent pertinemment que Montréal est coincé.
Comme si ce n’était pas assez, les nouvelles dispositions de la prochaine convention collective, devancées dès 2025-2026, viennent compliquer davantage le dossier.
LTIR moins avantageuse : désormais, l’allègement pour un joueur blessé dont le retour est prévu au cours de la saison est limité à environ 4 M$. Seuls les cas “fin de carrière”, comme Price, donnent encore un crédit complet.
Plafond salarial en séries : fini le prorata quotidien qui permettait de jongler avec les chiffres. À partir de 2025, c’est le cap hit annuel qui sera calculé en séries. Impossible de “magasiner” un joueur de luxe à la date limite sans conséquence sur la masse.
Flexibilité réduite : globalement, les DG n’ont plus autant de marge de manœuvre. Un contrat comme celui de Price garde une certaine valeur… mais plus du tout le statut d’arme de guerre qu’il avait auparavant.
C’est précisément pour cette raison que Hughes a tenu à rappeler qu’il n’a pas besoin de bouger. Le message est clair : si quelqu’un veut Price, il devra le payer au prix fort.
En coulisses, les négociations ressemblent à une partie d’échecs. San Jose demande un choix de 2e ronde. Chicago, de son côté, veut inclure un défenseur indésirable, Connor Murphy en tête, dans l’équation. Pittsburgh, enfin, observe, sachant qu’un démantèlement de son noyau (Rust, Karlsson, Rakell) est inévitable.
Et au milieu de tout ça, Hughes tente d’orchestrer une surenchère négative : laisser les trois clubs croire qu’ils sont en compétition pour Price, alors qu’en réalité, il attend qu’ils baissent leurs prétentions.
Il sait que le temps joue pour lui. Une équipe qui partira mal la saison pourrait vouloir se débarrasser d’un contrat rapidement pour plonger dans la loterie Gavin McKenna. À ce moment-là, Price redeviendra une monnaie d’échange beaucoup plus séduisante.
Reste que ce dossier dépasse les chiffres. Carey Price n’est pas qu’un contrat : il est un symbole.
En fermant la porte à un choix de 2e ronde pour Price, Hughes envoie un double message :
À ses homologues : le CH ne se fera pas avoir, même pressé.
Aux partisans : la direction protège l’avenir et refuse de sacrifier inutilement des choix.
Mais sur le plan humain, il y aura toujours un pincement au cœur. Price ne joue plus depuis 2022, sa retraite est officieuse, mais l’idée de le voir échangé comme une simple variable comptable demeure brutale. Même Angela Price, son épouse, l’a laissé entendre sur Instagram :
« Probablement comme la plupart des gens à Montréal, je serais triste… mais ultimement, tu souhaites ce qui est le mieux pour l’équipe. »
Au final, la sortie de Kent Hughes à Détroit n’est pas anodine. C’est une manœuvre politique, une façon de reprendre le narratif dans un dossier où tout le monde croyait le CH acculé au mur.
En répétant qu’il n’a pas besoin de bouger , Hughes renverse la pression. Ce sont maintenant les Sharks, les Hawks et les Penguins qui doivent décider s’ils veulent profiter de l’occasion… ou attendre et risquer de voir le DG du CH se tourner vers un autre partenaire.
Ce dossier n’est plus seulement administratif. Il est devenu une guerre d’ego, de perception et de stratégie.
Et quand la poussière retombera, le contrat de Carey Price pourrait bien être l’élément déclencheur de la prochaine grande transaction du Canadien.