Si l'on cherchait encore une preuve que José Théodore ne portera jamais Patrick Roy dans son cœur, il suffisait d'écouter son passage sans concession sur les ondes du 98,5 FM, à la veille du match de l'année entre le Canadien et les Islanders.
Sans détour, sans retenue, l'ancien gardien du CH a vidé son sac, balançant des vérités tranchantes sans aucune pitié. La conclusion était cinglante : il prend Martin St-Louis 1000 fois avant Roy.
Il faut dire que l'historique entre les deux hommes ne laisse place à aucune réconciliation possible. Dès son arrivée dans l'organisation du Canadien, Théodore avait ressenti le froid glacial de Roy, une légende qui refusait de voir un autre talent éclore sous ses yeux.
« Patrick Roy, je ne l’ai pas côtoyé longtemps. Mais il ne m'a pas fait sentir le bienvenu », avait confié Théodore par le passé.
Mais la réalité est qu'à l’époque, Roy ne voulait rien savoir du jeune gardien québécois. Au camp d’entraînement de 1995, il l’a complètement snobé, lui faisant bien comprendre qu’il n’y aurait jamais de passation de pouvoir.
Le mépris de Roy ne s’est pas limité à une simple attitude distante. Dans les coulisses du vestiaire, plusieurs témoins de l’époque rapportent que Roy n’adressait même pas la parole à Théodore, préférant lui faire sentir qu’il n’avait pas sa place près de lui.
Serge Savard, alors directeur général du Canadien, avait pourtant précisé que la sélection de Théodore au repêchage était une manière de préparer l’avenir, alors que Roy approchait de la trentaine.
Mais au lieu de jouer le rôle de mentor, Roy a préféré ignorer son jeune coéquipier, l’éloignant du cercle restreint des vétérans.
Les années ont passé, mais la rancune n’a jamais disparu. Même lorsqu’ils se sont croisés en Floride ou dans des contextes plus détendus, Roy n’a jamais traité Théodore avec la chaleur qu’on pourrait attendre entre deux anciens de la même lignée.
Une humiliation qui, pour plusieurs, en disait long sur le mépris de l’ancien numéro 33.
Comment un homme qui a marqué l’histoire du Canadien peut-il se montrer aussi indifférent envers un autre gardien qui a lui aussi laissé sa trace à Montréal?
José Théodore, contrairement à Roy, a su laisser son ego de côté lorsqu’un autre gardien prometteur a fait son arrivée.
Quand le Canadien a repêché Carey Price en 2005, Théodore n’a pas cherché à le repousser ou à le traiter comme un rival.
« Je n’ai pas mal réagi quand le Canadien l’a repêché, même si c’était un cinquième choix au total. Je connaissais assez la game pour savoir qu’à 18 ans, 21, 22 ans, tu n’es pas prêt à dominer », a-t-il expliqué.
Alors que Théodore avait été mal accueilli par Roy en 1995, lui a fait tout l’inverse avec Price. Il lui a ouvert la porte, l’a encadré et l’a aidé à naviguer à travers les défis d’un jeune gardien à Montréal.
"Autant Price était une menace pour mon job, autant j’ai toujours voulu l’aider le plus que je pouvais. On a eu un seul camp ensemble. Je voulais être sûr qu’il sente que, même si j’étais le numéro un, je lui souhaitais la bienvenue de la bonne façon."
Des paroles qui se différencient violemment avec l’attitude distante et froide de Roy envers Théodore dans les années 90.
Alors quand Théodore a eu la chance de commenter la reconstruction du Canadien et le rôle de Martin St-Louis, il n’a pas hésité une seconde à enfoncer le clou
. "Est-ce que tu penses que Patrick Roy aurait accepté de ne pas faire les séries durant trois ans? Patrick Roy veut gagner à chaque année. Ça prenait un entraîneur recrue qui était prêt à y aller tranquillement."
Roy, un homme de patience? Jamais. Son passage en tant qu'entraîneur de l'Avalanche l’a prouvé : dès que les choses ne vont pas à son goût, il plie bagage.
À Montréal, un tel comportement aurait été un désastre absolu. St-Louis, lui, accepte le processus, comprend le plan et bâtit sans précipitation. Pour Théodore, le choix est simple : "Martin St-Louis."
Ce n’est pas la première fois que Théodore s’oppose ouvertement à la légende du Canadien. Mais cette fois, ses mots avaient une intensité presque définitive.
Impossible d’imaginer ces deux hommes être invités au même party. Trop de passif. Trop de non-dits qui, aujourd’hui encore, alimentent la rivalité silencieuse entre eux.
Théo et "le Roi" là ne partageront jamais la même table. Et si un jour on tente de les réunir, mieux vaudra prévoir une salle bien ventilée…car ça va chauffer...
Les années passent, mais la tension entre les deux hommes demeure. Ce n’est pas une simple querelle qui s’éteindra avec le temps.
Il n’y aura jamais d’accolade nostalgique entre eux lors d’un événement du Canadien. Il n’y aura jamais de moment où Roy dira à Théodore qu’il a fait un excellent travail durant sa carrière. Ces deux-là ne partagent ni le même respect, ni la même philosophie.
Leur rivalité est figée dans le temps, alimentée par des souvenirs d’un passé qui ne pourra jamais être réécrit. Théodore peut dormir tranquille en sachant qu’il a remporté un trophée Hart, un honneur que Roy ne pourra jamais revendiquer. Roy, lui, pourra toujours brandir ses quatre Coupes Stanley comme réponse ultime.
il faudrait les inviter dans un face à face la prochaine fois sur les ondes du 98,5 FM. Et mieux vaudra prévoir une sortie de secours pour éviter l’explosion.
Le destin est cruel pour José Théodore. Celui qui rêvait de s’imposer comme le gardien du Canadien, s’est retrouvé coincé entre deux hommes qui ne lui ont jamais accordé la reconnaissance qu’il méritait.
Patrick Roy, d’un côté, l’a vu comme une menace et l’a rejeté d’emblée. Carey Price, de l’autre, l’a balayé du revers de la main comme s’il n’avait jamais existé.
Si l’histoire avait été plus juste, Théodore aurait dû recevoir les honneurs qu’il méritait. Mais à Montréal, l’ombre des légendes est écrasante, et Roy a toujours dicté son propre héritage.
Lui qui prétendait incarner le grand frère impitoyable a plutôt démontré que son ego l’empêchait d’agir avec dignité. Au lieu de voir en Théodore un allié, il l’a perçu comme un intrus. Une erreur de calcul qui a creusé un fossé que le temps n’a jamais réussi à combler.
Et Price? Lui qui aurait pu briser le cycle en reconnaissant l’héritage de son prédécesseur s’est comporté avec la même froideur. Était-ce un hasard? Ou simplement la preuve que la position de gardien à Montréal est un trône empoisonné où seuls les plus égoïstes survivent?
José Théodore n’a jamais cherché à se venger. Il a tracé son propre chemin, loin de cette culture du mépris, préférant jouer la carte de l’élégance et du professionnalisme.
Contrairement à Roy, il a su voir plus loin que son petit nombril.. Contrairement à Price, il a compris que la transmission du savoir est une force et non une faiblesse.
Et pourtant, malgré son ouverture, malgré son respect pour ceux qui ont suivi, la reconnaissance ne lui est jamais venue. Ni de Roy, ni de Price.
Et ça, Théo va l'avoir sur le coeur toute sa vie.