Tempête à l'hôtel: Justin Carbonneau brasse Cole Caufield

Tempête à l'hôtel: Justin Carbonneau brasse Cole Caufield

Par David Garel le 2025-06-05

À Buffalo, en marge du Combine de la LNH, il y a eu les espoirs polis, timides, bien rangés. Et puis il y a eu Justin Carbonneau, 6 pieds 1, 195 livres d’attitude pure, sourire en coin, torse bombé, et un regard qui dit tout haut :

« J’suis le meilleur ici, pis j’le sais. »

Son nom circule partout. Mais ce n’est pas pour les mêmes raisons que ceux de Carter Bear ou KaShawn Aitcheson. Si eux séduisent par leur humilité et leur engagement discret, Carbonneau, lui, se démarque par son aplomb, son arrogance assumée, et son indifférence totale face à la controverse.

Le courriel? Il s’en fout.

Oui, Justin Carbonneau a congédié son agent Jonathan Lachance par courriel. Oui, il lui a demandé de ne plus le contacter. Oui, ça a fait jaser dans les cercles de la LNH. Mais quand on l’interroge à ce sujet, il hausse les épaules, l’air de dire : “Et puis?”

Il le sait. Il sait que le Canadien de Montréal n’a pas aimé. Il sait que certaines équipes l’ont vu comme un signe d’immaturité. Mais plutôt que de se défendre maladroitement ou de jouer à la victime, il persiste et signe.

Il regarde en avant. J’ai fait ce que j’avais à faire.

Et non seulement il n’essaie pas de faire amende honorable… il en rajoute.

Le cocky se bombe le torse devant le CH.

Rencontré à l'hôtel luxeux, Marriott Harborcenter, après son entretien officiel avec le Canadien, Carbonneau ne se cache pas. Il voulait cette rencontre. Il l’a eue. Et il est arrivé là comme un gars qui se voit déjà sur la première ligne. Pas de gêne, pas de filtre.

« Si je suis repêché par le Canadien, je me vois jouer avec Suzuki et Slafkovsky », a-t-il affirmé à Anthony Martineau de TVA Sports, comme si c’était une évidence.

Et sans nommer Cole Caufield, le message était sans pitié. Selon lui, ce n’est pas un petit ailier qui se fait malmener par les Capitals qui devrait compléter le premier trio. Non, c’est lui, Justin Carbonneau, le power forward qui frappe, qui patine, qui fonce au filet. Celui qui peut compléter Suzuki et Slafkovsky avec du grit, de la force brute, et surtout, une mentalité d'attaquant de puissance.

« Je suis un joueur de hockey. Je ne suis pas un “Québécois” repêché à Montréal. Je vais gagner la bataille, que ce soit contre un Suédois ou n’importe qui. »

Ce que Carbonneau ne dit pas clairement, tout le monde le comprend. Il veut prendre la place de Cole Caulfield. Il se voit déjà là, dans le vestiaire du Centre Bell, collé à Suzuki et Slaf, pendant que Caulfield regarde la première vague du banc.

Carbonneau n’a pas peur d’un duel, ni sur la glace, ni dans la perception publique. Il envoie même un message subliminal à la direction : s’ils veulent un ailier frêle de 5’8 qui évite les coins de patinoire, ils ont déjà leur homme. Mais s’ils veulent quelqu’un qui bloque un tir avec ses dents, qui flaire le sang comme un requin, qui brise les défenses avec son corps, alors il faut miser sur lui.

Et justement, c’est comme ça qu’il s’est décrit à TVA Sports dans son entrevue avec Nicolas Cloutier :

« J’étais le requin. Je me suis fait niaiser par mes chums. J’attaque comme un requin. Je flaire le sang comme un requin. »

Pas de faux-semblants. Il assume son rôle de prédateur. Il sait qu’il fait peur. Il aime ça. Et il veut que les autres le sachent. Parce que pour lui, le hockey, c’est la guerre. Et il ne recule jamais.

Même dans les tests cognitifs bizarres du Combine, comme celui où il faut remettre des chiffres de 1 à 100 en ordre, il pensait avoir échoué… mais il a eu le meilleur score. Et ça résume bien Carbonneau : même quand il doute, il domine.

Trop? Peut-être. Mais toujours vrai.

Ses détracteurs parlent de lui comme d’un joueur « difficile à gérer », trop émotif, trop impulsif. Il le sait. Et il ne nie rien.

« J’ai beaucoup de fire, ça brûle en dedans de moi. Je veux toujours gagner. Faut que j’apprenne à le canaliser. »

Il l’avoue : quand ça ne va pas bien, ça se voit sur son visage. Quand son équipe perd, il bouillonne. Et s’il doit bloquer un lancer avec ses dents, il le fera. Parce qu’il a horreur de perdre. Parce qu’il veut être le meilleur. Parce qu’il veut prouver à tous ceux qui doutent de lui qu’ils se trompent.

Dans sa tête, il se compare à Adrian Kempe et Travis Konecny. Deux ailiers explosifs, robustes, au style “in your face”, capables de produire offensivement tout en dérangeant l’adversaire. Des gars qu’on aime avoir de son côté, mais qu’on déteste affronter.

Et il croit dur comme fer qu’il peut atteindre ce niveau.

« Je pense que je suis un bon joueur. Et si je continue à me développer, je vais être un maudit bon joueur. »

Et si le CH n’en voulait pas?

Qu’importe. Carbonneau ne supplie personne. Il a rencontré l’organisation. Il a été honnête. Il a regardé Martin Lapointe et Nick Bobrov droit dans les yeux. Il a dit ce qu’il avait à dire.

« Peu importe qui me repêche, cette équipe-là va faire le meilleur choix. »

Est-ce que le CH a été intimidé par son aplomb? Peut-être. Est-ce qu’ils ont aimé sa confiance? On ne sait pas. Mais une chose est sûre : ils n’ont pas pu l’ignorer.

Et c’est ça, Justin Carbonneau. Un joueur qui divise. Un joueur qui dérange. Un joueur “cocky”, mais pas creux. Il connaît ses forces. Il travaille ses faiblesses. Et il n’a pas besoin de l’approbation des autres pour exister.

Le verdict?

Le Canadien va-t-il oser? Va-t-il repêcher le premier Québécois en première ronde depuis Louis Leblanc en 2009, mais cette fois avec du venin dans les veines et le feu dans les yeux?

Ce serait un pari risqué. Un pari polarisant.

Mais si l’organisation décide de passer son tour, qu’elle le fasse en pleine conscience : Justin Carbonneau, le requin, est prêt à mordre. Et s’il débarque ailleurs dans la LNH… il viendra leur rappeler, à chaque visite au Centre Bell, ce qu’ils ont manqué.