Acquisition d'un prodige: Kent Hughes surprend tout le monde

Acquisition d'un prodige: Kent Hughes surprend tout le monde

Par Nicolas Pérusse le 2025-09-02

Certains auraient voulu que Kent Hughes soit « all-in » comme des trophées.

Mais Kent Hughes et Jeff Gorton ont une obsession assumée pour un seul actif : le choix de première ronde 2026.

Protégé, non protégé, top 5, top 10, "top-whatever"?

Aux yeux de Kent Hughes et Jeff Gorton, la nuance importe de moins en moins. Le message est simple, presque brutal : ce billet de loterie-là ne sort pas de Montréal… à moins d’une offre déraisonnable.

Pourquoi une telle fixation qui surprend tout le monde? Parce que, et c’est là que l’analyse de Mathias Brunet résonne, la LNH n’est pas un escalier mécanique qui ne monte que vers le haut.

Le New Jersey l’a appris à la dure. Les Devils, flamboyants en 2022-2023 (3e au total, une série gagnée), ont mordu la poussière la saison suivante : 23e au classement, Jack Hughes et Dougie Hamilton blessés, une vague d’espoirs brillants mais encore "sans expérience" (Luke Hughes, Simon Nemec, Dawson Mercer, Alexander Holtz) qui n’a pas eu l’impact espéré.

Un an, une glissade. Résultat : encore un top 10 au repêchage 2024. Moralité? Les courbes de progression zigzaguent, même chez les clubs « arrivés ».

Et si ça peut arriver aux Devils, remplis de joueurs élite, ça peut arriver au Canadien, l’un des effectifs les plus jeunes du circuit.

C’est exactement le vertige que Brunet pointe : la marche 2025-2026 du CH peut monter, ou déraper, du jour au lendemain.

Suzuki (26 ans) resterait, selon les projections actuelles, l’un des rares attaquants de plus de 24 ans dans le top 6; la défense roulera massivement sur des 25 ans et moins (Hutson, Guhle, Reinbacher), et un gardien auxiliaire de 24 ans (Dobes) pousse derrière Montembeault.

Oui, l’organisation a ajouté du haut de gamme (Dobson, Demidov, Bolduc) et mise sur des retours en santé (Laine, Dach).

Mais dans une LNH où un mauvais mois d’octobre peut vous creuser un fossé de six points, s’en remettre au destin en hypothéquant un premier choix 2026, protégé ou pas, frôle l’imprudence.

Et maintenant, le cœur du dossier : pourquoi 2026 n’est pas « un » repêchage, mais « le » repêchage.

#1: Gavin McKenna, l’obsession qui change tout

On ne trouvera pas un tableau sérieux du repêchage 2026 sans McKenna au 1er rang. Ailier hyper-doué, natif de Whitehorse, passé par Medicine Hat où il a roulé sur la WHL comme un train, cap sur Penn State avec la perspective d’un titre de pointeur NCAA à 17 ans . Talent pur, vision, tempo, menace en transition comme en zone installée : on parle d’un profil que des recruteurs n’hésitent plus à glisser dans la conversation des « générationnels ».

Il est même fréquemment présenté comme le cousin de Connor Bedard, détail généalogique devenu synonyme d'une bombe: « le prochain grand » qui arrive avec une signature déjà mythique.

Certains murmurent, sans trembler, qu’il pourrait devenir… meilleur que McDavid. Exagération? Peut-être. Mais le simple fait que des voix compétentes osent l’hypothèse explique l'excitation de la ligue entière autour des 1ers choix 2026. Vous ne donnez pas ce billet-là à la légère.

Et si, malgré McKenna, vous croyez que « tout dépend du 1er », accrochez-vous : le top 5 2026 est un morceau d’anthologie.

#2: Keaton Verhoeff (DD, Université de North Dakota/NCAA)

Le « contre-champ » parfait à McKenna. Défenseur droitier de 6’4’’, 212 lb qui coche toutes les cases modernes : portée monstrueuse, mobilité fluide, tête froide. Sa saison recrue à Victoria (WHL) : 21 buts, 45 points. Dominant aux U-17 et U-18, un Hlinka d’été plus mitigé (classique en plein mois d’août), puis cap sur North Dakota, incubateur de défenseurs NHL-ready. Ce qui allume les scouts? Un combo taille-agilité rare qui lui confère un plafond de défenseur n°1 sans « mais » à rajouter. On l’entend déjà : « Verhoeff, c’est le package ». Et oui, certains le voient menacer le 1er rang si la saison NCAA vire au clinic. Quand on parle d’intouchables à Montréal (Reinbacher, Hage), c’est aussi parce qu’on sait quels profils défensifs attendent en 2026. Céder son 1er, c’est peut-être dire adieu à votre futur pilier droitier… pour 15 ans.

