On aurait dit une scène de résurrection. Un miracle. Une explosion en plein mois d’août. Après des mois de silence, de spéculations, d’inquiétudes, d’absences inexplicables, Kirby Dach est enfin réapparu sur la glace du complexe d'entraînement de Brossard à la fin du mois d'août, devant quelques témoins médusés.
Patins aux pieds, bâton en main, sourire discret aux lèvres : le grand mystère de l’été vient peut-être de connaître un premier dénouement.
Mais attention. Le retour du centre ne signifie pas la fin des ennuis. Au contraire. Ce que nous voyons, c’est une bombe à retardement.
Avant la première image depuis des mois, personne ne pouvait affirmer avec certitude où se trouvait Kirby Dach. Pas de photos. Pas de vidéos. Pas de rumeurs solides. Même au mariage de Nick Suzuki, où se trouvait littéralement tout le vestiaire du CH, Dach avait brillé par son absence.
Et puis, boum.
Les premières images de Dach patinant à Brossard ont déclenché une onde de choc. Sur les réseaux sociaux, dans les médias, et dans les bureaux du Canadien eux-mêmes. Car personne, absolument personne, ne s’attendait à un retour aussi soudain.
Mais si la présence de Dach à l’entraînement est rassurante, elle est loin d’être suffisante. Parce que l’enjeu ici, ce n’est pas seulement de savoir s’il va jouer. C’est de savoir s’il peut jouer une saison complète. Et les réponses sont de plus en plus inquiétantes.
Selon plusieurs sources, le Canadien de Montréal envisagerait d’utiliser la méthode du "load management" avec Dach cette saison.
Autrement dit : il ne jouera pas tous les matchs. On le ménagera. On l’économisera. Comme on l’a fait l’an dernier avec David Reinbacher après sa blessure au genou. Et comme les Ducks d’Anaheim l’ont fait avec Leo Carlsson, le deuxième choix au total de 2023.
Reinbacher, rappelons-le, avait un protocole clair : jamais deux matchs en 24h, absences fréquentes aux entraînements, objectifs de musculation entre les matchs.
Carlsson, lui, avait un programme de développement physique précis, mis sur pied pour compenser son manque de puissance musculaire dans les jambes.
Il est devenu le modèle du “load management” moderne. Repêché au deuxième rang par les Ducks d’Anaheim en 2023, le jeune prodige suédois n’a disputé que 55 matchs à sa saison recrue, malgré une santé globale satisfaisante.
Pourquoi? Parce que les Ducks ont instauré un programme ultra strict pour renforcer sa masse musculaire, éviter l’usure prématurée et lui permettre de s’adapter graduellement au rythme de la LNH.
Il ne jouait jamais deux matchs en deux soirs. Il sautait des entraînements. Il avait même des blocs de récupération intégrés au calendrier.
Et maintenant, c’est Kirby Dach qui entre dans cette logique de précaution. Une gestion du risque. Une gestion du doute. Une gestion de la peur.
Parce que si le Canadien est aussi prudent, ce n’est pas par hasard. Kirby Dach a déjà subi deux graves blessures au genou en trois ans. Et une troisième pourrait tout simplement mettre fin à sa carrière. C’est aussi sérieux que ça.
Son gabarit impressionnant, ses genoux fragiles, sa foulée lourde, et ses confrontations physiques font de lui une cible naturelle pour les blessures répétitives. Le Canadien le sait. Dach le sait. Son entourage aussi.
Et c’est pour cette raison qu’un protocole aussi strict est envisagé. Même s’il patine à Brossard. Même s’il sourit. Même s’il a l’air en forme. Tout cela ne garantit rien.
Ce qui rend cette situation encore plus explosive, c’est que Kirby Dach entre dans la dernière année de son contrat. Il empochera 3,362 millions de dollars cette saison, avant de devenir agent libre avec restriction à l’été 2026.
Mais dans un monde où l’on évalue la valeur d’un joueur selon sa durabilité et sa production, il est difficile de voir comment Dach pourra se bâtir un pont d’or s’il est déjà prévu qu’il ne jouera pas 82 matchs.
Un joueur qui coûte 3,362 M$ pour 50 ou 60 matchs, c’est un risque. Mais un joueur qui ne joue pas les back-to-backs, qui saute des pratiques, qui vit avec la peur d’un faux mouvement…, c’est une bombe financière pour pour l’agent qui devra négocier l'été prochain sur le marché des agents libres.
Et c’est d’autant plus troublant que le CH a sacrifié gros pour l’avoir.
On oublie trop souvent que pour obtenir Dach, le Canadien a d’abord sacrifié Alexander Romanov. Et que dans la foulée, il a aussi laissé filer Frank Nazar, un jeune qui explose actuellement à Chicago.
À l’époque, la décision semblait audacieuse. Aujourd’hui, elle commence à ressembler à une tragédie.
Le Kirby Dach qu’on avait imaginé comme centre numéro 2 de l’avenir est peut-être en train de devenir un boulet médical. Un joueur qu’on protège plus qu’on ne l’utilise. Un mystère qu’on ménage plus qu’on ne le valorise.
Sa réapparition à Brossard a aussi mis un frein brutal aux rumeurs de transaction.
Depuis plusieurs semaines, des murmures laissaient entendre que le CH préparait un coup pour aller chercher un vrai deuxième centre.
Les noms de Mason McTavish, Jared McCann, Pavel Zacha, Casey Mittelstadt, voire Ryan O’Reilly avaient circulé avec insistance. Certains voyaient même Zachary Bolduc se faufiler au deuxième centre dès l’automne.
Mais voilà que Dach envoie un message. Il est là. Il patine. Il répond aux rumeurs. Il ne dit rien publiquement, mais son simple retour à Brossard est une réponse claire à tous ceux qui l’enterraient déjà.
Reste que l’organisation, elle, continue de préparer l’après-Dach. Et ce retour ne change rien au plan de match global.
Ajoutez à ça le fait que Noah Dobson a aussi fait ses premiers tours de patin cette semaine, et vous obtenez un cocktail médiatique explosif à Brossard. Tous les regards sont tournés vers la glace. Les partisans cherchent des indices. Les journalistes s’agitent.
Mais au-delà des images et des sourires polis, la réalité est sans pitié. Kirby Dach est de retour, oui, mais il revient dans un monde qui a commencé à avancer sans lui.
Le plus triste dans tout ça? C’est que le Kirby Dach en santé est un atout incroyable. Un centre de 6 pieds 4, capable de marquer, de transporter la rondelle, de jouer avec puissance et finesse.
Mais on ne parle plus ici de talent. On parle de survie. De préservation. D’un joueur qui, à 24 ans, doit déjà gérer sa carrière comme un vétéran de 35.
Le Canadien tente de sauver ce qu’il peut. Mais le simple fait qu’on parle déjà de "load management" pour Dach en dit long sur la peur qui règne à l’interne.
Il patine. Il sourit. Mais derrière l’image, il y a un joueur qui sait que tout peut basculer sur une mauvaise chute. Une organisation qui sait que tout son plan pourrait s’effondrer.
Et des partisans qui, eux, hésitent entre espoir et résignation.
Parce qu’on ne mise pas 3,362 millions sur un protocole de musculation.
Parce qu’on ne reconstruit pas une franchise sur un genou qui menace de céder à tout moment.
Et parce que, dans le fond, même une commotion à Brossard n’efface pas une bombe à retardement.