Mauvais traitement: Arber Xhekaj averti par les Rangers de New York

Mauvais traitement: Arber Xhekaj averti par les Rangers de New York

Par David Garel le 2025-12-16

Ce qui se passe présentement à New York avec Matt Rempe prouve une réalité que plusieurs refusent encore de nommer à Montréal : le rôle de joueur intimidant est ingrat, dangereux… mais il peut être valorisé... ou sacrifié... selon la culture de l’organisation.

Rempe s’est fracturé le pouce gauche en livrant un combat contre Ryan Reaves, non pas à la suite d’un accident banal ou d’un contact malheureux, mais en faisant exactement ce pour quoi il est payé, ce que l’organisation attend de lui, ce que ses coéquipiers savent qu’il fera lorsqu’il saute sur la glace.

Il a continué de frapper sans même réaliser que son pouce était déjà brisé, parce que dans l’intensité d’un combat de poids lourds, le corps n’envoie plus les signaux habituels, l’adrénaline prend toute la place, et la douleur arrive toujours après, quand il est trop tard pour reculer.

« J’ai continué de frapper, frapper, frapper, et je suppose que je l’ai fracturé, a déclaré Rempe. Mais quand on est en plein combat, on ne ressent rien, donc on ne s’en rend pas compte. »

Après que Reaves et lui se soient dit « beau combat » au banc des pénalités, Rempe a baissé les yeux et s’est rendu compte que quelque chose clochait.  

« Quand je suis allé au banc des pénalités. Je me suis dit : “Oh mon Dieu, quelque chose ne va pas” », s’est-il souvenu.

Cette réalité-là, Rempe ne l’a jamais niée, il l’a acceptée avec calme, en expliquant que ça faisait partie du métier, que ça finirait bien par arriver, et que la saison était longue.

Ce qui est frappant, toutefois, ce n’est pas la blessure elle-même, mais la réaction de l’organisation des Rangers. Malgré les 24 matchs manqués, malgré l’absence prolongée, malgré le risque évident associé à ce type de joueur, personne à New York n’a remis en question sa place, son utilité ou son rôle.

Mike Sullivan l’a dit clairement, sans malaise comme Martin St-Louis lorsqu'il parle d'Arber Xhekaj. Quand Rempe est dans l’alignement, il a un impact, il crée de l’anxiété chez l’adversaire, il complique la vie des autres équipes, il rend chaque présence plus lourde à gérer.

« Quand il est dans l’alignement, il a un impact, a déclaré Sullivan. Il crée de l’anxiété chez nos adversaires. C’est un domaine dans lequel je pense qu’il peut nous aider. Il participe à l’échec-avant, il s’impose physiquement, il va devant le filet, il rend la tâche des autres plus complexe. Il a un impact sur le jeu, par sa façon de jouer. » a affirmé le coach.

À New York, Rempe n’est pas un problème à gérer, ni un joueur à tolérer en attendant mieux. Il est un outil identifié, encadré, utilisé dans un rôle précis, limité, mais respecté.

Et Rempe veut continuer à tapocher le visage de ses adversaires... pour la vie...

« Dans quelques semaines, tout ira bien, mais je ne peux pas pour l’instant, ce qui est dommage, mais ce n’est pas grave, car on peut toujours jouer au hockey et faire d’autres choses. »

« Ross Johnston (Ducks d’Anaheim) ne sabait pas ce qui se passe avec mon pouce et tout ça, il m'a demandé de me battre. Je lui ai dit : “Hé, je ne peux pas y aller”, et il comprend ça. Il a probablement déjà vécu la même chose. »

Mais Rempe a quand même joué hier soir.

On ne lui demande pas d’être autre chose que ce qu’il est. On ne l’expose pas inutilement. On ne le punit pas publiquement pour des décisions qui découlent de la nature même de son jeu. On le protège, tout en acceptant lucidement le prix physique que ce rôle impose.

Et c’est précisément là que la différence de traitement avec Arber Xhekaj devient impossible à ignorer.

À Montréal, Xhekaj occupe sensiblement le même espace symbolique dans l’imaginaire collectif : celui du joueur qui frappe, qui intimide, qui impose une réponse physique pour protéger ses coéquipiers.

Pourtant, son traitement est radicalement différent. Son temps de glace fluctue sans logique apparente. Son rôle change d’un match à l’autre. Son erreur devient une faute lourde, parfois disproportionnée, alors que des vétérans commettent les mêmes sans subir les mêmes conséquences.

Et surtout, le discours public du coach est toujours accusateur, mais jamais protecteur.

Le rôle d’intimidateur est déjà l’un des plus cruels du hockey moderne, parce qu’il repose sur une contradiction permanente : on exige de ces joueurs qu’ils jouent au bord du chaos, mais on leur reproche aussitôt d’y avoir mis un pied.

Rempe l’a dit lui-même, sans détour : quand tu es dans un combat, tu ne ressens rien. Cette phrase-là résume tout. Elle explique pourquoi ces joueurs paient souvent le prix avant même de réaliser ce qui leur arrive.

Elle explique aussi pourquoi une organisation doit savoir exactement ce qu’elle fait lorsqu’elle décide d’en employer un.

À New York, ce choix est clair. À Montréal, il semble de plus en plus inconfortable.

La comparaison devient encore plus troublante quand on observe la réception réservée à Rempe à son retour. Malgré une blessure sérieuse, malgré des limitations temporaires, malgré un rôle réduit à neuf minutes, il est accueilli comme un élément utile, valorisé, apprécié, soutenu par ses entraîneurs et par son vestiaire.

On souligne son éthique de travail, son engagement et ce qu’il apporte, même quand il ne produit rien sur la feuille de pointage ou quand il commet des bourdes.

À Montréal, Xhekaj donne parfois l’impression d’être un joueur qu’on garde sous condition, comme si sa présence devait constamment être justifiée, comme si son style dérangeait autant qu’il rassure.

Et dans une ligue où la perception compte presque autant que la performance, cette ambiguïté finit toujours par faire des dégâts.

Surtout quand Martin St-louis le traite d'égoïste devant tous les journalistes du Québec.

C’est là que le danger devient réel pour le Canadien. Pas seulement sur le plan hockey, mais sur le plan humain et stratégique.

Un joueur comme Xhekaj, toujours critiqué par le coach, devient un actif fragile. Et dans la LNH, un actif fragile perd rapidement de la valeur, ou pire encore, se blesse avant même que l’organisation ait pris une décision.

Ce que le dossier Rempe nous rappelle, c’est que ce rôle ne pardonne pas. Il brise des corps. Il écourte des carrières. Il exige une clarté absolue de la part des équipes qui choisissent de l’intégrer à leur identité.

Les Rangers ont fait ce choix et l’assument pleinement. Le Canadien, lui, semble être rendu à la croisée des chemins avec le shérif.

Si Montréal croit encore à la valeur de ce type de joueur, alors il faut l’encadrer, le protéger et le définir clairement. Mais si l’organisation n’y croit plus vraiment, si elle considère que cette dimension n’a plus sa place dans sa vision à long terme, alors attendre devient dangereux. 

Dangereux pour le joueur. Dangereux pour la valeur de l’actif. Dangereux pour le message envoyé au vestiaire.

Le CH doit trancher une bonne fois pour toutes. Pour Xhekaj et sa famille. Pour les fans. Et pour Martin St-Louis... qui n'est pas capable de le voir en peinture...