#3: Ivar Stenberg (AD, Frölunda/SHL)

Le cerveau du repêchage. Démarre 2025-26 par un tour du chapeau au World Junior Summer Showcase, 51 points en 29 matchs internationaux la saison précédente (dont 8 buts, 13 points au Mondial U-18), et déjà 25 matchs de SHL à son CV à 17 ans.

On parle d’un ailier qui « voit » une passe avant qu’elle n’existe, de mains de feu qui déshabillent les défenseurs en 1 contre 1.

Pas le plus spectaculaire au sens brut? Peut-être. Mais son anticipation et son exécution donnent l’impression qu’il joue une demi-seconde dans le futur. Le meilleur attaquant derrière McKenna, disent plusieurs. Le genre de talent qui, repêché 3e ou 4e, fait paraître votre table de draft comme un casse-tête résolu.

#4: Ryan Roobroeck (C, Niagara/OHL)

Le marteau au milieu. Fin 2007 (avantage d’âge), 6’4’’, tir assassin, habileté à se planter devant le filet et à y vivre. (il sa sacrifie pour marquer)

41 buts, 87 points en OHL; +9 points au U-18 avec le Canada. Son profil rappelle ces centres lourds qui écrasent un match de séries sous le poids des mises en échec et des récupérations autour du filet.

Niagara devrait être prétendant; si Roobroeck y marche au rythme prévu, vous avez un centre top 6 pour 10 ans, avec un énorme plafond. Dans une organisation qui cherche encore son 2e centre « qui reste », ça compte.

#5: Ryan Lin (DD, Vancouver Giants/WHL)

Le défenseur « plus petit » dont tout le monde sous-estime le plafond jusqu’à ce qu’il vous impressionne à la Lane Hutson.

Meilleur joueur du Canada au championnat du monde U-18, lecture du jeu élite, patin qui brûle les corridors, décisions instantanées sous pression.

Verhoeff aura l’avantage « gabarit », mais talent pour talent, Lin pourrait bien être le plus « doué » chez les arrières 2026. Dans une LNH qui vit de premières passes propres et de mobilité, c’est de l’or en barre.

#6 (et joker): Tynan Lawrence (C, Muskegon/USHL, départ pour l'Université de Boston.)

Peut-être l'attaquant le plus impressionnant du Canada chez les U-18. Presque un point par match en USHL à 17 ans, l’une des saisons U-17 les plus productives de l’histoire récente de la ligue, mélange de flair offensif et de conscience sans la rondelle, avec une dominance de possession qui saute aux yeux.

BU l’attend. S’il transforme son année de draft pour exploser, il peut bousculer le top 5. Et c’est précisément là que 2026 devient effrayant : même « hors McKenna », vous tombez sur un profil qui, en temps normal, mériterait un podium.

Vous voyez l’image? On ne parle pas d’un « bon repêchage ». On parle d’une classe où les équipes pourraient ressortir du 7e ou 8e rang avec un joueur qui, dans d’autres cuvées, part au 2e ou 3e.

C’est cette profoneur et ce talent qui fait paniquer les DG et qui fait que Kent Hughes refuse obstinément de joindre un 1er 2026 non protégé à une offre pour Mason McTavish.

Les Ducks sont inflexibles :

« Reinbacher ou le 1er non-protégé ». Montréal répond : « Ni l’un, ni l’autre. »

Même chanson avec d’éventuelles cibles secondaires : si on parle de Jared McCann (Seattle) ou d’autres 2e centre « disponibles », l’ouverture montréalaise va vers un 1er protégé lourdement (top 10).

Mais dans le fond, l’idéologie du club ne bouge pas : ne pas redevenir New Jersey 2023-24.

Parce que c’est bien de cela qu’il s’agit : éviter le « faux palier ». Le CH sort d’une saison à 91 points, qualifié in extremis, porté par des pics individuels (Suzuki, Caufield, Montembeault), un Calder pour Hutson, un Slafkovsky qui continue de progresser lentement un Demidov qui débarque.

