Ce devait être une simple chronique sportive, un segment d’opinion parmi tant d’autres. C’est devenu un scandale national.
Depuis jeudi soir, Quebecor fait face à une tempête d’indignation après la diffusion d’un segment où Jean‑Charles Lajoie et Mario Dumont auraient, selon plusieurs internautes, ri de l’émotion de Jakub Dobeš, le jeune gardien du Canadien, vu en larmes après la défaite de 4‑3 en prolongation contre les Devils du New Jersey.
Ce qui choque, c’est le ton du segment : une forme de moquerie à peine voilée envers un athlète de 22 ans, dévasté par une contre‑performance pourtant honorable.
Au moment où le mois de novembre est consacré à la sensibilisation à la santé masculine et mentale, l’extrait a soulevé une vague de réprobation instantanée.
Les images de Dobeš en sanglots avaient profondément marqué les partisans. On y voyait Chantal Machabée elle‑même, vice‑présidente aux communications du Canadien, consoler le jeune homme dans le vestiaire, une scène d’une humanité rare dans un sport souvent brutal.
Quelques heures plus tard, le segment de Lajoie et Dumont s’est attaqué au sujet, mais d’une manière que plusieurs ont jugée condescendante.
Selon de nombreux utilisateurs de X, les deux animateurs auraient tourné la situation en dérision, adoptant un ton moqueur en parlant du gardien en pleurs.
Certains affirment que Qub Radio aurait retiré la vidéo du web, ce qui alimente encore plus le soupçon d’un malaise interne, mais aucune version officielle n’est aujourd’hui disponible en ligne.
L’indignation a pris feu à la vitesse d’une mèche courte. Les réactions affluent depuis vendredi matin :
« Classique TVA… c’est pas surprenant malheureusement ».
« Certains hommes ont vraiment rien compris ».
« Pas comme si j’avais besoin de raisons supplémentaires pour ne pas écouter TVA Sports ».
Les commentaires sont cinglants, souvent outrés, et traduisent un rejet global du ton adopté par le réseau. Plusieurs rappellent que TVA Sports perdra ses droits de diffusion du Canadien en 2026‑2027, et voient dans cette polémique un symbole de déconnexion entre la chaîne et le public :
« L’an prochain, TVA ne rira plus des Canadiens, puisque le réseau ne diffusera plus aucun match »
Au milieu de cette tempête numérique, un mot revient sans cesse : respect.
Ce qui rend la situation encore plus choquante, c’est la différence entre le segment de Qub Radio et les images de Chantal Machabée.
Pendant que certains commentateurs riaient de l’émotion d’un gardien, la dirigeante du Canadien jouait le rôle d’une mère de vestiaire, en restant aux côtés de Dobeš, visiblement effondré.
Son geste a été salué partout :
« C’est le cœur de mère de Chantal qui a parlé », écrivaient des internautes, émus par la scène. On voyait dans son regard la compréhension, la tendresse, le refus de juger. Elle incarnait ce que le sport a de plus humain.
De l'autre côté, les rires en studio ont résonné comme une gifle.
Et dans un mois où le hockey multiplie les messages de prévention sur la santé mentale masculine, la contradiction est devenue intenable.
La question n’est pas insensée. Novembre est le mois Movember, celui où l’on aborde ouvertement les enjeux de santé mentale chez les hommes, les athlètes, les jeunes. Voir deux commentateurs d’expérience se moquer d’un joueur émotif heurte directement cette cause.
Jakub Dobeš n’a commis aucune faute grave : il a accordé quatre buts sur 28 lancers, il a été laissé seul sur plusieurs séquences, et il a simplement craqué, visiblement envahi par la pression. Ce n’était pas de la faiblesse. C’était de l’humanité.
Et pourtant, certains ont choisi d’en rire.
Cette attitude révèle un fossé générationnel dans la culture sportive. On célèbre les « warriors », on glorifie les joueurs qui « ne montrent rien », mais on ridiculise ceux qui osent ressentir.
Le sport québécois n’est pas encore prêt à accepter l’émotion masculine. Et c’est exactement ce que plusieurs internautes dénoncent depuis 48 heures : cette incapacité à concilier performance et sensibilité.
Certains affirment que les dirigeants auraient ordonné le retrait du segment après avoir constaté la tournure des commentaires. D’autres pensent que les animateurs eux‑mêmes ont réalisé la maladresse trop tard. Ce silence ne fait qu’attiser les soupçons.
Car dans une ère de transparence forcée, l’absence de réponse est perçue comme une forme de culpabilité.
Pour Jean‑Charles Lajoie, cette controverse tombe au pire moment. Déjà critiqué à plusieurs reprises pour son ton provocateur, il se retrouve une fois de plus au cœur d’un débat sur la décence médiatique.
Quant à Mario Dumont, dont l’émission se veut plus politique que sportive, son rire, s’il a bien eu lieu, choque par son manque de jugement. On attend d’un vétéran politique qu’il comprenne l’importance du contexte, surtout quand le joueur en question pleure dans un vestiaire, filmé par les caméras de tout un pays.
Il ne s’agit pas d’une erreur de vocabulaire, mais d’un manque d’instinct humain. Et à une époque où les athlètes dénoncent de plus en plus ouvertement les effets psychologiques de la pression médiatique, ce genre d’attitude paraît d’un autre siècle.
Face à cette dérive, le public s'est rangé derrière Dobeš. Les messages d’encouragement se sont multipliés sous les publications du Canadien et sur les forums de partisans. Plusieurs saluent sa passion, sa sincérité et sa franchise.
« Ce gars‑là veut gagner. Il se bat pour l’équipe. Respect », résume un internaute.
Cette réaction massive montre que la société québécoise n’adhère plus à l’humiliation des athlètes. Les moqueries publiques, autrefois banalisées, sont désormais perçues comme des agressions symboliques. Ce glissement culturel est profond : on veut des athlètes vrais, pas des machines.
Cette tempête médiatique est aussi un avertissement clair pour TVA Sports et Qub Radio. Le public ne tolère plus le mépris. La chaîne, déjà affaiblie économiquement et bientôt privée de la diffusion des matchs du Canadien, ne peut plus se permettre ce genre d’incident.
L’affaire Lajoie‑Dumont est plus qu’un simple "bad buzz". Elle symbolise le malaise d’un écosystème médiatique à bout de souffle, qui cherche le clic, la provocation, au détriment du respect des individus.
Pendant que le hockey tente de moderniser son discours, de parler santé mentale, bien‑être, équilibre, certains animateurs continuent de jouer les durs, comme si l’époque ne changeait pas.
Mais elle change. Et le rire de trop pourrait bien devenir le symbole d’une génération médiatique... sur le respirateur artificiel...
