Le message est clair, brutal et sans pitié : Mathew Barzal, Bo Horvat et Noah Dobson ne bougeront pas. Mathieu Darche n’a même pas eu besoin d’enfiler son veston de directeur général qu’il était déjà en train de tracer une ligne rouge. Et cette ligne, elle coupe net les espoirs du Canadien de Montréal.
Derrière la nomination officielle de Darche comme vice-président exécutif et directeur général des Islanders de New York se cache un plan précis.
Un plan qu’il a réussi à vendre aux propriétaires avec l’aisance d’un stratège politique. Pas de reconstruction. Pas de liquidation. Pas de révolution. Une transition, oui, mais sous forme de "reset sur le fly".
Une restructuration dynamique inspirée du modèle floridien. Et surtout, surtout, un refus catégorique de toucher au noyau.
Ce n’est pas rien. Quand on sait que le Canadien a les yeux rivés sur Dobson depuis plus d’un an. Quand on sait que Kent Hughes rêvait de recréer un duo Barzal-Caufield. Quand on sait que Bo Horvat avait été envisagé comme le grand centre manquant du CH... Darche vient de tout balayer d’un revers de main.
C'est que le nouveau DG des Islanders a su faire vibrer la corde sensible des propriétaires. Là où Marc Bergevin, également en lice, aurait sans doute proposé un virage plus classique, voire une reconstruction partielle lui qui regrettera toute sa vie de ne pas avoir reconstruit à Montréal, Darche a pris la tangente inverse.
Selon les informations de Renaud Lavoie, c'est en affirmant haut et fort qu'il n'était pas question de démolir l'équipe qu'il a convaincu John Collins et les actionnaires new-yorkais.
Collins l’a répété publiquement :
« Le but est d’être performants dès l’année prochaine. » Pas dans trois ans. Pas avec des espoirs. Dès maintenant.
Et c’est là que le plan Darche prend toute sa force. Imitant les Panthers de la Floride, il compte miser sur des joueurs rejetés ou mal aimés ailleurs.
Des Sam Bennett en devenir. Des gars qui n’entrent plus dans les plans de leur équipe, mais qui, dans un nouveau contexte, pourraient redevenir des atouts majeurs. Des guerriers, pas des vedettes.
Et c'est là que la LNH retient son souffle. Parce qu'avec le tout premier choix au total du repêchage 2025, Darche a les clés de l'avenir. Il pourrait théoriquement tout faire exploser. Mais non. Il choisira un joyau, probablement Macklin Celebrini, pour ajouter au noyau, pas pour tout raser.
Et pour le Canadien? C'est la catastrophe. Barzal, Horvat, Dobson : trois rêves brisés. Trois joueurs que Kent Hughes ne pourra pas obtenir, ni par transaction, ni par offre hostile. Mathieu Darche vient de clore le dossier.
Ce n’est pas un hasard si Arber Xhekaj est toujours sur le marché. Ce n’est pas un hasard si Logan Mailloux commence à voir sa valeur grimper. Le CH voulait faire un coup déclat avec ses choix 16 et/ou 17 au repêchage. Envoyer un message fort. Mais le destin en a voulu autrement.
Et ce n'est pas fini.
Darche, élève du système BriseBois, croit fermement à l'analyse avancée. Aux stats. Aux modèles prédictifs. Or, Xhekaj, avec son style brouillon, ne cadre pas dans ce modèle. Logan Mailloux? Trop de risques hors glace. Kirby Dach? Intéressant, mais blessé. Peut-être. Mais pas au prix fort.
Et c’est là qu'on touche le véritable choc : Darche ne sera pas un allié pour Kent Hughes. Il sera un mur. Un mur logique, discipliné, structurant. Le genre de DG qui vous regarde dans les yeux et vous dit :
« Non. Il n’y a pas de fit. »
C'est un revirement dramatique pour le CH. Long Island était perçu comme une porte entrouverte. Une organisation qui allait peut-être vendre. Une formation vieillissante, prête à entrer dans un cycle de transition. Et voilà que cette porte se referme à double tour.
Et pour Darche, c’est un triomphe silencieux. Lui qui avait vu tant de portes se refermer, lui qui était finaliste ici, finaliste là, sans jamais décrocher le poste... il a enfin son équipe. Et il la dirigera à sa manière.
Avec une main de fer.
Et qu’en est-il de Patrick Roy?
Officiellement, il demeure en poste. Officieusement, on sait que Darche va vouloir évaluer l’ensemble du personnel.
Mais plusieurs indices laissent croire que Roy restera. Parce que Darche, en stratège, comprend qu’on ne détruit pas une identité. On l’ajuste. Et surtout parce que Darche sait que Roy est un symbole. Le tasser serait risqué. Le garder pourrait être génial... ou explosif.
Darche et Roy. Deux têites fortes. L'un cérébral, l'autre émotif. Deux caractères affirmés. Deux visions opposés. Cela pourrait exploser. Mais cela pourrait aussi donner naissance à un tandem inédit, à une combinaison rare de passion et d'intelligence.
Surtout si Darche joue le rôle d’amortisseur. Le cerveau froid qui encadre le coeur brûlant. Le stratège qui canalise l’impulsif. Certains dans l’organisation y croient.
Et pendant ce temps, au Centre Bell, Kent Hughes regarde la conférence de presse de Darche. Il sait. Il comprend. Les Canadiens devront se tourner vers un autre partenaire. Car Long Island est fermée pour ses deux premiers centres et son défenseur droitier numéro un.
Et dans ce monde impitoyable de la LNH, c’est souvent dans les silences que les messages sont les plus bruyants. Mathieu Darche vient d’en envoyer un dévastateur :
« Le futur se construit ici. Pas à Montréal. Et surtout, pas avec vous. »