Tristesse dans la famille de Lance et compte: un deuil national

Tristesse dans la famille de Lance et compte: un deuil national

Par David Garel le 2025-09-03

Il y a des entrevues qui marquent à jamais.

Ce fut le cas dans nos studios de Hockey30 lorsque Réjean Tremblay, l’homme derrière Lance et compte, est venu se confier.

Ce qu’il a livré était un cri du cœur. Un témoignage d’une tristesse infinie:

Il y a des blessures qui dépassent les contrats, les tribunaux et les querelles d’ego. Aujourd’hui, c’est toute la grande famille de Lance et compte qui est ébranlée.

Derrière les sourires d’antan et les souvenirs partagés par des millions de Québécois, une profonde tristesse s’est installée. Ceux qui ont donné vie à cette série culte vivent un déchirement qui ne devrait jamais exister.

Une vérité que Réjean Tremblay tenait à dévoiler, parce qu’il ne peut plus supporter de voir Lance et compte, cette œuvre qui appartient au peuple québécois, être prise en otage par un conflit personnel et sans issue.

Dès qu'il aborde le sujet, Réjean Tremblay a coupé court à toutes les insinuations. Non, il ne se bat pas pour des redevances. Non, il ne cherche pas à encaisser un chèque. Ses mots étaient clairs, tranchants, douloureux :

Il s'en fout de l’argent. Il ne veut rien. Pas une cenne. Tout ce qu'il veut, c’est qu’on redonne Lance et compte au peuple. 

Voilà la vérité, cinglante et indiscutable. Pour lui, Lance et compte n’est pas un produit. Ce n’est pas une marque à monnayer ou à verrouiller dans un coffre-fort juridique. C’est une partie de notre histoire culturelle, un héritage collectif.

Et voir ce legs sacrifié au nom d’un conflit personnel avec la productrice Caroline Héroux lui brise le cœur.

Caroline Héroux refuse de donner le feu vert au spectacle musical imaginé par Jean-François Blais. Elle prétend détenir les droits de la marque, hérités de son père, Claude Héroux, producteur d’origine de la série.

Mais pour Réjean Tremblay, l’entente signée il y a plus de 40 ans est claire : il possède les droits pour un roman, une pièce de théâtre et une comédie musicale.

Alors pourquoi ce blocage ? Pourquoi cette fermeture obstinée ? Pourquoi Caroline Héroux affirme qu'elle ne veut plus travailler avec Réjean Tremblay?

Ce dernier dévoile la VRAI vérité dans l'extrait vidéo suivant:

Selon Tremblay, tout remonte à 2023, lors de l’élection partielle dans Jean-Talon. Le Parti Québécois lui avait demandé la permission d’utiliser le générique de Lance et compte dans une publicité.

Tremblay avait accepté, croyant agir en toute légitimité. Mais Caroline Héroux a aussitôt envoyé ses avocats, envoyant une mise en demeure au PQ et à Tremblay lui-même.

Derrière cette réaction disproportionnée, il y avait autre chose. Une question idéologique, politique. Comme l’a confié Tremblay, Caroline Héroux est une fédéraliste convaincue. Elle n’a jamais accepté que Lance et compte puisse être associé, même de loin, à une cause souverainiste.

Voilà l’origine véritable de cette fracture. Une guerre qui n’a rien à voir avec l’art, ni avec l’héritage culturel, mais tout à voir avec l’ego et les convictions politiques personnelles.

Mais ce qui frappe le plus dans ce témoignage, ce n’est pas la colère de Tremblay. C’est sa peine. Une peine évidente, qui l’a habité tout au long de l’entrevue quand il parle de son bébé artistique.

Il n’a cessé de penser à ceux qui, comme lui, portent Lance et compte dans leurs tripes.

Il a mal pour Carl Marotte (Pierre Lambert). Il a mal pour Marina Orsini. Il a mal pour Marc Messier. Toute la famille de Lance et compte est en deuil à cause de ce conflit. 

Ces mots pèsent lourd. Parce que Lance et compte n’est pas seulement une série. C’est une famille, tissée au fil des ans, devant et derrière la caméra.

Des comédiens, des techniciens, des scénaristes, qui ont bâti ensemble une œuvre plus grande qu’eux. Aujourd’hui, cette famille est brisée. Elle assiste impuissante à une querelle qui l’empêche de célébrer dignement le 40e anniversaire de la série.

Et au-delà des artisans, ce sont les Québécois qui sont les véritables victimes. Car Lance et compte appartient au peuple.

Des générations entières ont vibré aux exploits de Pierre Lambert et suivi les aventures sur la glace comme si elles faisaient partie de leur propre vie.

Privés d’un documentaire. Privés d’un spectacle musical d’envergure, mêlant théâtre, musique et cirque. Privés d’un hommage digne de ce nom. Tout ça, pourquoi ? Parce qu’une productrice s’accroche à un ressentiment politique et à une lecture restrictive des droits.

C’est une honte publique.

Réjean Tremblay n’a pas manqué de rappeler un détail lourd de sens. Le père de Caroline, Claude Héroux, fut le véritable premier producteur de Lance et compte. C’est lui qui avait eu la vision, le courage et la passion de faire confiance à Tremblay.

Aujourd’hui, cet homme, octogénaire, doit regarder sa fille utiliser les droits qu’il lui a transmis… non pas pour honorer l’œuvre, mais pour l’enterrer vivante.

On imagine le poids de la tristesse dans son cœur. Lui qui, dans sa jeunesse, croyait offrir un cadeau au peuple québécois, voit aujourd’hui cet héritage piétiné par une querelle personnelle.

Au fil de l’entrevue, un constat s’impose : Tremblay n’a plus rien à cacher. Sa vérité est claire. Il ne veut pas d’argent. Il ne veut pas d’honneur personnel. Tout ce qu’il veut, c’est que Lance et compte revive une dernière fois pour ses 40 ans.

Ses mots étaient empreints d’une lucidité désarmante :

« Lance et compte n’est pas à moi. Ce n’est pas à elle non plus. C’est au peuple. Et priver le peuple de ça, c’est une erreur monumentale. »

Comment ne pas entendre, derrière ces paroles, la voix d’un homme qui a tout donné à la culture québécoise et qui, aujourd’hui, se sent trahi ?

Ce conflit laisse un goût amer. Il témoigne de la petitesse humaine face à la grandeur d’une œuvre. D’un côté, un auteur qui ne demande rien d’autre que de partager son héritage avec le public.

De l’autre, une productrice qui verrouille ce même héritage derrière des murs juridiques et idéologiques.

Et au milieu, une famille artistique meurtrie, et un peuple privé d’un moment qui aurait pu être historique.

Quelle tristesse...