Vol à New York: Patrick Roy doit rendre les armes

Vol à New York: Patrick Roy doit rendre les armes

Par Marc-André Dubois le 2025-08-17

C’est une scène que les partisans du Canadien de Montréal ne sont pas près d’oublier.

Une séquence d’entraînement qui a littéralement mis le feu à TikTok. La vidéo montre Cole Eiserman seul sur la glace, en train de décocher une série de tirs d’une précision hallucinante.

L’objectif? Viser les quatre coins du filet… mais aussi les deux poteaux, la barre transversale, et même les fameuses « tiges » métalliques à l’intérieur du but.

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Résultat? Une performance irréelle. Eiserman touche chaque cible avec une facilité déconcertante, comme s’il jouait à un jeu vidéo en mode "cheat code".

Et les fans, eux, sont restés bouche bée.

« Accuracy 100 », « on dirait que c’est truqué », « ce gars-là, c’est un robot », peut-on lire dans les commentaires. Plusieurs ralentis circulent, confirmant que ce n’est ni un montage, ni une illusion. Tout est vrai. Chaque tir. Chaque impact. Chaque bruit métallique parfaitement contrôlé.

Et ce n’est pas que de la force brute : il y a une élégance, un relâchement technique, une science du tir qui rappelle les meilleurs moments d’Auston Matthews.

Pour les partisans du Canadien, c'est un petit haut le coeur. Eiserman a été volé une minute trop tôt. Et aujourd’hui, c’est le chandail des Islanders qu’il fera vibrer, à moins que Patrick Roy ne décide de le débrancher avant même qu’il ne touche la glace.

Le 28 juin 2024, lors du repêchage de la LNH à Las Vegas, le Tricolore s’avance au 21e rang pour annoncer sa sélection.

À ce moment-là, toute la planète hockey a les yeux rivés sur un nom : Cole Eiserman. Le buteur prodige vient de glisser jusqu’au 20e rang.

Tout le monde sait que le Canadien, en manque flagrant de marqueurs naturels, ne peut laisser passer une occasion pareille et le sélectionner au 21e rang.

Mais non. Les Islanders lui volent un rang avant... sous son nez.

Kent Hughes s’avance ensuite au micro et annonce calmement : « Michael Hage. »

Et même si Hughes répète depuis que Hage était en haut de sa liste, personne n’y croit. Tout indique que le Canadien s’est fait couper l’herbe sous le pied. Pis encore : il s’est fait voler.

Ce qui rend le tout encore plus savoureux, ou cauchemardesque, selon l’angle, c’est l’étrangeté qui entoure le choix des Islanders.

Car au moment du repêchage, Patrick Roy est absent. Volontairement. Alors que tous les entraîneurs de la LNH, sont présents à Las Vegas, Roy choisit de rester à Québec, avec ses petits-enfants.

Un affront? Un désintérêt? Ou un désaveu tacite de ce qui allait être annoncé?

Tout porte à croire que Roy ne voulait rien savoir de Cole Eiserman. Trop arrogant. Trop individualiste. Pas assez « Patrick Roy » dans l’âme. Eiserman, c’est le genre de joueur qui vit pour marquer des buts, qui se fiche du jeu défensif, qui adore avoir la rondelle et dicter le tempo. Bref, le contraire du hockey de série que Roy prône.

Et pourtant… malgré tout cela, c’est bien lui que les Islanders ont sélectionné. Et aujourd’hui, quelques semaines plus tard, c’est lui qui fait tourner toutes les têtes.

Avec une vidéo TikTok qui change tout.

Une simple vidéo. Une séquence d’entraînement. Mais une démonstration brutale de talent pur. Cole Eiserman, dans ce qui semble être une aréna universitaire de Boston, décoche tirs après tirs, faisant vibrer chaque tige, chaque poteau, chaque millimètre du filet.

Le ralenti est humiliant pour n’importe quel gardien. Son tir est foudroyant. Sa précision chirurgicale. Et la vidéo devient virale.

En quelques heures, la planète hockey est en émoi. On parle de vol. On parle de scandale. On parle d’un génie offensifqui aurait dû sortir dans le top 5.

Et le nom du Canadien revient dans chaque conversation : comment ont-ils pu laisser passer ce joueur?

Kent Hughes, fidèle à son style placide, répète que Michael Hage était le choix prévu. Que Cole Eiserman ne figurait pas au sommet de leur liste. Qu’ils ont même songé à remonter dans le repêchage pour s’assurer de repêcher Hage. Une version qui a ses mérites… mais qui ne convainc personne.

Parce que dans les coulisses, tous savaient que le Tricolore avait un œil rivé sur Cole Eiserman depuis des mois. Le directeur du recrutement amateur Martin Lapointe avait même vanté « son sens du but unique dans cette cuvée ».

Et Nick Bobrov, l’architecte discret derrière plusieurs choix récents, aurait poussé pour lui jusqu’au dernier instant.

Mais les Islanders ont été plus chanceux. Mais aussi audacieux.

Car il faut le dire : Cole Eiserman n’est pas un choix consensuel. Ce joueur originaire de la région de Boston, qui a battu les records de Cole Caufield au programme de développement américain, traîne une réputation sulfureuse.

