Oliver Kapanen savait que chaque présence hier à Toronto allait peser lourd. Pas seulement pour convaincre Martin St-Louis, mais aussi pour convaincre… Boston.
Car les rumeurs ne mentent pas : son nom continue de circuler chez les Bruins, et ce, même après le refus du fameux package qui incluait Kapanen, Jayden Struble et Joshua Roy.
Hier soir, il a livré exactement le genre de performance qui entretient l’obsession des Bruins à son égard : une soirée complète, inspirée, et surtout impossible à ignorer.
Positionné entre Alex Newhook et Zachary Bolduc, Kapanen n’a pas marqué, mais il a été partout. Un tir au poteau, des replis exemplaires, un tir bloqué, des passes qui ont créé de l’élan offensif et une intensité soutenue dans les deux sens de la patinoire. Après la rencontre, le Finlandais a résumé son état d’esprit avec une lucidité désarmante :
« Je pense que c’était mon meilleur match jusqu’ici, tant en attaque qu’en défense. »
D'habitude silencieux, c'est la première fois que le Finlandais se lance des fleurs publiquement,
Et ce n’était pas une déclaration en l’air. Tous les observateurs ont vu le même joueur : un centre fiable, intelligent, qui se permet même d’être créatif quand le jeu l’exige. Martin St-Louis l’a souligné du bout des lèvres :
« Les jeunes progressent. C’est encourageant de savoir qu’on a des joueurs qui vont continuer de pousser pour faire leur place. »»
C’est là que le paradoxe devient brutal. Kapanen livre sa meilleure copie depuis le début du camp… au moment précis où son nom circule encore à Boston.
Les Bruins ont adoré son profil. Ils n’ont pas dit non parce qu’ils doutaient de Kapanen. Ils ont dit non parce qu’ils ne voulaient pas céder Pavel Zacha à leur ennemi juré.
Mais avec l’information confirmée par Frank Seravalli que Zacha pourrait être disponible avant l’Action de grâce américaine si la bonne offre tombe, la donne change. Boston continue d’épier Kapanen. Chaque match comme celui d’hier renforce son attrait.
Et les Bruins ne sont pas seuls. À Nashville, Barry Trotz raffole du profil d’Owen Beck… mais il sait que Kapanen pourrait aussi être une monnaie d’échange dans un éventuel deal pour Ryan O’Reilly, si les Preds s’écroulent au classement cet automne.
Le fait que les deux noms, Beck et Kapanen, soient cités ensemble dans les discussions avec Nashville prouve à quel point le Tricolore est prêt à sacrifier l’un de ses jeunes centres pour obtenir immédiatement un pivot établi.
Hier, Owen Beck a aussi bien paru. Une échappée, une complicité croissante avec Veleno et Blais, une présence active sur la glace.
"C’est toujours différent de jouer avec deux gars pour la première fois. Ça nous a pris quelques présences pour nous ajuster, mais plus le match progressait, mieux ça allait, et j’étais content de ça." a affirmé le jeune qui avoue être stressé par le camp qui devient de plus en plus compétitif pour demeurer à Montréal.
Mais il reste, dans l’esprit de plusieurs recruteurs, derrière Kapanen dans la hiérarchie. Martin St-Louis semble avoir une préférence claire : Kapanen s’intègre plus naturellement à ses trios, Beck doit encore prouver qu’il peut dominer physiquement.
Pourtant, les Bruins, eux, auraient préféré au départ Beck au lieu de Kapanen dans le fameux package. Une divergence de perception qui en dit long.
Parions que le match de Kapanen ont changé... leur perception...
À Montréal, St-Louis valorise Kapanen. À Boston, on hésite entre Beck et Kapanen pour être jumelé à Jayden Struble, mais il faudra plus que Joshua Roy l'indésirable.
À Nashville, on aime les deux profils.
Le Canadien se retrouve avec deux jeunes centres qui attirent les convoitises… mais qui pourraient ne jamais jouer ensemble longtemps sous le même chandail.
Il faut le répéter : Kapanen joue désormais pour le marché des transactions autant que pour Montréal. Chaque performance, comme celle d’hier, augmente sa valeur d’échange.
Le plus cruel, c’est qu’à l’interne, on semble déjà résigné. Le plan Hughes/Gorton est clair : conserver les intouchables et transformer les actifs périphériques en capital pour un deuxième centre de premier plan. C’est exactement ce que Zacha ou O’Reilly représentent.
Hier, Kapanen a prouvé qu’il avait le niveau pour remplacer Christian Dvorak dès maintenant. Il a montré qu’il pouvait pivoter un troisième trio solide, voire glisser sur un deuxième en cas de besoin. Mais à Montréal, cette progression sert moins à bâtir son avenir qu’à préparer sa sortie.
La vérité, c’est que le CH ne garde pas tout le monde. Struble, Roy, Kapanen, Beck : ce sont les noms qui circulent le plus.
Struble est bloqué par la congestion à gauche. Roy est déjà perçu comme un « throw-in » qui ne vaut rien. Beck, malgré son profil Danault 2.0, est sacrifiable. Et Kapanen, malgré ses efforts, est déjà dans les carnets de Boston et Nashville.
Hier, en souriant après son match, il a peut-être livré sa plus belle audition… pour un autre chandail.
Mais dans ce grand échiquier de rumeurs, un nom continue de planer comme une ombre majestueuse : Sidney Crosby.
Les Penguins ne se déplacent pas par hasard avec deux dépisteurs aux matchs du Canadien. Ils savent que le CH a de la marchandise, ils savent que Struble, Kapanen et peut-être même Beck peuvent composer un « package deal » capable de faire basculer l’histoire.
Le fait que Kapanen élève son jeu au moment même où Crosby entre dans la dernière ligne droite de sa carrière n’est pas un détail.
Montréal ne négocie pas seulement pour un Zacha ou un O’Reilly : il y a toujours, en arrière-plan, l’idée folle mais bien réelle d’un transfert de pouvoir.
Tant que Crosby ne sera pas fixé, chaque performance de Kapanen ou de Beck aura une résonance qui dépasse le simple camp d’entraînement.