Le ciel est en train de tomber sur la tête de Patrik Laine.
Le match de ce soir contre les Hurricanes de la Caroline décidera du sort du Canadien. Une victoire, ou même un simple point, et c’est la qualification pour les séries éliminatoires.
Toute une saison se joue sur 60 minutes. Et pourtant, au moment où la logique voudrait qu’on aligne les meilleurs éléments, au moment où la pression exige lucidité et courage, Martin St-Louis a choisi… de redonner un bonbon à Patrik Laine. Un bonbon de trop. Une erreur fatale en devenir.
Parce qu’on va se le dire : replacer Patrik Laine avec Ivan Demidov et Alex Newhook, c’est une faute professionnelle. C’est un coup de poker inutile motivé par une seule chose : la peur du coach face à un vétéran frustré.
Et ce n’est pas juste une théorie. Ce n’est pas de l’interprétation malveillante. C’est un fait.
Dès le moment où Martin St-Louis a décidé d’écarter Joel Armia du trio de Demidov pour y insérer Laine, la chimie s’est évaporée comme neige au soleil.
Ça n’a pris que deux présences pour que le Québec comprenne ce qui se passe : Demidov ne peut pas briller quand le ballon de plomb qu’est Patrik Laine traîne derrière lui.
Le plus ironique dans tout ça? Le public était d’abord en furie lundi soir, choqué que Demidov doive entamer sa carrière nord-américaine avec Joel Armia et Alex Newhook.
Mais au fil du match, ce qui devait être une ligne de transition s’est transformée en véritable révélation. Une complicité naturelle s’est créée entre les trois, amplifiée par le calme défensif d’Armia et la mobilité de Newhook. Et le génie pur de Demidov a fait le reste.
Les partisans ont vite changé de ton.
« Je pensais que Demidov méritait mieux… mais Armia fait exactement le sale boulot dont ce trio a besoin. »
« Laine est incapable de garder la rondelle en zone offensive. Il tombe tout seul, c’est risible. »
« On dirait que Demidov doit trainer un frigidaire sur son aile droite maintenant. »
« Laine nuit. Point. Armia travaille. »
C’est violent. C’est cruel. Mais c’est vrai.
Et tout ça, Martin St-Louis l’a vu, l’a entendu, l’a lu. Mais il a quand même plié.
Il a quand même cédé à la crise de colère de Laine, qui n’a pas digéré sa rétrogradation dans le dernier match. Plusieurs témoins à Brossard ont rapporté un ton élevé entre le Finlandais et son entraîneur.
Des mots durs auraient été échangés. Une altercation verbale, une vraie, où Laine aurait exigé sa place sur un trio offensif.
Et Saint-Louis, au lieu de trancher pour l’équipe, a cédé à la pression individuelle. Il a réinséré Laine sur le trio de Demidov pour le match le plus important de l’année.
Quelle erreur.
Ce n’est pas Demidov qui avait besoin de Laine. C’est Laine qui avait besoin de Demidov pour se faire pardonner ses huit matchs d’avril sans production offensive, ses entrées de zone ratées, son manque d’effort en repli, ses bras dans les airs après chaque présence gaspillée.
Et ce n’est pas une image : dans le vestiaire, ça jase. Même les coéquipiers commencent à grincer des dents devant l’attitude du Finlandais.
Souvenons-nous aussi de ses propos d’il y a quelques jours, quand on lui a parlé de Demidov : « Je ne le connais pas. » Et surtout, ce coup de poignard en douce : « Dans la KHL, y’a plus de temps pour faire des jeux… »
Traduction? « Ici, c’est la vraie ligue. Lui, il va manger une claque. » Et puis il a terminé en rappelant que Demidov est gaucher. Comme pour dire : « Il ne jouera pas à droite. C’est ma place. »
La mesquinerie incarnée.
Aujourd’hui, ce mépris revient frapper Laine en plein visage. Parce qu’il est clair que Demidov est un joueur supérieur. Il est déjà le moteur de son trio.
Il a fait briller Armia, ce qui tient presque du miracle. Et maintenant, il devra ralentir son jeu pour accommoder un ailier droit paresseux qui perd la rondelle dans 70 % de ses entrées de zone?
Ce soir, le Centre Bell va encore une fois retenir son souffle à chaque présence du numéro 93. Mais ce ne sera pas pour les mêmes raisons. Ce sera par peur de voir un autre potentiel gaspillé.
Et la faute n’est pas à Demidov. Elle est à St-Louis. Encore une fois.
Car tout cela s’inscrit dans une longue série de décisions étranges. Pas sur la base de la performance. Pas sur la base du mérite. Mais sur la base de l’orgueil. De la peur. De l’égo.
Martin St-Louis refuse encore de placer Demidov sur la première unité d’avantage numérique, alors que l’équipe a le pire rendement de toute la LNH en avril. Il refuse de l’associer à Nick Suzuki et Cole Caufield, alors qu’il est sans doute leur complément parfait.
Il le garde sur le banc en tirs de barrage. Il lui donne 17 minutes par match, pas plus.
Pourquoi?
Parce qu’il veut envoyer un message. Parce qu’il ne veut pas qu’on dise que c’est Demidov le sauveur. Parce qu’il veut que le groupe passe avant l’individu.
Mais ce que St-Louis ne comprend pas, c’est qu’Ivan Demidov n’est pas un individu comme les autres. Il est une réponse. Il est une solution. Il est la meilleure chance que cette équipe a de survivre en séries — si elle s’y rend.
Et pendant ce temps, Patrik Laine continue de décevoir. Encore. Toujours. Le ciel lui tombe sur la tête et il est le seul à ne pas le voir venir.
Le Québec, lui, l’a compris depuis longtemps : Patrik Laine ne sera jamais un joueur aimé ici. Il est l’opposé de ce que le public valorise. Il ne transpire pas la passion. Il ne mouille pas le chandail. Il n’a aucune humilité.
Il est l’indésirable par excellence.
Et dans une ironie cruelle, Martin St-Louis continue de le protéger. De lui offrir des minutes. De lui offrir Demidov sur un plateau d’argent.
Mais ce soir, il n’y aura plus de place pour les états d’âme. Ce soir, c’est la saison qui est en jeu.
Et si Demidov est encore freiné par un partenaire de ligne inapte, si l’avantage numérique échoue encore sans lui, si le match bascule à cause d’une mauvaise décision de coaching, le peuple n’aura plus aucun doute :
Martin St-Louis aura sacrifié la saison pour ses principes. Et Patrik Laine en aura été l’arme du suicide.