Arber Xhekaj est dans le trouble.
L'annonce d’alignement des Flyers de Philadelphie a suffit à réveiller un malaise profond, et celui-ci en est un.
Nicolas Deslauriers sera en uniforme au Centre Bell, après avoir été laissé de côté, avec zéro point en 13 matchs et à peine huit minutes de temps de glace par soir, et pourtant, malgré cette saison discrète, son simple retour dans le décor suffit à replonger Arber Xhekaj dans le pire souvenir de sa jeune carrière.
Ce n’est pas un hasard. Et ce n’est certainement pas une bonne nouvelle pour un défenseur déjà fragilisé dans le monde des hommes forts de la LNH.
Tout le monde se souvient de ce qui s’est passé. Un Canadien en contrôle du match, une avance de 4-3, un Centre Bell relativement calme, et soudainement, Arber Xhekaj décide de jeter les gants contre Nicolas Deslauriers, non pas pour protéger un coéquipier, non pas pour répondre à un geste douteux, mais pour affirmer pour envoyer un message et pour rappeler qu’il est le shérif.
Sauf que le message s’est retourné contre lui. En quelques secondes, Deslauriers l’a ramené à la réalité avec l’assurance froide d’un vétéran qui sait exactement quand et comment frapper.
Deux droites sèches, les genoux qui plient, l’équilibre qui disparaît, et surtout, ce silence lourd dans l’aréna, celui qui dit que quelque chose vient de casser.
Ce combat-là n’a pas seulement coûté du momentum au Canadien, il a coûté une part de crédibilité à Xhekaj. Les Flyers ont égalisé presque immédiatement après, avant de l’emporter en fusillade, et tout le monde dans le bâtiment a compris que le problème n’était pas la bagarre elle-même, mais le moment, l’intention et le manque total de lecture de situation.
Martin St-Louis a envoyé son défenseur sous l'autobus après le match. Et depuis ce soir-là, rien n’a été pareil pour le “Shérif”.
Il a subi ensuite correction sur correction, au point de se faire traiter de shérif déchu.
Pendant ce temps, à Philadelphie, Deslauriers est respecté. On le sort de l’alignement, mais on le ramène sans hésiter quand le contexte l’exige.
À Montréal, Xhekaj vit l’inverse. Chaque présence est scrutée. Chaque décision est analysée. Chaque erreur devient une preuve supplémentaire qu’il n’a peut-être pas compris ce que la LNH exige à ce stade de sa carrière.
Clairement, les Flyers veulent qu'il tabasse Xhekaj une fois de plus. Ça serait la troisième fois en trois occasions, vu que Xhekaj s'était fait corriger en tant que recrue en 2022:
Et ce soir, le piège est immense. Tout le monde va regarder Xhekaj. Tout le monde va se demander s’il va “laver son honneur”, s’il va répondre, s’il va provoquer Deslauriers.
C’est exactement ce qui rend la situation dangereuse pour lui. Parce que peu importe ce qu’il fait, le risque est énorme.
S’il se bat et perd encore, l’étiquette devient définitive: il est un boxeur perdant jusque dans le sang. S’il se bat et gagne, on espère pour lui que le moment sera propice, sinon Martin St-Louis va sauter une coche.
Et s’il ne se bat pas, on parlera de peur et on le traitera de peureux. C’est un scénario sans bonne issue, le genre de soirée où un joueur peut perdre beaucoup plus qu’un combat : il peut perdre son identité, sa confiance, son estime de soi... et sa valeur de boxeur.
Ajoute à ça le contexte interne du Canadien, et le tableau devient encore plus sombre. Xhekaj revient dans l’alignement après avoir été laissé de côté. (merci à la blessure de Mike Matheson)
Adam Engström, lui, demeure dans le décor. La fameuse rotation à trois pour deux poste continue, et chaque match devient une audition déguisée.
Dans ce genre de situation, la pire chose à faire, c’est de jouer avec les émotions. Et pourtant, tout dans le retour de Deslauriers appelle exactement ça : l’émotion, l’orgueil... sa réputation salie.
Martin St-Louis, lui, n’aura même pas besoin de dire quoi que ce soit. Il sait que ce combat-là, celui de novembre, est encore dans la tête de Xhekaj.
Il sait que son défenseur joue avec un poids invisible, celui d’un rôle qu’il n’arrive plus à assumer correctement. Et il sait aussi que dans une équipe qui cherche de la constance, de la maturité et de la fiabilité, ce genre de profil devient rapidement un problème plutôt qu’une solution.
Le cauchemar de Xhekaj, ce n’est pas Nicolas Deslauriers en soi. C’est ce qu’il représente. Un miroir brutal. Un rappel que la robustesse, dans la LNH, n’est pas une question de taille ou de réputation, mais de timing, de sang-froid et de lecture du jeu.
Ce soir-là, au Centre Bell, quand Deslauriers l’a corrigé sans même célébrer, ce n’est pas seulement un combat que Xhekaj a perdu. C’est le contrôle du narratif autour de lui.
Et ce soir, alors que Deslauriers revient sur la glace où tout a basculé, le “Shérif” n’a plus le luxe de l’erreur. Parce que dans ce marché, quand l’image se brise, elle ne se répare pas facilement.
Et parfois, un seul combat suffit pour détruire une carrière... à vie...
