Des matchs comme celui de samedi viennent rappeler que la LNH n’a aucune pitié pour ceux qui hésitent.
Au Centre Bell, dans une soirée taillée pour les guerriers, Juraj Slafkovsky s’est rapetissé à vue d’œil.
Pas son corps, son impact. Son aura. Sa présence dans une rivalité où les joueurs deviennent des légendes… ou des passagers.
On attendait un power forward de 6’4’’ prêt à brasser les Bruins, à répondre au chaos, à imposer son identité.
Ce qui a glissé sur la glace, c’était autre chose : un jeune qui cherche encore qui il est, et qui essaie surtout d’être quelqu’un qu’il n’est pas.
Dès les premières minutes, le ton était donné. Jayden Struble a lancé un message clair en jetant les gants contre un Zadorov plus grand, plus lourd, plus expérimenté.
Un « statement » pur. Puis Arber Xhekaj s’est retrouvé sur le derrière contre Jeannot, mais au moins, lui, il y était.
Il participait. Il prenait son trou. Il envoyait un message.
Slafkovsky, lui, vivait dans un autre film. Celui où on joue au hockey comme un « playmaker européen » qui pense qu’il peut déjouer la jungle avec une feinte et un sourire.
Pas ce qu’on attend d’un power forward censé incarner la force brute dans une soirée où chaque présence était un test de caractère.
Et comme si ce n’était pas assez, il a décidé d’aller provoquer David Pastrňák en faisant tomber volontairement ses gants posés sur le bord de la bande, un geste enfantin qui ressemblait plus à une provocation de cour d’école qu’à un acte de leadership.
C’est beau être arrogant… quand tu backes ça avec du hockey.
Mais samedi, Slafkovsky tombait plus souvent qu’il ne touchait à une rondelle.
Des batailles à un contre un perdues en série, un manque d’explosion flagrant, et surtout, cette impression qu’il essayait de jouer un rôle qui n’est pas le sien.
Il veut être Demidov. Il veut créer. Il veut briller par le talent. Mais ce n’est pas son ADN. Pas pour l’instant.
Anthony Martineau l’a dit parfaitement, et pour une fois, impossible de ne pas le suivre :
« C’est un match physique. C’est exactement le genre de match où Slafkovsky est supposé briller. Il perd la majorité de ses batailles, tombe à répétition et manque d’explosion. J’écris ça parce que je suis l’un des plus optimistes concernant Juraj. Mais ce soir, c’est décevant jusqu’ici. Juraj Slafkovsky, au moment où ces lignes sont écrites, ne dispute pas un bon match de hockey. Et cette pénalité n’arrange rien. »
Pour un joueur censé être le prototype du power forward moderne, c’est gênant.
On regarde un bonhomme de 6’4’’, 240 livres, et on se dit qu’il devrait effacer des défenseurs de son chemin comme des cônes orange.
Mais samedi, chaque fois qu’il entrait en zone, on se demandait s’il allait rester debout.
16 minutes de glace, trois mises en échec généreuses, quatre minutes d’avantage numérique sans menace, aucune présence dangereuse.
Et surtout, cette impression qu’il ne comprend pas encore ce qu’il est censé être dans cette ligue.
Martin St-Louis l’a souvent répété : il ne peut pas prendre un joueur par la main.
Samedi, ça paraissait. Et ça commence à être irritant. Pas parce qu’on a perdu contre Boston.
Mais parce qu’on aurait aimé ça que Slafkovsky saisisse le moment.
C’était un de ces matchs où un jeune peut se définir, où il peut imposer sa volonté, où il peut dire : « Je suis là. Je suis un problème pour vous. »
Au lieu de ça, il est devenu un problème… pour son propre club.
Pendant ce temps-là, Ivan Demidov, plus frêle, plus jeune, moins imposant, jour après jour, joue avec plus de maturité.
Il crée. Il produit. Il ne tombe pas. Il ne provoque pas pour provoquer. Il comprend la game.
Et dans un vestiaire, ça commence à paraître. Il y a ceux qui parlent et ceux qui répondent. Slafkovsky, samedi soir, n’a été ni l’un ni l’autre.
On peut encore croire à son développement. On peut encore parier sur le projet à long terme.
Mais il va falloir que quelqu’un allume la lumière. Parce que si tu veux t’établir dans cette ligue, surtout dans un marché comme Montréal, surtout contre Boston, surtout dans des matchs où les gants tombent et où tout le monde saigne du nez… tu ne peux pas être un nain parmi les géants.
Pas quand tu es censé être le géant.
Ouch...
