Malaise dans un restaurant d'Ottawa: nos pensées accompagnent Ivan Demidov

Malaise dans un restaurant d'Ottawa: nos pensées accompagnent Ivan Demidov

Par David Garel le 2025-08-27

C’était censé être une sortie banale.

Un déjeuner entre amis, à Ottawa, loin de la pression montréalaise, loin des flashs, loin du stress. Mais pour Ivan Demidov, même un simple moment de répit est devenu un piège.

Le jeune prodige russe, considéré comme le plus grand espoir du Canadien de Montréal depuis Guy Lafleur, a craqué en public.

Et c’est aujourd’hui son ami, Arseny Gritsyuk, espoir des Devils du New Jersey, qui en fait le récit. Un témoignage troublant, qui en dit long sur la fragilité mentale du jeune homme.

Tout a commencé à Ottawa, lors d’un déjeuner dans un restaurant discret de la capitale fédérale.

Ivan Demidov et Arseny Gritsyuk, amis de longue date et anciens coéquipiers chez SKA Saint-Pétersbourg, profitaient d’un rare moment de calme.

Mais cette bulle a éclaté net lorsqu’un partisan, visiblement excité, s’est approché de leur table pour confirmer ce qu’il croyait reconnaître :

« Est-ce que t’es Ivan Demidov? »

Et là, l’impensable. Au lieu de répondre avec fierté, au lieu d’assumer son statut de jeune vedette adulée, Demidov a eu un réflexe de panique. Il a baissé les yeux, tourné la tête, et murmuré :

« Non, non… vous avez la mauvaise personne… »

Il a nié son identité. Comme s’il voulait disparaître. Comme s’il ne supportait plus le poids de la lumière.

Ce malaise n’est pas resté qu’un moment anecdotique. C’est Arseny Gritsyuk lui-même qui a choisi de le raconter, dans une entrevue émotive accordée à RG Media.

« Vanya voulait juste un moment normal. Il voulait sortir, respirer, penser à autre chose qu’au hockey. Mais dès qu’il a réalisé qu’on l’avait reconnu, il s’est refermé. Il a paniqué. Il ne voulait pas être traité comme une star. Il voulait juste être un gars normal. »

On ne pensait jamais voir ça de lui. Ça nous a brisé le cœur. On oublie que derrière l’image, c’est un gars de 18 ans. Il est loin de chez lui. Il ne comprend pas encore tout ce qui se passe. 

Cette attitude révèle un mal-être profond chez le jeune joueur. Un sentiment d’étouffement qui contraste violemment avec l’enthousiasme débordant des partisans montréalais.

Depuis son arrivée à Montréal, Ivan Demidov vit dans un tourbillon médiatique sans précédent. La ville, avide de héros, a rapidement érigé le Russe au rang de sauveur.

Chaque apparition publique, chaque photo, chaque vidéo d’entraînement devient virale. Sur TikTok, ses clips dépassent les millions de vues.

À Brossard, les gens campent presque devant le complexe sportif pour le voir. Mais cette adulation, aussi sincère soit-elle, devient une cage dorée.

Demidov ne parle pas encore parfaitement français, ni même anglais. Il n’a pas encore joué un seul match officiel avec le Canadien. Et pourtant, il est déjà une célébrité. Un statut qu’il semble assumer de plus en plus difficilement.

Selon certaines sources près de l’équipe, le jeune homme aurait demandé à limiter ses apparitions médiatiques au strict minimum. Le club, soucieux de ne pas le bousculer, aurait instauré une certaine barrière protectrice. Mais elle ne suffit plus.

Le plus inquiétant, dans le témoignage de Gritsyuk, c’est cette peur maladive qui semble habiter Demidov. Peur de décevoir. Peur de ne pas être à la hauteur. Peur de ne pas livrer ce que Montréal attend de lui.

« Il m’a dit qu’il avait peur de faire un mauvais match et de se faire détruire dans les journaux. Il lit tout, il voit tout. Et ça le ronge, » raconte Gritsyuk.

Ce genre de citation devrait faire réfléchir toute l’organisation. Car la ligne est mince entre pression constructive et pression destructrice. Montréal a broyé des espoirs par le passé. Il ne faudrait pas que le même sort guette Demidov.

Pour l’instant, le seul véritable soutien linguistique et émotionnel d’Ivan Demidov, c’est… Arseny Gritsyuk. Ironiquement, Gritsyuk ne joue même pas pour le Canadien. Mais les deux Russes se voient dès que possible. Ils partagent leurs repas, leurs confidences. Il y a là un besoin vital d’ancrage.

Et pourtant, malgré cette amitié précieuse, Demidov reste profondément seul. Loin de sa famille, loin de sa culture, loin de ses repères. Les joueurs russes qui réussissent à Montréal sont rares. La barrière culturelle est immense. Et la pression médiatique y est cent fois plus intense qu’à Moscou ou à Saint-Pétersbourg.

Au moins, il a son amoureuse, Ekaterina Yakovleva.

Reste qu'on parle d'un cri du cœur qu’il faut entendre.

En choisissant de raconter cette anecdote, Arseny Gritsyuk ne cherche pas à faire du tort. Il veut alerter. Sensibiliser. Offrir un regard intérieur que peu de gens osent partager.

« Ivan est fort, il est talentueux. Mais il a besoin qu’on le traite comme un humain. Pas comme un produit. »

Ce cri du cœur devrait résonner jusque dans les bureaux de Geoff Molson, Jeff Gorton et Kent Hughes. Oui, le Canadien veut gagner. Oui, les partisans veulent rêver. Mais si tout cela se fait au détriment de la santé mentale d’un jeune homme de 18 ans, alors tout le projet est voué à l’échec.

Heureusement, il semble que Martin St-Louis et ses adjoints soient parfaitement conscients du défi. Plusieurs mesures d’encadrement ont été mises en place.

Des rencontres régulières avec des psychologues sportifs. Un tuteur personnel pour faciliter son intégration. Des séances de communication. Et, surtout, une volonté de le protéger du cirque médiatique.

Mais rien n’est simple quand on s’appelle Ivan Demidov à Montréal. Et l’épisode d’Ottawa vient nous rappeler que la pression ne connaît pas de frontières géographiques.

Même à des centaines de kilomètres du Centre Bell, le jeune homme est reconnu. Interpellé. Confronté à son propre reflet de superstar.

Le conte de fées Demidov est encore à écrire. Mais avant d’en faire un héros, il faut s’assurer de ne pas en faire une victime.

Le témoignage d’Arseny Gritsyuk est un rappel brutal de la réalité : celle d’un jeune homme qui n’a pas demandé à porter toute une ville sur ses épaules. Et qui, parfois, aimerait juste qu’on lui fiche la paix.

Alors la prochaine fois que vous croiserez Ivan Demidov dans un café, un centre d’achat ou un aéroport… rappelez-vous qu’il est encore en train d’apprendre à respirer dans un costume trop grand pour lui.

Et qu’il suffirait d’un peu de bienveillance pour l’aider à grandir... au lieu de l’étouffer.