Quand un ancien joueur de la LNH, respecté, lucide et encore branché sur la réalité du vestiaire, décide de sortir publiquement pour dire que c’est fini, ça fait tellement mal.
Et quand cet ancien joueur s’appelle Antoine Roussel, qu’il a connu la dureté du métier, la cruauté des blessures et la réalité d’une chambre de hockey qui tourne la page si tu deviens nuisible, ses mots prennent un poids particulier.
Sur TVA Sports, Roussel a été cinglant et son message voulait tout dire.
C’est terminé pour Patrik Laine. Il ne remettra plus les pieds dans le vestiaire du Canadien... en tant que joueur...
C’est la conclusion sans pitié qu'on tire des propos de Roussel.
Depuis des semaines, le malaise autour de Patrik Laine s’amplifie. La blessure à la paroi abdominale, cette fameuse hernie sportive qui l’a conduit sur la table d’opération à New York, a été la goutte de trop.
Officiellement, on parle de « 3 à 4 mois » d’absence. Officieusement, tout le monde comprend que cette convalescence, à son âge, avec son historique médical et son rôle effacé dans la hiérarchie, ressemble davantage à une sortie définitive.
Roussel, dans son intervention, a mis des mots sur ce que plusieurs au sein de l’organisation pensent tout bas. Ce n’est pas juste une blessure, c’est une fracture symbolique.
Laine ne s’intègre plus, ni dans le plan de Martin St-Louis, ni dans la vision de Kent Hughes. Il est devenu un nom sur la liste des blessés, une ombre d’un ancien sniper, et surtout un rappel douloureux d’un pari raté.
Un joueur qui n’avance plus, et un club qui avance sans lui.
Le constat d’Antoine Roussel est d’une franchise rare.
Le hockey va vite. Si tu n’évolues pas, tu te fais avaler. Et à ses yeux, Laine a cessé d’évoluer depuis longtemps.
Avant sa blessure, il affichait une vitesse de croisière alarmante : lent dans les replis, hésitant dans les transitions, et presque effacé sur l’avantage numérique. Pire : il semblait détaché émotionnellement, comme si chaque match était devenu un fardeau.
Depuis son opération, le Canadien n’a pas seulement survécu. Il a explosé offensivement. Depuis le 17 octobre, l’avantage numérique du CH est le meilleur de toute la LNH. Ce n’est pas un hasard. C’est le jour où Laine a quitté la formation.
Tout a basculé dans le jeu de puissance du Canadien. Martin St-Louis a cessé de jongler avec deux unités équilibrées pour miser sur une seule, ultra-offensive, rassemblant Demidov, Caufield, Suzuki, Hutson et Matheson.
Ce choix radical, dicté par la perte de Laine, a transformé l’avantage numérique : fini les séquences prévisibles et les tirs statiques en périphérie, place à la créativité pure, aux permutations constantes et à une exécution éclair.
En deux semaines, le taux d’efficacité est passé de 15 % à 46,7 %. La blessure de Laine a forcé St-Louis à libérer ses jeunes talents, et le résultat prouve que le système s’est enfin trouvé... sans lui.
Cette statistique, sortie par Antoine Roussel lui-même à l’émission, résume l’inévitable. Sans lui, le jeu de puissance respire, circule, ose.
« Le système fonctionne mieux sans lui. Ce n’est pas une opinion, c’est un fait. »
Pour Roussel, la racine du problème est claire. Laine n’a jamais cadré dans la philosophie de Martin St-Louis. Le Canadien mise sur la vitesse, la transition, l’attaque en mouvement. Laine, lui, reste un pur tireur de l’ancienne école. Un joueur de demi-cercle, de réception, de présence statique.
Kent Hughes pensait pouvoir le relancer. Il voyait en lui un pari gagnant : un joueur blessé, mais récupérable, à réhabiliter dans un environnement sain.
Le problème, c’est que Laine n’a pas la même flamme.
C’est un gars qui joue au hockey parce qu’il sait qu’il est bon, pas parce qu’il veut se battre pour être le meilleur.
