Coup de théâtre. Bombe médiatique. Revirement total. Appelez ça comme vous voulez, mais ce que Jeff Gorton a laissé échapper lors du bilan de fin de saison du Canadien de Montréal a électrisé les cercles de la LNH et déclenché une onde de choc dans tous les salons de partisans du CH.
Alors qu’on s’attendait à l’éternel refrain sur la recherche d’un centre numéro deux, voilà que le vice-président des opérations hockey a dévoilé une tout autre carte : il veut peut-être un ailier. Et pas n’importe lequel. Il parle d’un ailier de 100 points.
« Si tu regardes à travers la ligue, il y a des joueurs qui ne sont pas nécessairement des centres, mais qui produisent 100 points et sont les électrochocs de leur trio », a-t-il lâché, sourire en coin.
Une déclaration en apparence banale, mais qui change complètement le plan de match du Tricolore. Car depuis des mois, tous les projecteurs étaient braqués sur le poste de centre numéro deux. Maintenant, tous les yeux se tournent vers... les ailes. Et un nom ressort immédiatement : Mitch Marner.
Le fantasme ultime. L'ailier star, natif de la région torontoise, adulé par la presse canadienne anglaise, toujours vu comme le sauveur potentiel d’une franchise en manque d’adrénaline offensive.
Mitch Marner, qui trône au sommet de la liste des joueurs autonomes de 2025, est le rêve du CH. Mais un rêve tout sale.
Parce que pour l’avoir, il faudrait tout bousiller. Tout détruire. Marner coûte une fortune. Il veut devenir le joueur le mieux payé de toute la LNH. Et avec l’impôt du Québec, disons-le franchement : ça sent le cauchemar administratif.
Et pourtant... On continue d’en parler. Parce que Gorton a ouvert la porte. Et dans ce marché, ouvrir la porte, c’est suffisant pour que toute une ville devienne folle.
Mitch Marner, l’homme de 100 points, le joueur de finesse, de créativité, de punch offensif. Celui qui pourrait faire d'Ivan Demidov un géant de 40 buts, et qui pourrait transformer Nick Suzuki en véritable premier centre.
Mais soyons lucides : Marner, c’est le rêve impossible. Il ne veut pas quitter Toronto. Et s’il le fait, ce sera pour un marché américain sans taxes, avec un noyau prêt à gagner maintenant. Le CH n’est pas là. Et c’est là qu’un autre nom, bien plus réaliste, commence à circuler avec insistance dans les coulisses : Nikolaj Ehlers.
L’un des meilleurs amis de Patrik Laine. Un ailier explosif, rapide, sous-estimé. Un ailier de transition. Un véritable catalyseur.
Ehlers sera libre comme l’air le 1er juillet. Et pour une équipe comme Montréal qui cherche désespérément à créer de l’attaque, c’est peut-être la solution la plus crédible, la plus intelligente, la plus réalisable.
Ehlers a connu une saison discrètement très efficace à Winnipeg. 63 points en 69 matchs, rôle accru sous Scott Arniel, mais un désir de changement.
Il ne s’est jamais totalement senti reconnu dans la ville sombre de Winnipeg. À Montréal, il deviendrait instantanément une vedette.
Le lien avec Laine n’est pas à négliger. Les deux pourraient relancer une chimie européenne qui manque cruellement au CH depuis l’ère Kovalev-Koivu.
Et contrairement à Marner, Ehlers ne demanderait pas 12 millions par année. Il pourrait accepter un contrat entre 6 et 7 millions, selon la durée.
Pour un joueur de 29 ans qui n’a jamais été vraiment utilisé sur la première vague d’avantage numérique à Winnipeg, c’est une aubaine potentielle.
Mais ce n’est pas tout. Un autre nom commence à monter dans les conversations internes du CH : Brock Boeser.
Boeser, 28 ans, vient de connaître une saison en dents de scie à Vancouver, mais possède encore l’un des meilleurs tirs sur réception de toute la ligue.
Il a été offert à rabais par les Canucks à la date limite, mais personne n’a voulu mordre. Résultat : il pourrait tester le marché sans grande pression, dans l’espoir de relancer sa carrière dans un marché où il serait utilisé comme tireur d’élite.
Or, Martin St-Louis adore les joueurs capables de marquer à distance. Le power play du CH a été inconstant cette saison. Boeser pourrait être la pièce manquante, celle qui débloque les unités spéciales.
Le prix sera moindre que pour Marner. Et son profil correspond bien à ce que recherche le CH : un vétéran capable de produire rapidement, sans freiner la progression des jeunes.
Le plus fou, c’est que cette stratégie d’aller chercher un ailier dominant pourrait aussi rebattre les cartes pour d’autres joueurs dans l’alignement.
En ajoutant un Marner, un Ehlers ou un Boeser, on redéfinit l’équilibre du top 6. Et on prend soin d'Ivan Demidov qui mérite de jouer avec un joueur d'élite.
Mais la vraie question demeure : pourquoi Gorton a-t-il lancé cette bombe maintenant?
La réponse est simple : il veut renverser le narratif. Les journalistes, les experts, les partisans répètent depuis un an que le CH a besoin d’un deuxième centre.
Gorton, lui, veut montrer qu’il peut gagner autrement. Que l’époque où l’on alignait deux centres dominants est peut-être révolue. Que dans la LNH moderne, un ailier peut être la pièce centrale d’un trio, s’il est assez bon.
« Je prends plaisir à lire vos articles », a-t-il dit aux journalistes, sourire en coin. Traduction : je vous écoute, mais je fais ce que je veux.
Et il a raison. Ce marché, trop souvent figé dans ses vieilles idées, doit apprendre à évoluer. L’ailier est la nouvelle vedette. Le CH peut gagner avec un Demidov bien entouré. Mais pour ça, il faut un gros coup. Et Gorton semble prêt à le faire.
Alors oubliez les centres. Oubliez les débats sur John Tavares ou Sam Bennett. Le vrai marché, l’endroit où le CH peut frapper un grand coup, c’est à l’aile. Et les options sont là : Mitch Marner si on rêve, Ehlers si on est futé, Boeser si on est stratégique.
Mais une chose est certaine : Jeff Gorton a changé le narratif. Et il ne regarde plus au centre.
Il regarde vers l’extérieur. Vers les ailes. Vers l’avenir.