On peut mettre toutes les couches de positivisme qu’on veut, mais à un moment donné, il faut dire les vraies affaires.
Le 7–0 encaissé au Centre Bell n’a pas seulement mis en lumière les failles défensives du Canadien. Il a exposé, encore une fois, un malaise beaucoup plus profond : l’utilisation presque intouchable de Juraj Slavkovsky, malgré une production qui ne suit tout simplement pas.
Et quand on regarde froidement la situation, on se rend compte que la hiérarchie offensive du Canadien n’est plus alignée sur les résultats, mais sur la politique interne du vestiaire.
Slafkovsky joue en moyenne 17 minutes 55 par match. C’est énorme.
C’est du temps de jeu de première option, de joueur d’élite, de gars qu’on protège, qu’on soigne, qu’on place partout pour l’aider à produire.
Et pourtant, dans le classement interne, il est neuvième marqueur de l’équipe.
Neuf.
Derrière trois défenseurs.
Derrière Oliver Kapanen, un kid qui ne touche jamais à l’avantage numérique.
Quand tu réalises que Demidov accumule 13 points en 17 matchs en jouant presque quatre minutes de moins que Slafkovsky, tu commences à comprendre que ce n’est plus une question de potentiel, c’est une question de cohérence.
Parce que Slafkovsky, dans les faits, profite du luxe ultime.
Il passe presque tout son temps avec Suzuki et Caufield.
Et pendant que la première vague carbure à l’huile d’octane « Suzuki-Caufield-Demidov-Hutson », Slafkovsky est le passager qui ne paie pas son billet.
Et pendant ce temps-là, Kirby Dach frappe à la porte.
Un joueur qui avait de la difficulté à se mettre en marche se transforme tranquillement en moteur auxiliaire du Canadien.
Dach pousse, Dach frappe, Dach produit. Et la pente naturelle de la hiérarchie veut qu’il dépasse Slafkovsky sous peu, parce qu’il joue avec le feu que Slafkovsky n’a que par moments, entre deux séquences où il essaie encore de se prendre pour Jack Hughes.
On ne dit pas que Juraj Slavkovsky est un « bust ».
Mais on ne peut plus ignorer que c’est un joueur qui n’a pas encore trouvé son corps, ni son identité, ni son match NHL.
Il hésite. Il surjoue. Il ne joue pas nord-sud comme son profil l’exige.
Il joue comme un gars qui ne comprend pas qu’il mesure six pieds quatre, qu’il peut manger la bande pour déjeuner, qu’il peut renverser le momentum juste avec son physique.
Il joue comme un joueur qui essaie d’être quelqu’un d’autre.
Et quand tu compares avec Logan Cooley, ça fait encore plus mal.
Cooley, cette année : 8 buts, 6 passes, 14 points en 17 matchs. Un métronome. Une constance.
Un gars qui n’a jamais cherché son identité parce qu’elle était déjà installée avant même sa première présence.
Le contraste est brutal. Et on peut sortir toutes les excuses qu’on veut : l’âge, le développement, la patience.
À un moment donné, un premier choix total doit montrer une progression claire. Et depuis qu’il est dans la Ligue nationale, cette progression-là est tout sauf linéaire.
Ce n’est pas pour rien que l’appel commence à devenir évident.
Il faut briser la hiérarchie.
Il faut envoyer un message.
Il faut commencer un match avec Ivan Demidov sur le premier trio.
Le talent le justifie. La production le justifie. Le tempo de match le justifie. La Ligue le justifie.
Mais Martin St-Louis ose-t-il faire ça?
Ose-t-il dire à son premier choix total qu’il doit mériter son poste?
On doute. Parce que ce geste-là, c’est plus qu’un changement de ligne.
C’est un séisme politique dans la chambre. Un retrait de privilèges. Un aveu que, oui, le Canadien a peut-être commis une erreur le soir du repêchage.
Et la question la plus lourde de sens demeure : peut-on vraiment continuer à donner du temps de jeu de superstar à un joueur qui, cette année, se dirige vers une saison de 43 points… à dix millions de dollars?
C’est une statistique qui frappe. Qui blesse. Qui dérange. Mais qui représente la réalité crue de ce qu’on observe soir après soir.
On ne demande pas au Canadien de brûler le projet. On ne demande pas de déclarer Slavkovsky perdu.
On demande simplement ceci : que la hiérarchie reflète ce qui se passe sur la glace, pas ce qui se passe sur un tableau de repêchage de 2022.
Parce que la patience a un prix. Et ce prix-là commence à être payé par ceux qui méritent davantage, mais qui attendent encore qu’on leur donne la place qu’ils gagnent à chaque présence.
Demidov le gagne. Kapanen le gagne. Dach le gagne.
Ce n’est pas une question d’émotion. C’est une question de logique. De réalité. De mérite.
La hiérarchie est en péril. Et c’est peut-être la meilleure chose qui puisse arriver au Canadien de Montréal.
À suivre ...
