Tristesse dans le vestiaire: le DG des Blues critiqué pour avoir sacrifié Zachary Bolduc

Tristesse dans le vestiaire: le DG des Blues critiqué pour avoir sacrifié Zachary Bolduc

Par David Garel le 2025-07-07

Ça chauffe à St-Louis.

On sent une fracture...identitaire...

D’un côté, Logan Mailloux qui arrive à Saint-Louis avec une confiance provocante, le torse gonflé, convaincu d’être un défenseur supérieur à Evan Bouchard.

De l’autre, Mathieu Joseph, la voix brisée au tournoi de golf de Jonathan Huberdeau, qui peine à digérer la perte d’un frère de vestiaire : Zachary Bolduc.

Et c’est tout le paradoxe des Blues de Saint-Louis en ce début d’été 2025. L’organisation a eu du culot en échangeant Bolduc pour Mailloux. Mais en agissant ainsi, elle a peut-être brisé quelque chose de plus subtil : le cœur de son vestiaire.

Tout commence avec cette phrase, balancée par Logan Mailloux avec une aisance désarmante :

« Pour être franc, je ne vois pas vraiment de similarités entre moi et Bouchard. »

Le ton est sec. Le message est clair. Mailloux respecte le tir de Bouchard, sa manière de manœuvrer la ligne bleue, sa première passe… mais il rejette toute comparaison.

Il ne veut pas qu’on pense qu’il est ce type de défenseur, ce profil qu’on admire à distance, mais qu’on évite d’avoir dans son territoire défensif en désavantage numérique.

Et il pousse le bouchon encore plus loin :

« J’ai toujours préféré me comparer à Alex Pietrangelo, ou même à John Carlson. J’aime jouer avec du mordant, avec de la hargne. Je pense que c’est important. »

Il aurait pu s’arrêter là. Mais non. Il insiste. Il est sans pitié. Il veut que Saint-Louis sache qu’il n’est pas ici pour distribuer des passes savantes. Il est ici pour imposer, frapper, dominer.

Et ce rejet de la comparaison avec Evan Bouchard n’est pas anodin. On parle ici de l’un des défenseurs les plus productifs offensivement de la LNH. Un quart-arrière naturel, un joueur élégant, essentiel aux succès des Oilers. Mailloux aurait pu s’en inspirer. Il préfère s’en dissocier.

Logan Mailloux ne veut pas être vu comme un joueur unidimensionnel. Il ne veut pas qu’on pense qu’il est bon uniquement en avantage numérique, qu’il est vulnérable en défensive, qu’il se cache dans les coins.

Il refuse d’être étiqueté. Il refuse d’être soft. Et pour dire ça, pour balayer du revers de la main le nom d’Evan Bouchard, ça prend une chose : du courage, et une sacrée dose d’arrogance. Et c’est exactement ce que les Blues semblent aimer chez lui.

Jim Montgomery, le nouvel entraîneur des Blues, en a fait son projet. Le DG Doug Armstrong, qui a toujours préféré les joueurs avec du snarl, voit en Mailloux une pièce à long terme. Tout le monde semble prêt à lui faire de la place. Sauf, peut-être, le vestiaire lui-même.

Car pendant que Mailloux se compare à Pietrangelo et Carlson, pendant qu’il rejette Evan Bouchard comme on rejette un moins que rien, Mathieu Joseph, lui, baisse les yeux.

Invité au tournoi de golf de Jonathan Huberdeau, il n’a pas pu cacher sa déception quand on lui a demandé de commenter la transaction qui a envoyé Zachary Bolduc à Montréal.

« Honnêtement, c’est un jeune joueur. Il a encore beaucoup à apprendre en termes de sa game, mais ça va être tout un joueur de hockey. Je pense qu’on l’a vu cette année, comment il s’est développé à partir du début de la saison jusqu’à la fin. »

« J’ai ben de la misère à croire qu’on s’est débarrassé d’un potentiel comme ça… mais bon, regarde, c’est le business, hein. C’est ça la game. »

Joseph parle lentement. Il choisit ses mots avec prudence, mais l’émotion est évidente. Il tente de protéger son DG. Il comprend que les décisions se prennent parfois selon des besoins urgents. Mais rien n’y fait. Le malaise est là.

« C’est un bon kid, honnêtement. Il travaille fort, il aime vraiment le hockey. C’est un pur marqueur. Il a tellement un bon tir. »

Et puis il ajoute, la voix plus grave :

« Quand je suis arrivé dans la LNH, j’avais un peu un mentor comme ça : Yanni Gourde. Mon frère et moi, on a un peu pris Zachary sous notre aile. C’était un enfant vraiment facile d’accès.

On a ri, on était sur la route, on a eu des dîners ensemble. On a passé beaucoup de temps ensemble l’an dernier. Ça m’a fait un petit coup qu’il parte, évidemment. »

Un coup dur pour le cœur de l’équipe.

Ce petit coup dont parle Mathieu Joseph, il n’est pas anodin. Il ne parle pas d’un simple collègue échangé. Il parle d’un joueur qu’il a vu grandir, mûrir, apprendre. Il parle d’un gamin qu’il a mentoré, qui a passé des soupers entiers à le questionner, à l’observer.

Et quand Joseph parle de son tir, il n’hésite pas à le qualifier de tir élite.

« Oui, élite, honnêtement. Il peut marquer de n’importe où. Un bon relâchement, mais c’est surtout sa façon de se positionner sur la glace qui le rend dangereux. Il peut décocher dans les moments importants. C’est puissant, mais aussi très précis. »

C’est là qu’on comprend : Zachary Bolduc n’était pas juste un joueur. C’était un espoir aimé, respecté, protégé. Et on l’a échangé. Pour un défenseur qui débarque en se prenant déjà pour un futur capitaine.

Il est encore trop tôt pour dire si la présence de Mailloux va créer des tensions internes. Mais déjà, le contraste entre son arrogance assumée et la peine sincère de Joseph est frappant.

Dans un vestiaire, tout passe par l’équilibre des personnalités. Or, en un seul geste, Doug Armstrong a peut-être déséquilibré son noyau. Il a retiré un gars respecté, et il a ajouté une personnalité… plus controversée.

Et Mailloux n’a pas l’intention de s’excuser. Il sait que tout le monde l’attend. Il sait qu’il est sur la sellette. Et pourtant, il fonce. Il l’a dit : il veut jouer. Il veut frapper. Il veut faire des erreurs, oui, mais il veut surtout qu’on le laisse libre. Libre d’imposer sa loi.

C’est un été de fracture à Saint-Louis.

Fracture entre le style et le cœur.

Fracture entre l’ancien noyau, poli, solidaire soudé, et la nouvelle vague... brutale, baveuse, bruyante.

Logan Mailloux ne veut pas être comparé à Evan Bouchard. Il veut qu’on le voie comme un futur Pietrangelo, un futur Carlson, avec de la rage dans le sang. Il ne veut pas d’étiquettes. Il veut la glace, les minutes, la guerre.

Pendant ce temps, Mathieu Joseph rumine. Il encaisse. Il encaisse la perte de Bolduc. Il se fait discret, mais son visage dit tout. Il parle avec tristesse d’un frère d’armes, et on comprend que le vestiaire, lui, ne s’est pas encore remis.

Et c’est là toute la beauté et toute la violence de la Ligue nationale : ce qui excite les dirigeants peut parfois déchirer un vestiaire.

À Saint-Louis, on a choisi Logan Mailloux.

Mais on a peut-être perdu bien plus que Zachary Bolduc.