À première vue, tout semble beau dans le meilleur des mondes au vestiaire du Canadien.
Les sourires sont là, les poignées de main sont franches, et les discours officiels sentent bon l’esprit d’équipe.
Mais si on tend l’oreille un peu plus fort, on capte parfois un parfum subtil de « message codé »… surtout quand Alexandre Carrier parle de l’arrivée de Noah Dobson.
Carrier n’est pas du genre à s’enflammer devant les caméras.
C’est un gars de contenu, pas de spectacle.
L’an passé, il a eu droit à du temps de glace de luxe par défaut, parce que David Savard jouait sur une jambe et que la brigade défensive manquait cruellement de droitiers fiables.
Résultat : près de 21 minutes par match, des missions ingrates, et souvent le mandat de se coller à des monstres comme Tom Wilson.
On l’a vu, à répétition, se mettre entre Wilson et le filet comme un soldat qui ne calcule pas les risques.
Mais cette année, la donne change. Dobson débarque, tout droit de Long Island, avec ses 6 pieds 4, ses mains douces et son bagage d’expérience acquis chez les Islanders.
Et ça, ça veut dire que Martin St-Louis va réécrire sa hiérarchie.
Fini les 21 minutes par soir pour Carrier. On va le voir dans ses zones de confort : désavantage numérique, missions ponctuelles, et beaucoup moins de « toi, va t’occuper de ce buffle-là pendant 25 qu’on garde notre souffle ».
Et c’est exactement là que le « message codé » apparaît.
Parce que Carrier, tout en répétant qu’il accueille la compétition à bras ouverts, laisse passer une nuance dans son discours.
Quand il dit : « C’est juste bon pour l’équipe quand tout le monde se bat pour des chaises », on pourrait croire à une formule toute faite.
Mais ceux qui le connaissent savent que ce genre de phrase, ça vient souvent avec un clin d’œil.
Traduction libre : « Bienvenue Noah… mais sache que la chaise à laquelle tu t’assois, j’y ai déjà laissé ma sueur et mon sang. »
Ce qui est fascinant avec Carrier, c’est qu’il ne joue pas au faux modeste.
Il sait exactement où il se situe dans l’échiquier de la LNH.
Pas besoin de se vendre comme un défenseur top 2 ou de se battre pour arracher des minutes offensives.
Il est bien dans son rôle, et il sait que pour durer, il faut être capable d’accepter que l’équipe évolue… mais aussi de rappeler subtilement qu’on est encore là, prêt à reprendre le volant si l’occasion se présente.
Et c’est peut-être ça qui va piquer Dobson sans qu’il s’en rende compte.
Parce que Carrier n’est pas juste un gars qui bloque des tirs.
C’est un joueur intelligent, qui sait lire les intentions des coachs et qui a déjà gagné son respect dans le vestiaire.
Quand tu passes une saison entière à jouer les pare-chocs humains contre les meilleurs power forwards de la ligue, ça forge une réputation.
Tu deviens le gars qu’on appelle quand ça brasse pour vrai. Et ça, même un défenseur talentueux comme Dobson devra s’en souvenir.
Il ne faut pas oublier non plus le contexte. Dobson arrive avec une grosse étiquette.
Kent Hughes est allé le chercher en sacrifiant des actifs précieux, dont deux choix de première ronde et Emil Heineman.
Ce genre de transaction, ça ne se fait pas pour ajouter un figurant.
Ça se fait pour remodeler la structure de la défense. Carrier le sait, tout le monde le sait.
Mais dans la réalité de la saison, quand les blessures frappent, quand les coachs se fient à ceux qui connaissent déjà leur système, c’est souvent les vétérans fiables qui reprennent du galon.
En série, l’an passé, on a vu à quel point Carrier était indispensable.
Contre Washington, il a passé plus de temps à coller son ombre à Tom Wilson qu’à respirer.
Match après match, il s’est retrouvé dans le rôle du punching bag volontaire, absorbant les mises en échec, bloquant les lignes de passe, et neutralisant un joueur qui adore faire dérailler ses adversaires.
Et il l’a fait sans se plaindre, sans chercher les projecteurs. Mais ça, ça ne s’oublie pas dans un vestiaire.
C’est pour ça que son discours sur Dobson est aussi intéressant.
Il ne dit pas « je vais perdre ma place » ni « je vais me battre pour mes minutes ».
Il dit « c’est bon d’avoir de la compétition »… et ça sonne comme quelqu’un qui se prépare à tester la nouvelle acquisition.
Parce que dans le hockey, la compétition interne, ça ne se passe pas juste dans les stats.
Ça se passe dans les batailles le long des rampes, dans les pratiques où on refuse de céder un pouce, et dans les regards échangés après une mise en échec qui résonne un peu plus fort que prévu.
Le public montréalais, lui, adore ce genre de dynamique.
On aime nos vedettes, mais on vibre encore plus quand on sent qu’il y a une rivalité saine à l’interne, que personne ne prend sa place pour acquise.
Et avec St-Louis derrière le banc, ce genre de compétition risque d’être encouragé. On l’a vu l’an passé : il n’hésite pas à ajuster le temps de glace en fonction de l’effort, pas juste du talent.
En fin de compte, le « message codé » de Carrier à Dobson n’est peut-être pas une menace, mais plutôt une promesse : celle de ne jamais laisser le côté droit de la défense devenir un boulevard.
Une promesse que peu importe qui prend les grosses minutes, il y aura toujours quelqu’un prêt à sauter dans la tranchée quand ça chauffe.
Et pour le Canadien, c’est peut-être la meilleure nouvelle.
Parce que si Dobson et Carrier finissent par former une paire redoutable, le Tricolore pourrait enfin avoir un côté droit capable de rivaliser avec les meilleurs.
Dobson pour la relance et la vision de jeu, Carrier pour le muscle et la fiabilité défensive. Et si ça marche, on ne parlera plus de compétition, mais de complémentarité.
Mais avant d’en arriver là, il faudra passer par la phase d’apprivoisement.
Et dans cette phase-là, chaque mot, chaque geste compte. Quand un vétéran comme Carrier glisse un commentaire sur la compétition et les « chaises » à gagner, ce n’est jamais anodin.
C’est un rappel que le hockey, même au plus haut niveau, reste un sport où l’instinct de survie est roi. Où chaque joueur, peu importe son statut, doit prouver qu’il mérite sa place… tous les jours.
Et ça, Dobson va le comprendre très vite. Parce que dans un vestiaire comme celui du Canadien, il n’y a pas de zones grises.
Soit tu gagnes ton respect à coups de performances et de sacrifices, soit tu deviens un simple nom sur la feuille de match.
Et avec un gars comme Carrier pour lui rappeler ce principe, Dobson n’aura pas le choix de se mettre au diapason.
En attendant, les partisans peuvent déjà se frotter les mains.
La saison 2025-2026 promet d’être intense, pas juste sur la glace, mais aussi dans les coulisses.
Et si les messages codés continuent de circuler, on risque d’avoir droit à quelques belles histoires… et peut-être même à une paire Dobson-Carrier qui fera grincer des dents à travers la ligue.
À suivre ...