Pensées pour Arber Xhekaj: son départ de Montréal est inévitable

Pensées pour Arber Xhekaj: son départ de Montréal est inévitable

Par David Garel le 2025-10-29

La différence de traitement saute aux yeux, et il dérange de plus en plus au Québec.

Mardi soir, à Seattle, Jayden Struble a commis une erreur monumentale, une de ces erreurs qui changent un match, qui coûtent des buts, qui font rager les entraîneurs.

À 3-0 pour Montréal, le jeune défenseur a tenté une montée hasardeuse, a perdu la rondelle, puis a accroché son adversaire.

Pénalité stupide, avantage numérique du Kraken, et remontée de Seattle. On connaît la suite. Un match qui aurait dû être une victoire facile est devenu une quasi-catastrophe. Heureusement, Cole Caufield nous a sauvés en prolongation.

Mais au lieu d’écorcher Struble publiquement, Martin St-Louis a choisi la douceur. Un ton calme, presque paternel.

Pas de blâme, pas de sanction. Une explication technique, un peu de philosophie, un rappel de la fameuse “culture d’apprentissage”. Et ça, ça fait grincer bien des dents. parce que tout le monde se demande : et si ç’avait été Arber Xhekaj à la place ?

L’action est pourtant claire et nette. Struble, en fin de présence, tente de traverser la zone offensive avec Juraj Slafkovský. Deux adversaires en face. Pas de surnombre, pas de support. Il rate sa passe, accroche Berkly Catton dans la foulée. Pénalité. Le Kraken réduit l’écart à 3-1, puis crée l’égalité dix minutes plus tard.

Sur le banc, les caméras captent St-Louis qui secoue la tête, visiblement irrité. 

Mais quelques heures plus tard, devant les journalistes, l’entraîneur minimise l’incident :

« C’est un de ces jeux que… merde… tu dois envoyer la rondelle profondément. Je suis content qu’on ait fini par gagner quand même », a concédé Struble, soulagé.

« C’était juste un mauvais jeu. J’ai vu Slaf [Slafkovský], j’ai voulu lui faire une petite passe fine, mais c’est pas mon jeu. J’ai eu un petit moment de distraction, un “brain fart”, comme on dit. Mais je pense que j’ai quand même joué un bon match jusqu’à ce moment-là, et heureusement, nos vedettes nous ont sortis du pétrin. »

Les journalistes lui ont alors demandé si Martin St-Louis l'avait "engueulé" comme il le fait toujours avec Xhekaj.

La réponse de Strubke va donner des frissons dans le dos du Shérif.

« Non, il est resté calme. Il est juste venu me voir pour me dire : “Pourquoi ce jeu-là ? On n’avait pas de surnombre. Quand tu n’as pas d’avantage, tu mets ça en fond et tu laisses le forecheck faire le travail.” C’était clair, net. »

Le coach du CH ne s'est pas fait prier pour flatter son défenseur... dans le sens du poil.

« C’est probablement son meilleur match depuis le début de la saison. Il a été très bon jusqu’à ce jeu-là. Il y a beaucoup plus de positif que de négatif avec Struble ce soir. On va en parler, mais ce soir c’était lui ; demain, ce sera un autre. On doit tous apprendre de ce genre d’action. »

Le message est clair : Struble a eu droit à une erreur gratuite. Une erreur “formatrice”. Une erreur “humaine”.

Mais quand il s’agit d’Arber Xhekaj, le ton n’a jamais été aussi indulgent.

La comparaison est cruelle. Il y a à peine quelques jours, Xhekaj a été envoyé au banc immédiatement, son temps de jeu coupé du tout au tout, aucune confiance du coach, et finalement, le défenseur a joué à peine plus de 6 minutes.

À Vancouver, il avait été puni pour deux fautes jugées “stupides”, ce sont les mots de St-Louis lui-même, captés par les micros du bord de la bande. Et depuis, le “Shérif” de Montréal est de retour dans la niche du coach.

Mardi, à Seattle, pendant que Struble jouait 15 minutes 12 secondes, Xhekaj a passé la majorité du match cloué sur le banc (à peine 11 minutes de temps de jeu). Une nouvelle démonstration du fossé de traitement entre les deux.

Et pourtant, Struble a fait bien pire.

Sa pénalité a relancé un match mort.

Son erreur a fait vaciller toute une victoire.

Mais il a eu droit à des compliments.

Cette clémence envers Struble en dit long sur la psychologie du vestiaire de Martin St-Louis. Il a ses favoris. Et Struble en fait partie. Calme, docile, intelligent, il coche toutes les cases du joueur “coach-friendly”. Il exécute sans discuter.