Trop sûr de lui. Trop centré sur l’attaque. Défensivement suspect. Parfois même considéré comme difficile à coacher.

Et pourtant, personne ne remet en doute son talent brut. Même ses détracteurs les plus farouches le reconnaissent : ce "kid" sait marquer.

« Marquer des buts, c’est quelque chose que j’apprécie depuis le début de ma vie », a-t-il dit le soir du repêchage.

« Je sais que tromper les gardiens est un attribut naturel chez moi, mais je n’ai jamais cessé de travailler là-dessus. »

Et lorsqu’on lui parle de ses détracteurs, il réplique sans trembler :

« Je continue à foncer tête baissée sans penser à ce que les gens peuvent dire. Je ne vais pas changer pour personne. »

Un message fort. Et peut-être dangereux. Car maintenant, il appartient à Patrick Roy.

Personne n’imagine Roy s’émerveiller devant une vidéo TikTok. Pour lui, le hockey, c’est le travail défensif, l’humilité, la constance, le respect du système.

Et là, on lui livre sur un plateau d’argent un marqueur flamboyant qui adore le spectacle, qui se fiche du reste, et qui répète qu’il « ne changera pas ».

Il y a collision à l’horizon.

Déjà, plusieurs rumeurs circulent selon lesquelles Roy n’aurait même pas été consulté pour cette sélection. Que Lou Lamoriello et son équipe de recrutement auraient agi sans son aval lors du repêchage 2024. Que Roy était tellement frustré que le conflit avec son ancien DG explosa.

Pour l’instant, Eiserman n’a même pas signé son contrat d’entrée dans la LNH. Il retournera à Boston University pour une autre saison.

Officiellement, pour « continuer son développement ». Officieusement? Peut-être aussi parce qu’il n’est pas pressé de se frotter à Roy.

Pendant ce temps, à Montréal, on s'exciste avec Michael Hage. Et il faut le dire : Hage est un excellent choix. Un centre droitier, bon dans les deux sens de la patinoire, capable de pivoter un trio offensif. Un futur centre #2 solide.

Mais personne ne le compare à Eiserman sur le plan offensif. Personne ne le voit marquer 40 buts dans la LNH.

Et quand on voit la vidéo TikTok d’Eiserman, quand on constate l’explosion virale de son nom, quand on lit les recruteurs dire qu’il sera « le Cole Caufield 2.0, mais en plus costaud », difficile de ne pas ressentir une pointe de regret.

Le CH a joué la carte de la prudence. Encore. Et il pourrait le regretter pour les dix prochaines années.

Dans ses déclarations récentes, Eiserman ne manque pas de lancer des flèches.

« J’aime avoir la rondelle, c’est vrai. Mais je pense que mes coéquipiers me font confiance. Je n’arrêterai pas de demander la rondelle ni de la contrôler. J’aime être celui qui dicte le rythme d’un match. Je ne vais pas me dénaturer. »

Des mots qui sonnent comme un avertissement pour Patrick Roy. Et comme un doigt d’honneur à tous ceux qui l’ont boudé au repêchage. Il veut prouver que sa glissade jusqu’au 20e rang est une erreur monumentale. Il veut faire payer les 19 équipes qui ont passé leur tour.

Ce qui rend le cas Eiserman fascinant, c’est que son arrogance n’est pas feinte. Il la revendique. Il en fait un carburant. Une arme.

« Ton rang de sélection n’a pas vraiment d’importance. Je me concentre sur le concret. Quand tu montes sur la scène après avoir entendu ton nom, ça c’est du vrai », a-t-il lancé froidement après le repêchage.

Et lorsqu’on lui parle de son manque d’humilité, il rit. Littéralement.

« Je pense que les gens ne voient juste pas les matchs comme moi. Je vois le hockey d’une autre façon. »

Il a réponse à tout. Et un talent suffisant pour que ses mots prennent du poids.

Les Islanders de New York ont peut-être de réaliser le plus gros vol du repêchage 2024. Ou peut-être ont-ils mis la main sur une bombe à retardement.

Tout dépendra de l’homme qui devra le coacher : Patrick Roy.

Roy a déjà prouvé qu’il pouvait transformer des joueurs rebelles en soldats disciplinés. Mais Eiserman est une autre paire de manches. Il ne demande pas de l’aide. Il exige qu’on le laisse être lui-même.

S’il y parvient, s’il s’intègre dans la structure des Islanders sans perdre son flair offensif, il deviendra une arme fatale... si Patrick accepte de rendre les armes... et d'accepter l'identité de son prodige...

Mais s’il entre en collision avec Roy, si l’ego prend le dessus, on pourrait assister à une saga digne d’un roman à la Réjean Tremblay.

Et pendant ce temps, à Montréal…

Si Cole Eiserman explose, et que Michael Hage ne devient « que » correct, on reviendra longtemps sur cette soirée de juin à Las Vegas..

Après tout, le CH allait sélectionner Eiserman avant de se le faire voler un rang avant. Même si Kent Hughes continue d'affirmer le contraire.

Cole Eiserman n’a pas encore chaussé un patin dans la LNH, mais déjà, il hante les corridors du Centre Bell.

Et le pire? Ce n’est peut-être que le début.