La famille d'Arber Xhekaj doit être stressé en ce moment.
Car ce soir est le genre de moment qui donne des sueurs froides à un joueur qui a bâti sa réputation sur la peur qu’il est censé inspirer, parce que pour Arber Xhekaj, ce duel contre les Blue Jackets de Columbus et la présence de Mathieu Olivier de l’autre côté ne représente pas seulement un autre match au calendrier, mais bien un miroir impitoyable de ce qu’il était supposé devenir et de ce qu’il n’est plus.
Imaginez sa maman en ce moment. Chaque jour est un test mental violent où tout ce qui entoure le personnage de son fils, le “shérif”, est remis en cause à la lumière des derniers mois, des combats perdus, des décisions douteuses et de la montée d’un certain Jayden Struble comme nouveau "dur" du Canadien.
Dans la LNH actuelle, il n’y a pas beaucoup de vrais poids lourds qui font encore reculer les bancs adverses, mais Mathieu Olivier fait partie de ce cercle restreint, et son dernier combat contre Sam Carrick, un pur combat de rue où les deux se sont échangé des bombes jusqu’à ce qu’Olivier finisse par le coucher avec une droite claire, a fait le tour de la ligue et des réseaux sociaux.
Quand on voit Olivier qui ne recule jamais, qui accepte les pires défis, qui reste debout même quand ça brasse au niveau le plus violent du sport, on a mal pour Xhekaj.
Parce que tout le monde se souvient qu’Olivier l’a déjà corrigé, que déjà à ce moment-là, l'invincibilité d’Arber avait déjà pris un sale coup:
Au fil des combats perdus et des décisions qui donnent l’impression qu’il choisit davantage ses duels qu’il ne les impose, Xhekaj ne fait plus peur à personne.
Ce qui rend le match de ce soir particulièrement cauchemardesque pour lui, c’est que dans les jours précédant ce voyage-là, toute la province a découvert, grâce aux confidences de Jayden Struble, que le "shérif" avait la peur au ventre.
:Le Canadien a décidé de “répondre physiquement” aux Bruins, mais en cachant Xhekaj.
Le plan avait été discuté la veille autour d’un souper d’équipe avec Arber Xhekaj, et que dans ce plan, le plus petit des deux, Struble, six pieds et un peu plus de deux cents livres, avait accepté d’aller se jeter volontairement sur Nikita Zadorov, un monstre de six pieds sept et 255 livres, pendant que Xhekaj, lui, se réservait Tanner Jeannot, un adversaire certes dangereux, mais plus petit, plus léger et moins menaçant gabarit:
À 6 pieds 4 et 240 livres, Xhekaj voulait affronter le gars de 6 pieds 2 et 221 livres.
Or ce soir-là, Struble a tenu le coup contre la montagne et a gagné le respect de tout le monde:
Tandis que Xhekaj s’est fait sonner rapidement par Jeannot, l’image d’un “shérif” renversé par un adversaire plus petit que lui.
À partir du moment où ces détails-là sortent, où l’on comprend que ce n’était pas un simple réflexe de jeu mais une séquence préméditée, qu’il y avait une forme de plan partagé autour de la table, beaucoup de partisans et d’observateurs se sentent trahis dans l’image qu’ils avaient d’Arber Xhekaj, parce que le rôle d’un vrai dur, c’est de prendre le plus gros, de ne pas envoyer un coéquipier plus petit faire le sale travail à sa place.
Et si Xhekaj, celui qui se présentait comme le shérif de la LNH, commençait tout simplement à avoir peur, peur de perdre, peur de se faire humilier à répétition, peur de voir sa marque s’écrouler devant tout le monde?
C’est comme si la réalité venait frapper Xhekaj en pleine figure, car ce que tout le monde va regarder ce soir, ce n’est pas seulement la performance défensive d’Arber ou le résultat du match, mais la manière dont il va se comporter physiquement, son langage corporel lorsque Olivier est sur la glace.
On le sait déjà, Xhekaj joue désormais avec très peu de marge d’erreur aux yeux de Martin St-Louis, qui le punit à la moindre pénalité jugée inutile, qui réduit ses minutes dès qu’il perd une couverture, qui n’hésite pas à le clouer au banc pendant une période complète.
Et voilà qu'il doit affronter cette pression identitaire beaucoup plus lourde, celle de prouver qu’il appartient encore à cette catégorie de joueurs qui peuvent tenir tête aux vrais durs de la ligue.
La réalité donne mal au coeur: Mathieu Olivier fait plus peur qu’Arber Xhekaj, Mathieu Olivier impose plus de respect que lui, Mathieu Olivier incarne aujourd’hui ce que le CH croyait posséder en Xhekaj.
Le pauvre va vouloir prouver qu'il est encore le shérif. Est-il celui qu’on a vendu au public ou il est simplement un défenseur en crise de confiance, prisonnier de son personnage, qui va mettre sa vie en danger pour prouver un point?
Si on est sa maman, on n'a pas dormi de la nuit.