Xhekaj, lui, n’est pas un suiveur. Il pense par lui-même, il agit par instinct. Et dans un système aussi contrôlé que celui de St-Louis, c’est un péché mortel.

Le plus ironique ? Struble est aujourd’hui jugé selon les principes qu’on a toujours refusé à Xhekaj.

Quand le #72 commet une erreur, on dit qu’il est imprudent, indiscipliné, ingérable.

Quand Struble fait la même chose, on parle “d’apprentissage”, de “leçon à tirer”, d’un “jeune qui se construit”.

Le double standard saute aux yeux, et commence à irriter certains partisans.

Depuis son arrivée à Montréal, St-Louis répète que le Canadien se construit une “culture d’équipe”. Un environnement où les jeunes peuvent grandir sans peur, où l’erreur est permise. Mais la réalité, c’est que cette culture-là ne s’applique pas à tout le monde.

Arber Xhekaj, c’est un cas à part. Il dérange. Il a du caractère. Il défend ses coéquipiers, il frappe fort, il s’impose. Et ça, St-Louis le tolère mal. Il veut un hockey propre, organisé, presque clinique. Il veut des joueurs dociles, pas des émotifs.

Et ça se ressent jusque dans les décisions. Struble, qui cadre parfaitement avec sa vision “stable et structurée”, est protégé. Xhekaj, lui, est constamment rappelé à l’ordre.

Un soir, St-Louis parle de “continuité et d’équilibre”. Le lendemain, il coupe son défenseur robuste et envoie des signaux contradictoires. Ce n’est plus une gestion d’équipe... c’est de la micropsychologie.

Les propos de St-Louis après le match à Seattle l’ont montré : il a choisi chaque mot, chaque intonation. On le sentait sur la défensive, presque nerveux.

« On doit comprendre que toutes les actions peuvent faire boule de neige. Chaque jeu compte. Il faut être prudent. Je ne dis pas qu’il faut l’être quand on a un surnombre. Mais quand il n’y a pas d’avantage, fais confiance à l’échec avant », a-t-il dit.

Il a tourné sa langue sept fois avant de parler. Il le savait : le traitement réservé à Struble serait scruté. Et pour une fois, il a voulu éviter de “jeter un joueur sous l’autobus”, comme il l’a déjà fait avec d’autres.

Mais le mal est fait. Le public, les journalistes, les anciens joueurs, tout le monde a remarqué le deux poids, deux mesures.

La situation est d’autant plus injuste que Xhekaj ne sait plus comment exister.

En voulant plaire à son entraîneur, il a perdu sa nature. Trois mises en échec en six matchs, un joueur transformé en fantôme.

Et ce n’est pas un hasard. Il a peur. Peur de frapper. Peur de déplaire. Peur d’être rayé de l’alignement.

Pendant ce temps, Struble joue libéré. Il se trompe, il apprend, il revient sur la glace. C’est ça, la différence.

Et c’est là que le discours de St-Louis perd toute crédibilité. Il parle de “culture”, mais il ne prêche pas l’équité. Il parle de “confiance”, mais il distribue la sienne à la tête du client.

Ce favoritisme commence à fragiliser le vestiaire. Les joueurs voient bien que les erreurs ne se paient pas toutes au même prix.

Les vétérans murmurent que “certains ont un coussin plus épais que d’autres”. Et même dans la direction, on s’interroge : peut-on encore espérer développer Xhekaj dans ce contexte ?

Parce qu’à 1,3 million de dollars et agent libre avec restriction l’été prochain, son cas deviendra vite un dossier administratif. Et si St-Louis ne le voit plus comme une pièce d’avenir, Kent Hughes n’aura d’autre choix que de l’échanger., avant que sa valeur ne s’effondre complètememt.

Ce qui est triste dans tout ça, c’est qu’on parle d’un gars qui a tout donné à cette organisation. Arber Xhekaj a gagné sa place sans être repêché, à la sueur de son front.

Il a protégé ses coéquipiers, il a mis son corps en ligne plus souvent qu’à son tour. Et aujourd’hui, il se retrouve relégué derrière un joueur qui a commis la même erreur que lui, sans aucune conséquence.

C’est injuste. Et c’est indigne d’un coach qui se dit “humain”.

Le Canadien a gagné 4-3 grâce à Cole Caufield, mais le vrai message du match est ailleurs. Ce n’est pas un but qu’on retiendra, c’est un double standard.

Martin St-Louis, en épargnant Struble et en punissant Xhekaj, a révélé malgré lui une faille profonde dans sa gestion.

Le “Shérif” est puni pour être lui-même. Struble est récompensé malgré ses fautes.

Et tout le monde commence à le voir.