TVA Sports sème la confusion à Montréal.
C’est une notification qui a surgi en plein samedi après-midi, envoyée par l’application de TVA Sports, comme de l'huile sur le feu déjà prêt à exploser.
« Une cible pour le CH », titrait la pastille envoyée à des milliers de partisans en alerte. Et voilà que la machine à rumeurs s’emballe, comme à chaque fois qu’un joueur québécois est vaguement disponible sur le marché. Mais cette fois, c’est différent. Cette fois, c’est dangereux.
Dès que la notification push annonçant que Samuel Girard était la cible du Canadien de Montréal a été envoyée sur l’application mobile du réseau, c’est toute la province qui a sursauté.
L’alerte a enflammé les cellulaires québécois. Les clics se sont multipliés à une vitesse folle. L’application a littéralement explosé. Pourquoi ? Parce qu’on touche à la corde sensible. Un joueur québécois, encore jeune, déjà décoré d’une bague de la Coupe Stanley… et surtout, un survivant.
La famille Girard, elle, n’aurait pas pu rêver meilleure nouvelle. Depuis le drame personnel vécu par Samuel en 2023, tout ce qui rapproche leur fils du Québec est perçu comme un baume sur des années de blessures.
Dans une entrevue bouleversante accordée à TVA Sports, Tony Girard, père de Samuel, a ouvert la plaie:
« Ce n’est pas le hockey qui est important dans la vie, c’est ce qui se passe là-dedans », a-t-il dit en pointant la tête. C’est ce qui a changé. Samuel Girard est passé à travers une période sombre, à l’abri des projecteurs, en silence.
La dépression, l’anxiété, la boisson pour anesthésier la douleur…
« Sam n’était plus capable de ne prendre qu’une bière pour faire taire ces mauvaises pensées. »
Aujourd’hui, la perspective d’un retour au bercail, sous les feux de la rampe du Centre Bell, représente bien plus qu’un simple échange de joueurs.
C’est un espoir de renaissance pour une famille entière.
« On en a pleuré un coup, mais on était fiers de notre gars », a dit Tony, la gorge nouée. Sobriété, équilibre, sérénité… ces mots n’ont jamais eu autant de valeur dans la vie de Samuel.
Son frère Jérémy l’a même suivi sur le chemin de la sobriété, renonçant à la boisson lui aussi, pour l’encourager à tenir le cap.
« C’est l’amour d’une famille, c’est l’amour entre frères », a résumé Tony, qui voit désormais un fils « transformé », un joueur heureux, souriant, et surtout, libre de ses démons.
Et TVA Sports le sait. C’est probablement pour ça que l’alerte a été si puissamment rédigée. Parce qu’au-delà du hockey, c’est une histoire humaine que le Québec est prêt à accueillir.
Mais à moins que Kent Hughes ait décidé de liquider Mike Matheson, il n’existe aucune logique sportive ou contractuelle à l’arrivée de Samuel Girard à Montréal. Aucune. On parle ici d’un défenseur gaucher de 5’10, 170 livres, qui coûte 5 millions $ par saison pour encore deux ans, et qui vient de terminer une saison correcte, mais loin d’être spectaculaire, avec 24 points en 73 matchs, tout en jouant en moyenne 20 minutes par match.
Girard revient de loin. Très loin. En novembre 2023, il s’était volontairement retiré du jeu pour soigner des problèmes de santé mentale et de dépendance. Une décision courageuse, saluée par toute la LNH. Il est revenu fort, a repris sa place au sein de l’Avalanche, et s’est comporté comme un vrai professionnel.
Mais soyons honnêtes : ce type de parcours n’a aucun lien avec les besoins réels du Canadien de Montréal. Ce n’est pas une question de cœur ou de rédemption. C’est une question de logique hockey.
Le CH croule déjà sous les défenseurs gauchers : Lane Hutson (aussi un petit gabarit), Mike Matheson, Kaiden Guhle, Arber Xhekaj, Lane Hutson, Adam Engström, Jayden Struble...
Et on voudrait ajouter un autre défenseur petit format, fragile physiquement, payé au prix fort, alors que l’équipe cherche désespérément un défenseur droitier costaud pour stabiliser sa brigade?