Sur le papier, la flèche pointe vers le haut. Mais la marge d’erreur reste mince, la division Atlantique est peut-être la meilleure de la LNH, et un blessé au mauvais endroit peut gâcher une saison.

C’est exactement ce qui a fait basculer les Devils : pas un défaut de talent, un défaut de timing et de santé. Et soudain, le 1er tour « qu’on croyait tardif » redevient un top 10.

Imaginez vivre ça… l’année de McKenna / Verhoeff / Stenberg / Roobroeck / Lin / Lawrence.

Et c’est là qu’entre la part « sensationnaliste » du débat : McKenna n’est pas juste « le meilleur joueur » de 2026; il est la légende qui redessine le marché.

Des agents libres avec compensation comme Mason McTavish espéraient des offres hostiles cet été? Plusieurs clubs ont reculé par peur d’envoyer un 1er non protégé dans une année McKenna.

Des DG qui, en temps normal, payaient « un peu trop » pour un 2e centre de 22 ans? En 2026, ils rangent le chéquier.

C’est une année où la ligue entière joue à ne pas perdre le billet gagnant. Et Montréal, qui a enfin regarni ses étagères d’espoirs bleus (Hutson, Demidov Reinbacher, Hage, Engström, etc.), n’a aucun intérêt à s’arracher le plancher sous les pieds.

« Oui mais… le 2e centre! »

C’est l’argument qui revient. Sauf que le timing compte. Si McTavish coûtait « cher mais raisonnable » (sans Reinbacher ni 1er non protégé), on ne serait probablement pas en train d’avoir cette conversation.

Anaheim est inflexible? Parfait. Le Kraken écoute pour McCann? Très bien, cela doit se faire à prix 2026 compatible.

Entre-temps, l’organisation a ouvert une piste interne : Bolduc a travaillé les mises au jeu avec Marc Bureau, Dach demeure une carte majeure si la santé suit, Newhook peut basculer au centre en dépannage, et l’attaque vient de s’offrir Demidov plus un Laine potentiellement réanimé par Martin St-Louis. Ces deux ailiers vont produire, peu importe le centre.

Est-ce parfait? Non. Est-ce suffisant pour ne pas jouer à la roulette russe avec 2026? Oui.

« Et si Montréal se “New-Jersey-isait” quand même? »

C’est précisément pour ça que le 1er 2026 reste collé à Brossard. Perdre pied n’est pas une honte, c’est une possibilité mathématique. Ce qui serait impardonnable, c’est de se priver volontairement d’un top 8 dans l’un des repêchages les plus profonds des dix dernières années.

Si vous tombez, vous devez tomber avec une récompense. McKenna s’évapore au 1er? Verhoeff peut régler votre côté droit de la ligne bleue pour une décennie.

Stenberg peut devenir votre « cerveau » offensif. Roobroeck peut ancrer votre 2e ligne. Lin peut être votre électrochoc à la bleue. Lawrence peut jaillir du rang 5-7 avec des dents de première ligne. Il n’y a pas de mauvais atterrissage dans ce top-5 élargi.

C’est ça, au fond, que Brunet nous force à regarder : la tentation d’accélérer est grande, mais la pente est aussi frande. Les Devils se sont échappés d’un cran, et tout leur château a "shaké"

Montréal n’a pas à rejouer ce film. Hughes et Gorton ne sont pas frileux; ils sont lucides. Le club peut manquer d’un 2C « parfait » en octobre; il ne peut pas manquer d’un avenir en juin.

Alors oui, le discours est impopulaire dans un marché qui rêve de coups de tonnerre. Oui, « protéger un 1er » sonne parfois comme plate et ennuyant.

Oui, c’est frustrant de regarder Anaheim être gourmand, Seattle calculer, et les rumeurs tourbillonner. Mais dans douze mois, quand viendra le temps d’annoncer un nom au podium 2026, personne ne regrettera la patience.

Et si, par un improbable alignement des planètes, ce nom est Gavin McKenna, ou si ce n’est « que » Keaton Verhoeff, Ivar Stenberg, Ryan Roobroeck, Ryan Lin ou Tynan Lawrence, on racontera cette obstination comme le moment où Montréal a refusé de devenir New Jersey 2023-24.

Le CH a déjà payé pour apprendre. Cette fois, il garde la facture... et réclame le reçu.