Depuis qu’Elliotte Friedman a confirmé que le Canadien regarde activement le marché pour ajouter un centre, un nom domine les discussions : John Beecher. Boston l’a envoyé au ballottage, et dans un contexte où Montréal a perdu Alex Newhook et Kirby Dach presque coup sur coup, l’idée de réclamer un centre naturel de 6 pieds 3, 220 livres, capable de jouer en désavantage numérique et d’enchaîner les mises au jeu gagnées, a immédiatement allumé le débat.
Sur papier, Beecher coche plusieurs cases. Centre gaucher, ancien choix de première ronde, 54 % d’efficacité dans le cercle, capable de transporter la rondelle en zone adverse, habitué aux minutes compliquées, déjà utilisé dans des rôles défensifs importants… et même auteur d’un but en séries lorsqu’il a émergé brièvement avec Boston au printemps 2024.
À 900 000 $, il représente un risque minime, et le CH est objectivement dans une situation où il doit au moins regarder ce marché-là.
Et Friedman ne tourne pas autour du pot :
Le Canadien est bel et bien dans la course.
Plusieurs équipes vont appeler, plusieurs équipes cherchent un centre, l’ordre du ballotage joue peut-être contre Montréal. Rien n’empêche toutefois Kent Hughes de tenter le coup si Beecher glisse.
Mais il y a un détail qui dérange, un détail dont on ne parle jamais quand on résume Beecher à son gabarit.
Un joueur de 6’3, 220 livres… qui, dès qu’il droppe les gants, mange des droites comme un gars de 5’10 qui n’a jamais appris à se défendre.
C’est là que le profil devient plus complexe.
Parce qu’en regardant les séquences circuler aujourd’hui, on réalise vite que Beecher, malgré sa taille, n’est pas un joueur qui impose le respect physiquement.
Il ne protège pas son visage, il recule mal, il se fait surprendre alors qu'il laisse son adversaire "connecter avec sa face".
Il arrive aussi à frapper le visage de son adversaire, mais le problème est qu'il ne se protège pas. Contre Jack Drury, c’était flagrant : Drury, pourtant plus petit et moins massif, l’a fait reculer avec trois droites nettes avant même que Beecher ne perde pied:
On parle d’un combat où Beecher, un gars théoriquement bâti pour prendre l’avantage, mais il a perdu sur toute la ligne.
Même scénario contre Jason Dickinson : deux bonnes droites, la tête qui fouette vers l’arrière, et un joueur qui finit plus par subir que par imposer quoi que ce soit.
Dans le langage du hockey, Beecher a le physique d’un policier… mais pas le style, ni la solidité. Il n’a pas la capacité de rendre la vie difficile à Mathieu Olivier, un Nicolas Deslauriers, un Matt Rempe, ou à n’importe quel vrai poids lourd.
Et c’est là que ça devient important pour Montréal.
Parce que le CH ne cherche pas seulement un centre.
Le CH cherche aussi, silencieusement, quelqu’un pour stabiliser l’aspect physique de l’équipe depuis qu'Arber Xhekaj reçoit correction sur correction et qu'il ne fait plus peur à personne.
Au moins, Xhekaj peut respirer. Beecher ne viendra pas le remplacer comme "shérif des pauvres".
Il peut offrir autre chose, par contre.
Et cette autre chose, elle n’est pas négligeable.
On parle d’un centre fiable, capable de jouer 8 à 14 minutes selon les besoins, sans faire exploser le banc, capable de gagner des mises au jeu défensives, utile en infériorité, intelligent sans la rondelle, mature dans son positionnement, et qui pourrait donner un peu d’air à Martin St-Louis dans une saison où chaque blessure au centre transforme la rotation en casse-tête.
Beecher n’est pas un sauveur.
Mais ce n’est pas non plus un passager inutile.
Il représente exactement ce qu’un club peut aller chercher gratuitement: un joueur qui peut aider tout de suite et qui coûte pratiquement zéro sur le plafond salarial.
Mais il ne réglera jamais la peur de tous les Québécois de voir Montréal se faire brasser physiquement, comme on l’a vu encore contre l’Ouest cette saison.
Ce n’est pas un joueur qui « impose la loi », ce n’est pas un joueur qui protège ses coéquipiers, ce n’est pas un joueur qui peut renverser l’élan d’un match en droppant les gants.
Il se bat parfois (5 bagarres dans la LNH) parce qu’il est gros, pas parce qu’il est bon pour ça.
Alors si Montréal le réclame, ce sera pour stabiliser un centre affaibli, pas pour ajouter un justicier.
Une police d’assurance, pas une police de combat.
Et dans le contexte actuel, vu le prix (gratuit), vu les blessures, vu les besoins, ça pourrait quand même suffire à convaincre Kent Hughes de tenter le coup.
Parce qu’à 900 000 $, un centre fiable qui mange des droites mais gagne des mises au jeu, c’est encore mieux que rien.
Mise à jour: Dommage. L’histoire s’est réglée avant même de commencer. Les Flames, bons derniers au classement général, possédaient le tout premier droit de parole au ballottage, ce qui leur donnait un accès automatique à Beecher. Ils en ont profité pour le réclamer. Montréal, lui, se trouvait loin derrière, au 22e rang, incapable de rivaliser avec un tel ordre de priorité. Le CH s'est fait couper l'herbe sous le pied.
