Ce matin, au Capital One Arena, le silence était pesant.
Pas un mot dans le vestiaire. Pas un regard échangé entre les vétérans. Mais sur la glace, une scène venait d’éclater, un moment lourd de symbolisme et de colère contenue : Arber Xhekaj, le « Shérif » du Canadien, venait de fracasser son bâton contre la bande.
Il n’était pas sur la glace avec les réguliers. Il n’était pas dans les plans pour le match le plus important de la saison. Il était avec les réservistes. Encore.
Et cette fois, c’était trop.
Le cauchemar d’Arber Xhekaj a franchi une nouvelle étape dans l’humiliation. Pas seulement écarté de l’alignement, il est maintenant relégué aux exercices avec Michael Pezzetta, Oliver Kapanen et Jakub Dobes, sous les ordres d’Adam Nichols, le directeur du développement hockey. Ce n’est plus un message, c’est un verdict.
Et le plus grave, c’est que tout le monde le sait. Il n’y a plus de doute : Martin St-Louis a enterré Xhekaj pour de bon.
Ce matin, la colère d’Arber Xhekaj était visible. On l’a vu bouillir, exploser. Le bâton fracassé, la mine défigurée, les coups de patin rageurs pendant les relances : tout témoignait d’un cœur brisé et d’un joueur à bout de souffle. L’homme est vidé. Le cœur n’y est plus. La patience a cédé.
Et comment pourrait-il en être autrement? Cela fait maintenant 10 des 11 derniers matchs qu’il regarde l’action du haut de la galerie de presse.
Et pendant ce temps, ses coéquipiers se font frapper, malmener, déstabiliser sur la glace. Lane Hutson a été secoué par Andrew Mangiapane. Cole Caufield a évité les coins de patinoire comme un enfant effrayé. Kaiden Guhle a été dominé physiquement.
Mais pas de Xhekaj.
Et le message de Martin St-Louis n’a jamais été aussi clair : il ne croit pas en lui. Pire, il n’en veut pas.
« Je ne pense pas que ça changerait le style de jeu de Tom Wilson », a-t-il déclaré, froidement, comme une gifle à Xhekaj en pleine face.
Quel entraîneur ose dire, publiquement, que la présence de son propre défenseur robuste, spécialiste des confrontations physiques, ne changerait rien contre l’un des plus gros intimidateurs de la LNH?
C’était une déclaration calculée. Humiliante. L’équivalent d’un enterrement en bonne et due forme.
Dans le vestiaire du Canadien, la commotion est réelle. Alex Newhook, visiblement mal à l’aise, a tenté de défendre Xhekaj en soulignant que sa présence changeait la dynamique.
Mais son visage parlait pour lui. Il n’y croyait pas lui-même. Il avait honte. Tout comme plusieurs autres qui savent que leur propre sécurité a été compromise parce que le seul joueur capable d’imposer le respect… est dans les estrades.
Le pire? C’est que même Georges Laraque, son mentor, a lâché prise.
« C’est fini pour Xhekaj à Montréal », a-t-il lancé sans détour. Et il a raison. Il n’y a pas de retour possible après une telle humiliation.
Laraque devait calmer sa colère devant la caméra pour ne pas exploser:
@bpmsportsradio « Je trouve ça cave qu’il faut qu’il arrive un match de même pour que tu le mettes après! » Georges pense que c’était une grave erreur de ne pas faire jouer Arber Xhekaj hier… et que c’est un signe que c’est fini pour lui à Montréal 😮 #habs #xhekaj #canadiensmtl #hockey #gohabsgo #canadiensdemontreal #nhlplayoffs ♬ son original - BPMSPORTSRADIO
"Quand il est là, tu as une équipe du Canadien qui est différente quand il joue versus quand il n'est pas là. Puis on ne parle pas de combat.
On parle d'une présence rassurante quand il joue pour les jeunes qui sont là, qui se font frapper tout lematch, qui se font passer la main dans la face, puis il n'y a aucun message de lancé, jamais. Je trouve ça cave..."
Georges a raison sur toute la ligne.
Depuis des semaines, les signaux étaient là. Des erreurs soulignées en point de presse. Des critiques voilées. Puis l’effacement total. Kent Hughes n’a jamais défendu publiquement son joueur. Pas une fois.
On parlait encore de lui comme un intouchable il y a un an. Aujourd’hui, il est un boulet. Et tout indique que l’organisation veut s’en débarrasser cet été.
Des équipes sont déjà sur les rangs. Les Flyers de Daniel Brière, en particulier, rêvent d’ajouter Xhekaj à leur ligne bleue. Le message de Laraque a été entendu à Philadelphie.
Et n’oublions pas Anaheim. Dans les discussions autour de Trevor Zegras, plusieurs sources affirment que les Ducks ont évoqué le nom de Xhekaj à plusieurs reprises. Et dans un éventuel package avec Logan Mailloux et un choix de premier tour? L’histoire s’écrirait ailleurs.
Mais ce qui choque le plus dans cette histoire, c’est l’orgueil.
L’orgueil démesuré de Martin St-Louis, qui préfère mourir avec ses principes que de plier devant une pression médiatique évidente.
Ce matin, encore, il a refusé de dire pourquoi Xhekaj n’était pas inséré dans la formation. Il a balayé la question, comme si l’entièreté du Québec ne réclamait pas la présence du Shérif.
Aujourd’hui, le Québec est furieux. Les journalistes sont fâchés. Et Xhekaj? Il est seul.
Seul avec sa frustration. Seul avec sa honte. Seul avec cette sensation d’avoir été sacrifié, trahi, jeté à la poubelle après avoir tout donné.
Il ne faut pas oublier qu’il s’est battu pour ses coéquipiers, qu’il a mis son corps en jeu, qu’il a protégé Suzuki, Caufield, Hutson… et qu’aujourd’hui, c’est lui qu’on laisse sans défense.
Et que dire de son frère, Florian?
Le jeune Xhekaj est en train de devenir une révélation à Laval. Il a marqué son 23e but. Il frappe, il dérange, il marque. Il est adoré. Et l’ironie est cruelle : Florian est désormais plus utile à l’organisation que son propre frère.
Le message est clair. Arber n’a plus de place. Pas comme défenseur. Et pas comme attaquant non plus.
Alors que reste-t-il?
Un joueur brisé. Un vestiaire divisé. Un entraîneur rigide. Et une province entière qui se demande comment une organisation peut agir avec autant de mépris envers un joueur aussi loyal.
La fin est inévitable. Et elle sera brutale. Le Canadien va perdre un joueur qui aurait pu devenir une pierre angulaire identitaire. Et Martin St-Louis va devoir vivre avec le fait que c’est son ego qui a précipité cette fin.
Parce qu’à ce stade-ci, ce n’est plus du hockey.
C’est un règlement de compte.
Et Arber Xhekaj en est la victime.