Commotion à Rimouski: Patrick Roy perd ses moyens

Commotion à Rimouski: Patrick Roy perd ses moyens

Par David Garel le 2025-05-24

Patrick Roy peut se consoler. Son ennemi Marc Bergevin n'a pas été nommé DG des Islanders.

Mais depuis que Mathieu Darche a été nommé directeur général des Islanders de New York, l’homme au regard de feu attend. Il attend son sort, suspendu à la décision d’un autre. Et pour un homme comme lui, qui a toujours voulu garder le contrôle, c’est un supplice.

Il faut toutefois l’avouer : dans ce chaos, il y a une lueur de soulagement. Car ce n’est pas Marc Bergevin qui a été nommé. Et pour Patrick Roy, cela change tout.

Le spectre de Bergevin planait depuis des semaines sur Long Island. Tous savaient que si l’ancien DG du Canadien obtenait les pleins pouvoirs, Patrick Roy serait évincé sur-le-champ.

Leur relation est un champ de ruines. Trois fois, Bergevin a eu la chance d’engager Roy à Montréal. Trois fois, il a préféré Michel Therrien, Claude Julien, puis Dominique Ducharme.

Et lors de leur célèbre entrevue en 2012, Roy avait osé dire à Bergevin qu’il devrait congédier Trevor Timmins avant le repêchage. Un affront que Bergevin n’a jamais digéré.

Au final, Roy avait vu juste. Si Bergevin avait écouté son avertissement et tourné la page sur Timmins, peut-être que son règne aurait pris une autre tournure.

Mais l’arrogance et l’orgueil avaient triomphé. Ce traumatisme est encore bien vivant. Et c’est pourquoi l’arrivée de Darche, avec sa froide rationalité et sa méthode analytique, représente paradoxalement une meilleure chance de survie pour Roy.

Car Darche, lui, ne fonctionne pas à l’émotion. Il observe. Il analyse. Il évalue. Il ne prendra pas une décision impulsive. Il ne se débarrassera pas de Patrick Roy par simple vengeance ou par besoin de marquer son territoire.

Il va tester le système. Tester l’homme. Et si Roy livre la marchandise, peut-être gagnera-t-il une prolongation de son séjour.

Mais cette attente, ce flou, est cruel. Patrick Roy déteste ne pas avoir le contrôle. Or, en ce moment, il n’a le contrôle de rien. Pas de l’organigramme. Pas des décisions. Pas même de la perception publique. Il est figé dans un entre-deux étouffant, comme suspendu au-dessus d’un vide.

Alors, pour s’occuper, pour respirer, il s’est tourné vers ce qu’il connaît de mieux : le hockey junior. À distance, il a pris Joël Perrault sous son aile.

Il l’a aidé à préparer l’Océanic de Rimouski pour la Coupe Memorial. C’était sa manière de ne pas perdre pied. De continuer à contribuer, à guider, à contrôler un minimum de réalité dans un univers qui lui échappe.

Et surtout, il avait un mandat très clair : aider Rimouski à contrer le phénomène Gavin McKenna. Le prodige. L’élu. Celui qui, selon plusieurs, surpassera Connor McDavid dans quelques années. Un joueur au talent aussi pur que menaçant.

Roy a passé des heures à décortiquer le jeu de McKenna, à préparer des plans, à partager son expérience avec Perrault, à bâtir une structure défensive apte à contenir ce tsunami sur patins. Et pourtant, dès les premières minutes du match d’ouverture, tout s’est effondré.

McKenna a fait ce qu’il voulait sur la glace. L’Océanic était désorganisée, craintive, paralysée. Le système supposément hermétique s’est évaporé. Rimouski ressemblait des poulets sans tête poursuivant une tempête. Et Roy, à distance, n’a pu que constater les dégâts dans cette défaite de 5-4. 

Connaissant Roy, il a eu des sueurs froides en regardant les faits saillants du match:

Pour un homme d’orgueil, ce fut un nouveau coup dur. Il avait offert son expertise. Il avait tenté d’aider. Et le résultat fut un échec cinglant. Une autre tentative, une autre illusion brisée. Comme si, en ce moment, tout ce que Patrick Roy touche refusait de se transformer en or.

Lui qui a tout gagné. Lui qui a porté le flambeau du Québec avec fierté. Lui qui a ramené les Remparts au sommet du hockey junior canadien. Lui qui, aujourd’hui, est réduit à attendre une décision d’un homme plus jeune, moins flamboyant, mais peut-être mieux outillé pour gérer une organisation moderne.

Ironie de la vie : c’est à Rimouski, loin des projecteurs de la LNH, que Roy tente encore de se sentir utile. Et c’est à New York, capitale de l’impatience et de l’ambition, que son avenir sera scellé. Deux mondes, deux réalités, un seul homme pris entre les deux.

Mathieu Darche, lui, a déjà commencé à envoyer des signaux. Il a promis aux propriétaires des Islanders qu’il n’y aurait pas de reconstruction. Il veut une relance rapide, à la manière des Panthers de la Floride. Il veut bâtir autour de ce qu’il a : Barzal, Horvat, Dobson. Il veut trouver des perles oubliées ailleurs. Comme Sam Bennett, indésirable à Calgary qui est devenu une vedette en Floride. Il veut gagner, maintenant.

Et dans cette logique, garder Patrick Roy pourrait être cohérent. Le système défensif en place fonctionne. L’équipe a une base. Roy connaît les joueurs. Il a rallumé la flamme à mi-saison, même si les Islanders ont raté les séries. Darche pourrait décider de ne pas toucher à cette dynamique. Pas encore.

Mais Roy ne le sait pas. Il n’a aucune garantie. Il est à la merci du prochain coup de fil, de la prochaine réunion. Et chaque jour qui passe ajoute un poids à ses épaules.

On le dit souvent : l’attente est pire que la sentence. Et dans le cas de Patrick Roy, c’est une torture silencieuse. Il regarde les autres avancer. Il voit les jeunes loups monter. Il sent son étoile pâlir. Et tout ce qu’il peut faire, c’est attendre.

Attendre que Darche, ce nouveau stratège venu de l’école Brisebois, vienne cogner à sa porte pour lui dire : « Tu restes… ou tu pars. »

Notre "feeling" est qu'il va rester. Mais il va marcher sur des oeufs.

Entre-temps, Roy s’accroche à ce qu’il peut. Il continue de croire. Il tente de transformer l’humiliation de Rimouski en leçon. Il serre les dents. Et il se rappelle qu’au bout de chaque tempête, il y a un vestiaire à rallumer.

Mais pour l’instant, il n’a pas les clés. Et c’est peut-être ça, le plus dur à encaisser pour un homme comme lui.