Ce que fait TVA Sports avec cette notification, c’est jouer avec le feu. Une manœuvre éditoriale qui cherche à enflammer les réseaux sociaux pour une rumeur louche qui ne tient pas la route une seconde.
Pourquoi? Parce que Samuel Girard est Québécois. Et que dans la tête de certains producteurs, Québécois = rumeur Canadien de Montréal.
Le réflexe est logique. Chaque fois qu’un joueur d’ici devient disponible, ou même simplement mentionné dans un segment de Frank Seravalli, la machine à clics s’active et si on est honnête, TVA Sports fait ce que nous faisons tous:
« Girard à Montréal? Pourquoi pas! » Parce que c’est le lien facile. Parce que ça génère de l’engagement. Mais surtout, parce que ça n’a rien à voir avec la réalité du vestiaire du CH.
Pourquoi Girard est-il sur le marché, au juste? Parce que le Colorado est coincé sous le plafond salarial. Avec la récente signature de Brock Nelson pour 3 ans à 7,5 millions $ par saison, l’Avalanche se retrouve avec seulement 1,2 million $ de marge de manœuvre, et deux postes encore à combler. Et encore, ça, c’est avec seulement cinq défenseurs sous contrat.
Sam Girard est le joueur le plus logique à bouger, car son contrat est facile à bouger, et sa production ne justifie plus son rôle dans l’alignement. Sa clause partielle de non-échange (il peut refuser 9 équipes) complique un peu le dossier, mais le mot est clair : Girard doit partir.
Mais pas à Montréal. Certainement pas.
Montréal n’est pas une poubelle pour les surplus du Colorado
Ce n’est pas parce qu’un joueur est bon, québécois et disponible que le CH doit se précipiter. Encore moins lorsque ce joueur évolue à gauche, est fragile physiquement, et coûte une fortune dans un contexte où la masse salariale du Canadien est déjà sous tension.
Rappelons que le CH a besoin d’un centre top 6, d’un ailier gauche productif, et surtout d’un défenseur droitier capable de jouer sur la première ou deuxième paire. Samuel Girard ne répond à aucun de ces besoins. En ajouter un autre dans le moule Matheson-Hutson-Guhle, c’est créer un boulet qui nuira au développement de tous.
Et si le plan est d’échanger Matheson pour faire de la place à Girard? Alors là, il faut carrément se demander si Kent Hughes est tombé sur la tête.
Le problème, ce n’est pas Samuel Girard. Ce n'est pas non plus l’éditorialisation irresponsable de TVA Sports. L’envoi de notifications comme celle-ci banalise la réalité du marché des transactions. Elle transforme la couverture du Canadien en une télé-réalité où le public est constamment excité pour rien.
C'est la loi de la jungle et Hockey30 en fait partie.
Pire : ça crée de la frustration. Des attentes irréalistes. Et ça détourne l’attention des vrais chantiers.
Le CH n’est pas une équipe qui doit "patcher" un trou avec un joueur sympathique. Le CH est en reconstruction contrôlée, avec une feuille de route précise. Samuel Girard n’en fait pas partie, peu importe sa langue, son histoire ou sa disponibilité.
Le marché des échanges s’annonce féroce. Kent Hughes doit sortir un lapin de son chapeau pour trouver un défenseur droitier, et il n’a pas les moyens de gaspiller des actifs ou de l’espace salarial sur des pièces non essentielles.
Girard est un luxe que le CH ne peut pas se permettre. Il pourrait rendre service ailleurs, dans une équipe déjà bien bâtie, qui veut un défenseur mobile en soutien. Mais à Montréal, il viendrait empirer un problème de congestion déjà malaisant à gauche.
Surtout avec le prodige Lane Hutson, tout petit, mais tellement plus talentueux que Samuel Girard.
Samuel Girard est un feu de paille éditorial allumé pour faire vibrer l’orgueil québécois sans aucun fondement stratégique.
Le Canadien n’a pas besoin de Girard.
Le Canadien a besoin de lucidité.
Et TVA Sports, d'une nouvelle statégie pour attirer le public.