Il aura suffi de quelques jours sur le sol canadien pour qu’Ivan Demidov renverse l’écosystème du hockey montréalais. Le jeune Russe n’a encore disputé aucun match, mais déjà, il fait parler de lui comme s’il avait mis le feu à une série de premier tour à lui seul.
Ce qui est fascinant, c’est que malgré son âge, malgré les embûches en Russie, malgré un système de KHL brutal et un entraîneur dictatorial, Demidov a avancé comme un vrai professionnel. Un vrai. Pas un fantasme. Pas une illusion.
Et pendant que certains s’amusent encore à le comparer à Matvei Michkov, la vérité se dessine de plus en plus clairement : Demidov est un niveau au-dessus.
Maxime Talbot, ancien joueur de la LNH et aujourd’hui bien branché dans les cercles russes, n’y est pas allé par quatre chemins :
« Demidov est vu comme étant en avance sur Michkov au même âge. »
Même son de cloche chez Jason Demers, qui a affirmé sans hésiter que Demidov est plus talentueux, plus complet, plus rapide, plus fort. Tous les observateurs sérieux en Russie le confirment.
Et pourquoi? Parce que pendant que Michkov se plaignait de ses minutes, Demidov produisait. Pendant que Michkov faisait ses petites crises pour obtenir du temps de jeu, Demidov encaissait les coups, restait humble, et finissait premier pointeur du SKA en séries.
Pas sur la troisième ligne. Pas en mode développement. Premier. Devant les vétérans. Devant les hommes.
C’est ce qu’on appelle une démonstration silencieuse. Une claque en pleine figure, livrée avec élégance.
Dan Milstein, l’agent de Demidov, n’est pas un amateur. Il représente Pavel Datsyuk, Nikita Kucherov, Ilya Sorokin, et toutes les stars russes.
Et lui aussi a fini par le dire tout haut :
« Si Demidov avait joué en Amérique du Nord cette saison, il aurait été perçu comme le premier choix du repêchage. »
Et il n’y a pas une once d’exagération. 60 points en 30 matchs dans la MHL. Un record. À titre comparatif, Kucherov – qu’on surnomme aujourd’hui « le Mozart du hockey offensif » – en avait obtenu 58... en 41 matchs.
On parle ici d’un joueur générationnel. D’un jeune qui analyse les systèmes NHL à 19 ans comme un entraîneur-adjoint.
D’un gamin qui, après avoir reçu une prime de championnat en Russie, a immédiatement appelé son agent pour lui demander quoi faire avec l’argent. À 17 ans.
Ce n’est pas juste du talent. C’est de la tête. De la discipline. De la maturité.
Il faut aussi rappeler ce que Jason Demers a souligné : Michkov est unidimensionnel. Un grand sens du but, certes, mais peu d’échec avant, pas de responsabilité défensive, et une attitude parfois difficile dans les vestiaires. Pendant ce temps, Demidov fait des replis. Fait des passes impossibles. Fait la guerre dans les coins.
Ce qui frappe encore plus, c’est la personnalité de Demidov. Milstein, un homme d’affaires qui ne distribue pas les compliments à la légère, l’a comparé à Kucherov dans sa préparation et son obsession de l’excellence.
L’agent raconte que même après les séries, Kucherov se remet à l’entraînement 72 heures après l’élimination. Et selon lui, Demidov a la même mentalité.
Ce sont des bêtes.
Ce n’est pas tout le monde qui est prêt pour Montréal. Mais lui, il l’est. Il est prêt pour le bruit, la pression, les attentes, les lumières. Parce que tout ça, il l’a vécu en Russie... et sans jamais flancher.
Et à ceux qui ont douté de Kent Hughes pour avoir ignoré Michkov en 2023, il faut se consoler : le DG du CH a misé sur l’intelligence, le caractère, et le bon timing. Il n’a pas choisi le plus flashy. Il a choisi celui qui allait débarquer à Montréal au bon moment. Pas en 2027. Maintenant.
Et Montréal en récolte déjà les fruits.
Ivan Demidov est déjà une star. Il n’a pas encore joué un seul match, mais déjà, il redéfinit ce que le Canadien représente pour ses partisans : de l’espoir crédible, de l’enthousiasme justifié, et une vraie raison de rêver.
Matvei Michkov? La vérité, c’est que Montréal retrouve le bon Russe. Celui qui veut être ici. Celui qui a tout fait pour traverser. Celui qui a gagné ses lettres de noblesse dans la douleur.
Et surtout... celui qui ne s’est jamais plaint.
Pendant que Montréal s’enflamme, pendant que les chandails numéro 93 s’écoulent plus vite que du sirop d’érable un matin de février, une autre ville, un autre vestiaire, vit l’éclosion de Demidov comme une gifle en plein visage.
À Philadelphie, Matvei Michkov est furieux.
Selon plusieurs médias locaux, des journalistes affectés aux Flyers ont tenté d’obtenir ses impressions sur l’arrivée spectaculaire de Demidov dans la LNH.
Après tout, ce sont deux visages du hockey russe. Deux anciens du SKA. Deux noms qui, jusqu’à récemment, étaient toujours liés dans la même phrase.
Mais Michkov, lui, n’avait visiblement aucune envie de parler de son rival.
Il a répondu poliment, du moins en surface :
« On verra. Il va devoir s’adapter. » Puis, plus rien. Une fermeture complète. Un silence glacial. Pas un mot de trop. Pas une once d’enthousiasme. Et selon des témoins présents dans le vestiaire, la tension était palpable. La fumée lui sortait presque des oreilles.
Parce que pour Michkov, c’est l’humiliation ultime.
Depuis un an, tout ce qu’il avait, c’était cette mince longueur d’avance : être déjà repêché, déjà sous contrat avec une organisation nord-américaine, et déjà dans l’imaginaire collectif comme le prodige russe. Il se pavanait comme l’élu. Celui que Montréal aurait dû choisir. Celui qui allait dominer la LNH.
Mais maintenant? Il n’est plus que le Russe numéro 2.
Ivan Demidov débarque en héros, en sauveur. Il est accueilli comme une rockstar. On lui ouvre les portes d’un top-6. On le couvre d’éloges.
On le compare à Datsyuk et à Kucherov. Et tout ça, pendant que Michkov patine dans l’ombre d’un club dysfonctionnel, avec un DG qui ne l’a jamais vraiment voulu, et un système d’organisation qui ne sait même pas comment le gérer.
Il n’y aura pas de poignée de main. Pas de déclaration commune. Pas de photo de deux amis russes unis par la passion du hockey. Ce n’est pas le style.
Ce qu’il y aura, c’est un duel silencieux, glacial, psychologique. Un face-à-face à distance entre deux égos, deux visions du jeu, deux parcours.
Et dans cette bataille, Demidov vient de remporter le premier round. Non pas avec des mots, mais avec le pouvoir du silence, la force du caractère, la dignité de l’ascension.
Pendant que Michkov ronge son frein dans un système qui ne le met pas en valeur, Demidov va jouer contre les Capitals. Dès lundi. Dans l’uniforme le plus mythique de la LNH. Sous les projecteurs. Dans l’arène.
Et il est prêt.
Ce texte ne signe pas la fin de Michkov. Mais il confirme une chose : Demidov est en train d’écrire sa propre légende.Et il n’aura pas besoin de la permission de personne — encore moins de celle de Matvei Michkov.