Une phrase qui glace le sang, mais qui illustre parfaitement l'effondrement autour du Finlandais.
Les rumeurs avaient commencé bien avant la blessure. Certains joueurs, même sans animosité, disaient à voix basse que « Patty » semblait ailleurs.
Son influence positive sur Demidov et Kapanen, vantée plus tôt par Anthony Martineau, ne suffisait plus à masquer le vide.
Le vestiaire du Canadien vit présentement une des plus belles phases de cohésion depuis cinq ans. Le noyau est jeune, impliqué, enthousiaste. Laine, blessé, solitaire, ne fait tout simplement plus partie du groupe.
Et c’est ce que Roussel a mis en lumière : Tu sens quand une équipe avance sans toi. Et dans ce cas-ci, le train est parti.
Antoine Roussel n’a pas cherché à adoucir son propos : la blessure de Laine, aussi triste soit-elle, arrange le Canadien.
Elle libère de la glace pour Demidov, renforce la chimie du trio de Suzuki, et permet à St-Louis de miser sur un avantage numérique plus moderne.
Ce n’est pas de la malchance, c’est la fin logique d’un cycle.
Le diagnostic médical est brutal : trois à quatre mois de convalescence, après une opération délicate effectuée par le Dr Mark Zolan à l’hôpital Lenox Hill de New York.
À ce stade, même un retour en février ne changerait rien. À la date limite des transactions, Laine n’aura joué que cinq matchs, pour un seul point. Il n’aura pas eu d’impact, et sa valeur marchande sera quasi nulle.
Le salaire de 8,7 millions $, combiné à son statut de futur agent libre sans compensation, achève le dossier.
Aucune équipe ne paiera ce prix pour un joueur blessé, lent et imprévisible.
Et si un club prenait le risque, ce serait à rabais, pour un choix de cinquième ronde ou un contrat problématique en retour.
Pour le Canadien, cette blessure devient presque un soulagement total.
C’est cruel, mais c’est la LNH : quand un joueur devient un poids, la seule issue, c’est de l’effacer de l’équation.
Le drame de Laine, c’est qu’il incarne toute une génération de joueurs au talent pur mais à la mentalité fragile. Ces snipers qui, il y a dix ans, faisaient rêver les partisans avec leurs tirs foudroyants, mais qui peinent à survivre dans le hockey moderne.
Le jeu a changé : aujourd’hui, il faut penser, patiner, forcer.
Et Laine, comme d’autres avant lui, n’a jamais vraiment voulu changer.
Antoine Roussel, en ancien guerrier, en parle avec ce mélange de compassion et de réalisme qui ne laisse aucune place à la nostalgie.
Il respecte le joueur, mais à un moment donné, il faut être honnête. Ce n’est plus le Patrik Laine d’avant. Et à Montréal, on n’a pas le temps d’attendre.
Le Canadien, pour l’instant, garde le ton diplomatique. Kent Hughes parle de « période de guérison ». Martin St-Louis évoque « une absence indéterminée ». Mais dans les faits, tout le monde sait que la séparation est consommée.
Même les partisans l’ont compris. Depuis sa blessure, l’ambiance s’est apaisée autour de l’équipe. Le jeu de puissance roule. Les jeunes s’épanouissent. Le collectif respire.
Personne n’attend le retour du Finlandais. Personne ne parle de son nom dans les points de presse.
Et quand un vétéran comme Antoine Roussel se permet de le dire publiquement, c’est que le message vient de l’intérieur.
Patrik Laine aura été un mirage. Une promesse brillante, brisée par le corps, la lenteur, et le temps.
Son dernier match, le 16 octobre, restera comme la fin d’une illusion.
Depuis, le Canadien va mieux sans lui. Et Antoine Roussel a simplement eu le courage de le dire.
Laine ne reviendra pas. Pas ici, pas maintenant, peut-être plus jamais dans cette ligue.
Et s’il fallait une preuve que le hockey ne pardonne rien, elle est là : le jour où ton absence rend ton équipe meilleure, c’est que ton histoire est déjà terminée.
