Le Québec retient son souffle: Arber Xhekaj s'en prend à Kirby Dach

Le Québec retient son souffle: Arber Xhekaj s'en prend à Kirby Dach

Par Nicolas Pérusse le 2025-09-20

À Brossard, ce matin, le camp d’entraînement du Canadien a basculé dans le drame.

Un simple contact, une mise en échec de routine, a suffi pour rappeler à tous la fragilité de Kirby Dach… et pour éclipser, malgré lui, une autre belle performance d'Arber Xhekaj.

Eric Engels n’avait pourtant pas hésité à chanter ses louanges quelques minutes plus tôt. « Comme lors du premier match intra-équipe, Arber Xhekaj se démarque vraiment dans son deuxième. Il patine plus vite qu’on ne l’a jamais vu à ce niveau, ou peut-être que c’est seulement parce qu’il bouge avec tellement de confiance et de conviction. Il semble tout faire plus rapidement. »

C’était la reconnaissance tant attendue. Une preuve que Xhekaj, critiqué, menacé, remis en question, réussissait à transformer son rôle de shérif en une présence fiable, énergique et indispensable.

Mais la mise en échec sur Dach a tout changé.

Ce n’était pas un coup salaud, pas une charge vicieuse. Juste une collision dans le feu d’un scrimmage. Sauf que Dach, lui, a réagi comme un joueur qui revient de l’enfer.

Le genou encore dans toutes les têtes, chaque contact semble un risque. Et quand il s’est assis au banc, tête basse, porte claquée derrière lui, son visage disait tout : il n’avait pas aimé. Pas du tout.

On aurait dit qu’un fantôme venait de le frapper. Celui de ses blessures passées. Celui de la fragilité qui colle à sa peau depuis son arrivée à Montréal.

Martin St-Louis, fidèle à lui-même, a tenté de calmer la tempête. Il a parlé de progression normale, d’une gestion de charge nécessaire. Il a répété que Dach aurait ses occasions, qu’il fallait simplement le ménager.

Mais personne dans l’aréna n’est dupe. Les images parle plus fort que les mots. Dach n’est pas prêt à encaisser. Et dans une Ligue nationale où personne n’offre de cadeaux, cette réalité fait froid dans le dos.

Parce qu’il faut se le dire : si Dach ne peut pas supporter une mise en échec en scrimmage, comment pourra-t-il survivre à une saison entière où les défenseurs adverses attendent chaque occasion de tester sa solidité? À New York, à Boston, à Tampa, personne ne ralentira pour lui.

Et c’est là que le contraste devient cruel.

D’un côté, on a Xhekaj, autrefois pointé du doigt pour ses excès, qui démontre enfin qu’il peut canaliser sa robustesse, jouer vite, jouer juste. Il avait besoin de ce camp pour sauver sa place, et jusqu’ici, il réussit.

De l’autre, on a Dach, censé être le deuxième centre tant recherché, qui montre chaque jour un corps hésitant, un mental ébranlé.

Le vestiaire le sent. Les vétérans détournent parfois le regard. Les jeunes, eux, observent avec inquiétude. Laine, assis plus loin au banc, s’est même penché vers ses coéquipiers pour souffler quelques mots, probablement pour calmer le jeu, rappeler qu’il faut protéger les joueurs vulnérables.

Mais la vérité, c’est que ce genre de scène nourrit un malaise collectif.

Le Canadien veut encore croire. On le répète dans chaque conférence : « Dach sera prêt », « il faut lui donner du temps ». Mais le temps est un luxe que la saison n’accorde pas.

La chimie entre Demidov et Laine explose déjà. Suzuki porte l’équipe comme un capitaine mûr avant l’âge. Caufield enfile les buts comme un métronome. Le reste de l’alignement avance. Dach, lui, reste prisonnier de son corps.

Et paradoxalement, c’est Xhekaj qui incarne l’espoir. L’ironie est cruelle : le joueur qu’on voyait comme une monnaie d’échange potentielle, une pièce de trop dans une défensive congestionnée, devient soudainement le symbole d’un vestiaire qui refuse de plier. Engels l’a vu, il l’a écrit : Xhekaj patine plus vite, joue plus intelligemment, agit avec assurance.

Sauf que son meilleur match, il l’a gâché sans le vouloir. Parce que dans l’ombre de sa mise en échec, il y a Dach au banc, tête basse, souffle court. L’image restera.

Et c’est ça, la beauté tragique de ce camp d’entraînement. Deux trajectoires se croisent, deux carrières s’entrechoquent. Un shérif en quête de reconnaissance et un centre en quête de survie. Un joueur qui se redéfinit et un autre qui s’accroche à l’espoir.

Martin St-Louis le sait. Ce n’est pas qu’une question de système, ni de profondeur. C’est une question de destin. S’il veut relancer Dach, il devra trouver l’équilibre impossible entre le protéger et le tester. Parce que la vraie vie, c’est la LNH. Et personne là-bas ne ménagera Kirby Dach.

Le verdict du jour est brutal. Xhekaj vole, Dach vacille. Le shérif avance, le centre recule.

À Brossard, ce matin, un simple contact a résumé toute la saison à venir. Si Dach n’arrive pas à transformer sa fragilité en force, s’il ne peut pas absorber l’inévitable choc, alors son aventure à Montréal s’éteindra plus vite que prévu.

Et si Xhekaj continue de jouer avec cette intensité maîtrisée, alors peu importe les rumeurs, peu importe la congestion, il trouvera sa place. Parce qu’un défenseur capable d’inspirer la confiance et de forcer le respect n’est jamais inutile.

C’est tout le paradoxe : un camp d’entraînement ne donne pas de points au classement. Mais certains détails valent des victoires symboliques.

Et aujourd’hui, à Brossard, la victoire appartient au shérif… même si son triomphe rappelle à tout le monde la fragilité inquiétante du joueur censé sauver le deuxième trio.

La saison n’est pas commencée. Mais déjà, les dés semblent jetés.