Absence de Martin St-Louis: sa femme sort de l'ombre

Absence de Martin St-Louis: sa femme sort de l'ombre

Par David Garel le 2025-09-25

On parle souvent de Martin St-Louis comme du sauveur de cette nouvelle génération du Canadien de Montréal. Du coach autodidacte, visionnaire, père de famille devenu mentor de gladiateurs.

Mais ce qu’on ne dit pas assez, ce qu’on oublie même systématiquement, c’est que si Martin St-Louis est là, debout derrière le banc du CH en cette saison 2025-2026 cruciale, c’est grâce à une femme qui n’a jamais voulu les projecteurs.

Son nom ? Heather Caragol.

Sa place dans l’organigramme ? Aucune.

Mais sa valeur pour l’organisation ? Inestimable.

La saison la plus importante de sa carrière.

2025-2026. C’est l’année où tout bascule. Le Canadien n’est plus un club en reconstruction. Kent Hughes a verrouillé Guhle, Hutson, Slafkovsky. Suzuki est à maturité. Cole Caufield est sobre, concentré. Dobson est arrivé. Demidov va gagner le Calder. Fowler frappe à la porte. Les excuses ne tiennent plus. Il faut gagner.

Et à la tête de cette mission périlleuse : Martin St-Louis.

L’homme qui habite seul à Montréal. Loin de sa famille.

L’homme qui a abandonné une vie paisible au Connecticut pour plonger dans le chaos quotidien du hockey montréalais.

Mais tout ça n’aurait jamais été possible… sans Heather.

Il est temps de parler de la promesse faite... et brisée...

Quand St-Louis a pris sa retraite en 2015, après 16 saisons de guerre dans la LNH, il a fait une promesse à sa femme.

« Je ne coacherai pas dans la LNH tant que nos enfants n’auront pas grandi. Je resterai à la maison. Je veux être un père. Je veux être un mari présent. »

Et il a tenu parole. Pendant 7 ans. Il a coaché les jeunes du coin à Mid-Fairfield. Il a conduit les gars à l’école, il a fait les lunchs, les devoirs, les pratiques. Il était là. Entier.

Mais en février 2022, le téléphone a sonné. Geoff Molson. Jeff Gorton. Kent Hughes.

Le Canadien.

L’opportunité d’une vie.

Le rêve.

Le piège.

Il est allé voir Heather.

Et il lui a dit :

« Je t’avais promis que je ne partirais que si c’était pour un poste d’entraîneur-chef dans la LNH… Mais c’est le Canadien. »

Et elle a répondu oui.

Le sacrifice invisible commençait.

Depuis ce jour, Heather Caragol élève, gère, soutient. Seule.

Elle est mère de trois garçons : Ryan, Lucas, Mason.

Chacun dans une équipe différente. Un à Brown University. L’autre à Harvard. Le dernier en U18 au Connecticut. Trois calendriers. Trois horaires de pratique. Trois réalités.

Quand on parle des sacrifices de Martin St-Louis, il faut aussi parler de ce qu’il rate. Et ce qu’il rate, c’est la jeunesse de Mason, son plus jeune fils, qui atteindra l’âge de 18 ans en 2027, et les années NCAA de ses plus vieux.

Il ne pourra pas se rattraper avec Mason.

L’année même où le Canadien, selon tous les plans établis par Kent Hughes et Jeff Gorton, doit frapper son apogée. L’année où Montréal doit enfin se battre pour une Coupe Stanley.

Mais pendant que Mason jouera peut-être ses premiers matchs NCAA ou même dans les rangs juniors canadiens, son père sera dans l’œil du cyclone montréalais, à gérer la pression, la critique, les attentes démesurées d’un marché assoiffé.

Le cœur partagé entre son rôle de coach et son rôle de père. Et dans cette équation, encore une fois, c’est Heather Caragol qui portera l’équilibre.

Qui sera là pour Mason. Pour le garder ancré, pendant que Martin tentera de conquérir une ville entière. Si le CH gagne en 2027, ce ne sera pas juste l’histoire d’une équipe. Ce sera aussi l’histoire d’un père qui a tout donné… et d’un fils qu’il n’a pas vu grandir autant qu’il l’aurait voulu.

Et Martin ? Il les appelle. Il les suit. Il les encourage. Mais il est à 500 km.

Dans son condo à Montréal. Seul.

Il le dit souvent en riant :

« Ma femme m’aide à être moins bête avec les journalistes. »

Mais c’est bien plus que ça.

Elle l’aide à tenir debout.

Elle le soutient dans la solitude.

Elle le rassure après les défaites.

Elle le console dans les remises en question.

Ils se sont rencontrés à l’Université du Vermont.

À l’époque, Martin n’était qu’un joueur sous-estimé. Un petit bonhomme qui espérait un jour se faire remarquer.

Elle a vu l’ambition. Elle a vu la passion. Elle a cru en lui. Avant tout le monde.

Et quand les experts disaient qu’il était trop petit, trop lent, pas assez talentueux…

Elle répétait ce que la mère de Martin disait aussi :

« Montre-leur, Marty. »

Et il leur a montré.

Quand la mère de Martin, France, est morte subitement en 2014 d’une crise cardiaque, en plein cœur des séries éliminatoires avec les Rangers de New York, c’est Heather qui a tenu la famille.

Elle a organisé, consolé, structuré. Pendant que Martin retournait sur la glace.

Parce qu’il le fallait. Parce que sa mère l’aurait voulu.

Elle n’a jamais pris la lumière.

Mais elle a absorbé toute l’ombre.

Une force tranquille, une mère de l’ombre

Aujourd’hui, alors que Martin mène ses troupes vers une saison décisive, Heather continue de tout gérer. Elle est l’architecte silencieuse de son équilibre.

Pas d’entrevue. Pas de réseaux sociaux. Pas de « WAG » sur Instagram.

Juste une femme. Une mère. Une partenaire. Une pilier.

Chaque victoire de Martin, chaque conférence de presse, chaque moment de lucidité tactique…

C’est elle aussi.

Elle lui permet de respirer.

Elle lui permet de performer.

Elle lui permet d’être Martin St-Louis, entraîneur-chef du Canadien de Montréal.

Le poids d’une solitude choisie

Il ne faut pas banaliser ce que représente cette vie à distance.

Martin vit chaque saison seul, dans un condo montréalais.

Il voit ses enfants par Zoom. Il suit leurs matchs sur YouTube.

Il célèbre leurs buts en différé.

Et quand les critiques fusent à RDS, que les débats explosent à TVA Sports, que les micros se tendent à Brossard…

Il n’a pas de bras dans lequel s’effondrer en rentrant le soir.

Il appelle Heather.

Elle l’écoute.

Et elle lui dit, comme toujours :

« Montre-leur, Marty. »

On dira que Martin St-Louis est l’âme du CH.

Mais Heather Caragol en est le cœur invisible.

Pas de bague.

Pas de médaille.

Pas de nomination.

Mais elle est celle qui rend tout ça possible.

Et dans une Ligue où on honore les bâtisseurs, les coachs, les joueurs, les directeurs généraux… il est temps de reconnaître l’existence de ces MVP de l’ombre.

Car si le Canadien gagne un jour la Coupe Stanley sous Martin St-Louis…

Ce sera aussi, profondément, la victoire d’une femme qui a tout donné sans jamais rien réclamer.

Heather Caragol, MVP du Canadien. Point final.