11,4 millions de dollars en fumée: rien ne va plus pour Jake Evans

11,4 millions de dollars en fumée: rien ne va plus pour Jake Evans

Par David Garel le 2025-11-05

Souvent dans la vie, la chute d'un homme est synonyme de la montée d'un autre homme.

Hier au Centre Bell, cette vérité portait deux visages : celui éclatant de Trevor Zegras, héros en fusillade, et celui éteint de Jake Evans, symbole d’un Canadien prisonnier de sa propre loyauté.

Les deux hommes représentent à eux seuls le fossé entre la vision audacieuse des Flyers de Daniel Brière dans ce dossier... et la prudence maladive de Kent Hughes.

Trevor Zegras, acquis des Ducks d’Anaheim au mois de juin, a encore rappelé pourquoi il est l’un des joueurs les plus spectaculaires de la LNH.

Son but décisif en fusillade restera marquée dans notre mémoire : un défilement au ralenti sur presque toute la largeur de la patinoire, un timing parfait, un tir bas calculé entre les jambière.

Samuel Montembeault, hypnotisé, n’a même pas eu le temps de réagir. Interrogé après le match, Zegras a expliqué sa manœuvre avec un calme qui donne des frissons dans le dos :

« J’étais un grand fan de Patrick Kane quand j’étais jeune. C’est un jeu que j’ai beaucoup répété. »

Ce geste, inspiré de l’un des plus grands techniciens du hockey moderne, est la signature d’un joueur en plein contrôle de son art.

Et il ne s’agit pas d’un coup isolé. Zegras a également ajouté deux mentions d’aide dans la rencontre, atteignant le plateau des 200 points en carrière (201 exactement, à son 281e match).

Sa passe en spin-o-rama à Cam York était un diamant brut:

Il dirige désormais le jeu de puissance des Flyers avec la même autorité qu’un chef d’orchestre, trouve ses coéquipiers à travers les espaces invisibles, et impose un rythme qui méduse l'adversaire à chaque séquence.

À 24 ans, il est devenu le visage du renouveau offensif de Philadelphie.

Et à Montréal? Pendant que Zegras fait lever les foules, Jake Evans fait lever les yeux au ciel. La différence était brutale.

Hier soir, l’attaquant du Canadien a multiplié les revirements comme un joueur en fin de parcours. La Presse, TVA Sports, RDS : tous ont souligné son match catastrophique.

Une succession d’erreurs mentales, de dégagements ratés, de pertes de rondelle inexplicables. Le fameux « trio des vétérans », Anderson, Gallagher, Evans, avait été démantelé avant le match tellement ils étaient mauvais depui le début de la saison.

Et bien Evans fut encore pire avec Anderson et Veleno.

Celui qui devait incarner la fiabilité et le travail acharné, est devenu un naufrage... individuel...

Evans, qui devait être ce centre défensif fiable, ce « shutdown center » modèle, n’est plus qu’une ombre. Son différentiel de -6 dans une équipe qui affiche un dossier gagnant de 9-3-1 est un avertissement clair. Il n’a qu’un but, marqué dans un filet désert, et une passe en douze matchs. Son taux de possession est désastreux, son impact inexistant. Le Canadien gagne malgré lui, pas grâce à lui.

Le plus troublant, c’est que ce déclin était évitable... deux fois...

L’été dernier, Anaheim cherchait un centre de soutien pour accompagner son virage jeunesse. Kent Hughes n'a pas réagi car il pensait que Zegras était toxique.

Finalement, Ryan Poehling, un choix de deuxième ronde (45e) et un choix de quatrième ronde ont pris le chemin d'Anaheim... pour un prodige..

Les Ducks auraient préféré Evans à Poehling selon ce qui circule à Anaheim. Le même Evans qui perd aujourd’hui des mises au jeu cruciales et multiplie les revirements dans sa propre zone.

Et dire qu’avant de signer son contrat de 4 ans à 2,85 millions par saison pour un total de 11,4 M$, plusieurs autres équipes de la LNH étaient prêtes à tout pour l’obtenir.

Le Wild du Minnesota, les Devils du New Jersey, les Kings de Los Angeles, tous s’étaient montrés agressifs pour ses services.

Même le Lightning de Tampa Bay avait tenté un coup de dernière minute à la date limite des transactions. On parlait alors d’un choix de deuxième ronde et d’un espoir sur la table.

Mais au lieu d’encaisser cette valeur ou de frapper un coup de circuit avec Zegras, Kent Hughes a préféré le prolonger, convaincu qu’il venait de sécuriser une aubaine. 

Ce refus de l'échanger , déjà incompréhensible à l’époque, prend aujourd’hui des allures de farce. Montréal aurait pu transformer un joueur marginal en superstar. Au lieu de ça, il a choisi la prudence, la fameuse « culture de vestiaire », ce bouclier derrière lequel l’organisation se cache, qui marche on doit l'avouer... mais qui nous coûte souvent un prodige. 

Aujourd’hui, le contrat d'evans qu’on vantait comme un vol ressemble davantage à un poids mort.

Et pendant ce temps, Zegras incarne tout ce qui manque sur le trio d'Ivan Demidov: le flair, la confiance, la personnalité. Il a non seulement la technique d’un prodige, mais aussi la prestance d’un meneur.

Sur la glace, il respire la liberté. Hors glace, il inspire la jeunesse. Il est exactement le genre de joueur que Cole Demidov aurait pu compléter à merveille, sans oublier que Cole Caufield est son ami intime.

Les partisans les ont vus rire ensemble à l’échauffement, se saluer longuement avant la mise au jeu. Ils ont même partagé le même toit l’été dernier, s’entraînant côte à côte. Tout était en place pour que Zegras rejoigne Caufield à Montréal. Il ne manquait qu’un peu de courage.

Jake Evans, lui, incarne l’inverse. Un joueur appliqué, discipliné, irréprochable dans l’attitude, mais qui a cessé d’évoluer.

Il ne dérange plus, ne provoque plus rien. À 2,85 millions par saison pour trois ans encore, son contrat (sans compter cette année), autrefois salué comme une aubaine, est désormais un boulet. Hughes croyait sécuriser un monstre défensif à bas prix. Il a enfermé le club dans un compromis nuisible.

La réalité, c’est que le hockey d’aujourd’hui récompense le talent, pas les Jake Evans de ce monde. Les Flyers ont pris un risque, et ils en récoltent déjà les fruits. Zegras a déjà 15 points (4 buts, 11 passes) en 13 matchs. Il anime l’avantage numérique, il inspire Michkov et il s’impose comme un joueur "deux sens" plus complet qu’on ne l’imaginait.

Et hier soir, au Centre Bell, quand Trevor Zegras a marqué ce but au ralenti, toute la ville a compris que la vraie gifle n’était pas celle encaissée par Montembeault. Elle venait de la direction du Canadien.