Pensées pour David Reinbacher et son père

Pensées pour David Reinbacher et son père

Par David Garel le 2025-01-27

David Reinbacher s'approche lentement mais sûrement d’un retour au jeu, et nos pensées accompagnent inévitablement son père, témoin silencieux de tout le calvaire qu’a traversé son fils depuis qu’il a été sélectionné par le Canadien de Montréal.

Ce lundi matin, à Brossard, en le voyant fouler la glace avec une aisance rasurante, portant ce chandail bleu marin interdisant les contacts physiques, il est difficile de ne pas imaginer les larmes aux yeux de son père, profondément ému par ce moment d’espoir tant attendu.

Depuis cette fameuse soirée du repêchage en 2023, où le jeune Autrichien est devenu le cinquième choix au total du Tricolore, sa vie a été bouleversée par une vague de critiques injustifiées et de commentaires cruels.

Le rêve d’une carrière dans la LNH s’est immédiatement transformé en cauchemar médiatique. Des partisans déçus, espérant un attaquant à la place de ce solide défenseur, se sont acharnés sur lui, ne lui laissant aucun répit.

Des commentaires parfois absurdes, voire méchants, allant jusqu'à évoquer des références historiques douloureuses à sa famille, ont blessé profondément son entourage.

Son père, marqué par cette tempête, a dû se résoudre à se tenir loin des réseaux sociaux, incapable de supporter les méchancetés dirigées vers son fils.

« Cela m’a déprimé, pour être honnête, » avait-il confié, des mois après cette soirée qui aurait dû être l’un des plus beaux moments de la vie de son fils.

« Montréal est l’endroit le plus fou au monde quand il est question de hockey Mais il y a des choses qui se disent et d’autres non.

Les gens auraient préféré Matvei Michkov à David? D’accord! C’est leur droit. Ça fait partie du repêchage et il n'y a rien de mal avec ça. Mais entendre ou lire des gens le détruire m'a brisé le coeur. »

L’excitation d’être choisi par l’une des franchises les plus prestigieuses de la LNH s’était vite estompée, remplacée par une tempête publique sans pitié.

Mais aujourd’hui, sur la glace de Brossard, David a fait taire toutes ces voix négatives, ne serait-ce que pour un instant.

Sous les yeux attentifs de ses coéquipiers et du personnel d’entraînement, le jeune Autrichien semblait en pleine forme.

Et puis, il y a eu cet instant magique. Une échappée, un moment de grâce, un face-à-face avec Jakub Dobes. D’un tir vif et précis, David a trompé le gardien, déclenchant une explosion de joie sur la glace.

Ses coéquipiers, dans un élan spontané, l’ont encerclé, l’ont enlacé avec une chaleur qui en disait long. Cole Caufield lui a fait un câlin comme si le CH venait de gagner la Coupe Stanley.

Il y avait dans cette accolade collective plus qu'une blague ou des niaiseries : c’était une déclaration d’amour, un message de soutien après des mois d’épreuves.

À des milliers de kilomètres de là, en Europe, son père Harald a sans doute ressenti cette vague d’émotion à travers son écran.

Ce geste simple, ces sourires sincères, tout cela devait lui rappeler pourquoi David se bat chaque jour. Peut-être a-t-il versé quelques larmes, non pas de tristesse cette fois, mais de soulagement.

Après tout ce qu’ils ont traversé ensemble – les critiques, les doutes, les blessures – voir son fils retrouver un semblant de normalité devait être un baume pour son cœur de père.

Harald se souvient de ces nuits blanches, passées à tenter de protéger son fils offensives gratuites en ligne, de ces moments où il aurait tout donné pour que David soit épargné de cette pression insensée.

« Ce qui est le plus frustrant, c’est de savoir que ces gens qui critiquent se cachent derrière un écran. En face, ils n’auraient jamais le courage de dire ces choses.

Ils profitent de l’anonymat pour balancer n’importe quoi sans en assumer les conséquences. C’est pour ça que j’évite désormais les réseaux sociaux, c’est devenu trop pesant. »

Puis est venue cette blessure, un coup du sort cruel, presque ironique, dans un match préparatoire contre les Maple Leafs de Toronto à la fin septembre.

Une déchirure au genou, un diagnostic impitoyable de cinq à six mois d’absence. L'attente, l’angoisse, la douleur physique et mentale.

Chaque jour, seul sur la glace, patinant sous le regard discret d’un thérapeute, Reinbacher s’est battu en silence, tandis que son père, impuissant mais plein d’espoir, observait de loin, portant en lui les cicatrices invisibles des critiques incessantes.

Mais aujourd’hui, une lumière pointe enfin au bout du tunnel. La scène vécue à Brossard, où Reinbacher a pu déjouer Jakub Dobes en échappée, a sans doute été un moment de pur bonheur, un instant de répit dans ce long périple semé d’embûches.

La joie spontanée de ses coéquipiers, leur élan de soutien, tout cela a dû raviver chez son père une fierté immense, un soulagement profond, après tant de mois d’inquiétude.

David Reinbacher ne demande qu’à jouer, à prouver qu’il mérite sa place, à faire honneur au chandail qu’il porte avec détermination.

Son père, lui, souhaite simplement voir son fils heureux, épanoui, débarrassé du poids injuste des attentes irréalistes et des jugements hâtifs.

Ce retour, même partiel, est une victoire en soi. Une victoire sur la douleur, sur le doute, et sur tout ce qu’il a dû endurer depuis ce jour où son nom a été appelé sur l’estrade du repêchage.

Il reste encore du chemin à parcourir, mais chaque coup de patin, chaque sourire échangé avec ses coéquipiers, chaque encouragement reçu, est un baume sur les blessures du passé.

Reinbacher, avec une humilité et une résilience exemplaires, trace son chemin, lentement mais sûrement, vers un avenir qu'il mérite pleinement.

Et son père, dans l’ombre, restera toujours son premier partisans, celui qui a tout vu, tout ressenti, et qui aujourd’hui, plus que jamais, peut espérer des jours meilleurs pour son fils.