C’était censé être une conférence de presse banale pour présenter l’acquisition d’un jeune défenseur prometteur. Mais le passé n’oublie jamais. Et mardi, Doug Armstrong l’a appris de la façon la plus brutale qui soit.
Le directeur général des Blues de St. Louis, visiblement mal à l’aise, a été forcé de commenter le passé trouble de Logan Mailloux, le défenseur qu’il venait d’acquérir du Canadien de Montréal en retour de Zachary Bolduc.
L’échange, perçu comme un simple “hockey trade” par les deux organisations, a rapidement pris une tournure plus délicate.
« Son année de repêchage, il avait des problèmes hors glace, a déclaré Armstrong. Il y a eu une demande du joueur de ne pas être repêché, donc nous ne l’avons pas sélectionné avec notre choix. Puis, c’est Montréal qui l’a pris. »
Le malaise était énorme. La presse, insistante, voulait des réponses plus précises. Qu’en était-il du respect envers la victime? Des conséquences de ses actes? Du message envoyé par l’organisation?
Mais Armstrong a rapidement fermé la porte :
« Nous avons fait nos recherches. La LNH a fait son travail et l’a autorisé à jouer. Nous comprenons ce qu’il a fait en Suède. Nous comprenons aussi que tout le monde fait des erreurs. Il en a payé le prix et continuera de le faire. »
Mailloux, de son côté, ne s’est pas défilé.
« Honnêtement, ce n’est pas derrière moi. C’est quelque chose que je porte tous les jours. Je veux transformer cette situation négative en quelque chose de positif. »
Mais même cette tentative d’humilité n’a pas suffi à dissiper le doute. L’ombre du scandale de 2020 plane encore lourdement sur le parcours du jeune défenseur.
Rappelons que Mailloux avait été sanctionné en Suède pour avoir pris et partagé une photo intime d’une femme sans son consentement. Il avait été suspendu par la OHL, et son admission dans la LNH avait nécessité un suivi rigoureux de la ligue.
« Nous avons rencontré Logan Mailloux plusieurs fois. Nous sommes convaincus qu’il comprend la gravité de ses actes et qu’il veut devenir une meilleure personne », avait déclaré la LNH à l’époque.
Dans son nouveau costume de porte-couleurs des Blues, Mailloux a affirmé qu’il était « prêt pour la LNH ».
« J’ai hâte d’aider les Blues à gagner. Il y a beaucoup de jeunes talentueux ici. J’espère m’intégrer à ce groupe. »
Mais derrière le discours pré-mâché, une question demeure : pourquoi le CH n’a-t-il jamais cru bon de lui donner sa chance, malgré un besoin énorme à droite en défensive?
Pendant que Kent Hughes encensait publiquement Mailloux en affirmant qu’il avait eu une « saison exceptionnelle à Laval », il le transigeait à la première occasion, sitôt Noah Dobson acquis.
Armstrong, lui, ne cache pas ses intentions :
« C’est un excellent patineur avec un tir de premier plan. Il apprend encore à défendre, mais pour nous, il est prêt. C’est à lui maintenant de conserver ce poste. »
Le DG va plus loin :
« Il remplit un besoin aujourd’hui et demain. Notre côté droit en défense est vieillissant. On avait besoin de sang neuf. »
Un autre volet du malaise : en 2021, les Blues auraient pu sélectionner Mailloux. Ils ont choisi de respecter sa volonté de ne pas être repêché.
Quatre ans plus tard, ils font volte-face.
« Si on ne se plaçait pas pour l’avoir maintenant, quand aurions-nous une autre chance? », a admis Armstrong.
À la question : qu’a-t-il fait pour mériter votre confiance?, Armstrong est resté vague.
« Comme tous nos joueurs, on va l’accompagner. On est là pour les soutenir. »
Bref, un discours prudent, presque robotique, qui n’a fait qu’attiser la méfiance des journalistes.
Mailloux, 22 ans, compte 80 points en 135 matchs dans la LAH. Il a marqué deux buts en sept matchs avec le CH, mais n’a jamais été utilisé dans des situations critiques.
« C’était formateur, a-t-il dit. J’ai vu ce que je devais faire pour être productif chaque soir. »
Pour Armstrong, la transaction est une occasion :
« On a donné un jeune ailier, Bolduc, pour un défenseur droitier, ce qu’on avait besoin. C’était l’occasion idéale. »
Mais la mémoire collective, elle, n’oublie pas.
Mailloux a-t-il vraiment changé?
Le malaise dans la salle virtuelle a résonné bien plus fort que toutes les analyses hockey possibles.
Doug Armstrong savait très bien que la conférence de presse ne passerait pas sans qu’on lui parle du passé judiciaire de Logan Mailloux.
Ce n’est pas pour rien qu’il avait révisé ses notes, préparé ses réponses et même choisi ses mots avec une prudence chirurgicale. Mais malgré tous ses efforts, il y a eu un moment de flottement. Un silence bref. Un regard évité. Un malaise qui a pris le dessus.
La froideur de la réponse n’a pas échappé à l’assistance. Plusieurs journalistes l’ont perçue comme une tentative d’éteindre rapidement le sujet. Armstrong a poursuivi :
« Nous croyons qu’il est un joueur différent, et aussi un homme différent. C’est ce qu’on nous a démontré, et c’est ce que nous avons vu. »
Mais encore une fois, aucune allusion à une quelconque rencontre avec la victime, aucun détail sur les démarches spécifiques entreprises par Mailloux pour réparer les torts commis.
« Tout ce que je peux dire, c’est que nous sommes ici pour soutenir tous nos joueurs. Peu importe leur parcours. »
Cette réponse a été interprétée comme une fuite, voire une forme de déni du traumatisme vécu par la victime originale de Mailloux.
C’est à ce moment que l’image publique des Blues a commencé à "shaker" légèrement. Sur les réseaux sociaux, les réactions se sont multipliées.
Plusieurs partisans de St. Louis ont exprimé leur malaise face à cette acquisition.
Pour tenter de désamorcer la situation, Armstrong a ajouté un dernier commentaire :
« Comme dans tous les cas où une personne a fait une erreur grave, notre rôle, c’est d’offrir un environnement où elle peut continuer à évoluer positivement. »
Mais malgré la sincérité apparente, Mailloux n’a pas non plus expliqué ce qu’il avait entrepris concrètement. Il a parlé de « croissance personnelle », de « maturité acquise », et de son désir de « contribuer positivement à la communauté de St. Louis », mais sans jamais entrer dans le détail. Tout est resté dans le domaine du discours.
Au final, la conférence de presse n’aura pas dissipé le malaise. Au contraire, elle a ramené sous les projecteurs un dossier que plusieurs avaient tenté d’oublier.
Et si certains croient que Mailloux mérite une deuxième chance, d’autres continuent de se demander si cette transaction n’était pas précipitée. Un pari risqué, autant sur la glace qu’en dehors.
Bienvenue à St. Louis, Logan Mailloux. Maintenant, tout commence...ou tout recommence...