Cauchemar pour Kirby Dach: Kent Hughes a trouvé son deuxième centre

Cauchemar pour Kirby Dach: Kent Hughes a trouvé son deuxième centre

Par Nicolas Pérusse le 2025-09-03

Est-ce la fin pour Kirby Dach au poste de deuxième centre? Calmons-nous. Mais disons-le franchement : à Brossard, une simple vidéo a fait lever les sourcils. Zachary Bolduc qui enchaîne les mises en jeu contre Nick Suzuki… et qui les gagne presque toutes (4 en 5).

Solide sur ses appuis, rapide sur le déclenchement, affamé dans l’exécution. Cette vidéo ne fait pas foi de tout, mais elle ouvre les yeux...

On ne parle pas d’un nouveau premier centre. On ne rit pas de Suzuki non plus. On sourit, en riant de bon cœur, parce que pour une fois, l’image renverse le script. Le capitaine a l’air d’un peewee sur cette facette-là, l’instant d’un clip. Et le kid? Il a l’air d’un premier centre, point.

Ce n’est pas arrivé par magie. Bolduc a entendu le message de Kent Hughes dès juillet. Pas de sauveur qui tombe du ciel. On évalue Dach. On gère le temps de jeu. On veut des solutions venues de l’interne.

L’organisation a poussé le Québécois à travailler ses mises au jeu. Résultat visible à l’écran : appuies compacts, mains calmes, hanche en avant, rondelle arraché net. Il n’y a pas que la technique. Il y a la volonté.

Et c’est là que le débat devient intéressant. On se rappel de Jonathan Drouin. On a essayé de convertir un ailier créatif en centre par nécessité. On l’a dénaturé. On lui a demandé de porter un rôle qui n’était pas le sien. Son hockey s’est dilué, sa confiance a suivi. Le marché l’a avalé. Montréal n’a jamais oublié.

Bolduc, lui aussi, est d’abord un ailier. Il aime partir du flanc, attaquer en vitesse, couper au centre au dernier moment, frapper sur un pas. Ce n’est pas un gars qui reste statique au point de mise en jeu pour se faire bousculer pendant 45 secondes, ni un colleur de filet qui vit à trois pieds du gardien. Dans son schéma naturel, il vient de l’extérieur vers l’intérieur. Et ça marche.

Alors pourquoi l’idée du centre revient? Parce que la vidéo montre autre chose que du talent. Elle montre de l’intensité. Dans la LNH, la ligne est fine entre « je peux » et « je vais ». Les mises en jeu, c’est l’endroit où cette ligne se voit le plus. Tu peux apprendre les angles, la triche légale, les micro-habitudes des juges. Mais si tu ne rentres pas dans le cercle avec la conviction que la rondelle t’appartient déjà, tu perds. Point.

C’est ce qui séparait Jonathan Drouin du rôle qu’on lui a imposé. Pas une question de mains. Pas une question de vision. Une question de volonté à répétition. Répéter l’effort, répéter la lecture, répéter l’impact défensif, 82 matchs de suite, contre des centres qui veulent t’enlever ton lunch. Ce n’était pas son identité. Et on l’a appris à la dure.

Bolduc, lui, envoie un autre signal. Ce n’est pas qu’il est prêt à être centre permanent demain matin. C’est qu’il est prêt à gagner des batailles au cercle dès maintenant. C’est qu’il est prêt à mordre dans des mises au jeu clés, celles qui lancent une présence en zone offensive avec Demidov, celles qui tuent un momentum adverse après un dégagement refusé, celles qui font la différence quand la glace rétrécit en fin de match. On peut le déployer à la carte. On peut l’installer en alternance.

Et c’est là que Kirby Dach entre dans la conversation. Le plan de Kent Hughes a toujours été clair : ne pas brûler les étapes avec Dach, ne pas lui mettre 21 minutes quand le genou n’est pas prêt à encaisser

. On peut gérer son temps. On peut lui enlever des mises au jeu en fin de période. On peut décider qu’en zone offensive, sur le deuxième trio, Bolduc prend le faceoff à gauche, puis glisse aussitôt à l’aile sur la séquence suivante. Rien n’oblige à imprimer « C » sur sa carte d’affaires à temps plein.

Tu veux un aperçu de la recette? Commences-en trois en territoire offensif avec Bolduc au cercle, surtout quand Demidov est sur la glace. Donnes-lui les situations où sa volonté fait basculer la possession dès la deuxième seconde. Sur la route, quand tu n’as pas le dernier changement, reviens à l’aile et choisis tes moments. C’est une alternance intelligente. Ça ménage Dach. Ça éduque Bolduc sans l’écraser. Ça donne à Martin St-Louis une tactique de plus.

Au-delà des schémas, il y a le message. Montréal réagit à l’effort plus qu’au CV. Une mise au jeu arrachée les dents serrées, c’est un message. Et le groupe le sent. Le kid qui débarque, qui garde profil bas tout l’été, qui ne court pas après la caméra, qui se pointe au camp et qui gagne des cercles contre le capitaine, ça parle.

Ça dit : je ne suis pas venu pour faire de la figuration. Je suis venu pour enlever la rondelle aux autres.

Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit. Suzuki reste Suzuki. Ce n’est pas une destitution. C’est un clin d’œil, une image qui amuse tout le monde parce qu’elle bouscule, le temps d’un entraînement, l’ordre établi. Et c’est correct. Les capitaines qui durent sont ceux qui veulent être défiés. Les équipes qui montent sont celles qui trouvent des minutes utiles chez des jeunes qui mordent.

Le vrai piège n’est pas de donner des faceoffs à Bolduc. Le vrai piège, c’est d’imprimer trop vite la mention « deuxième centre » parce qu’une séquence sur X a tourné à l’avantage du nouveau. C’est d’oublier que le poste de pivot, à Montréal, te demande de porter les 200 pieds tous les soirs, avec les médias qui attendent à la sortie, et les partisans qui convertissent chaque mauvais soir en mise en accusation. Si l’organisation a appris de Drouin, elle le saura : tu donnes des responsabilités, pas une étiquette.

Ce que la vidéo prouve, c’est la base. Posture, synchronisme, transferts, mains proches du corps, regard sur la lame adverse, envie de mordre l’instant. Ce que la vidéo ne dit pas, c’est le quotidien. Les lectures à mi-glace. Les retours dans l’enclave. C’est là que le rôle de centre se gagne ou se perd. C’est là que Dach a fait des pas l’an dernier avant la blessure. Et c’est là que Bolduc doit apprendre, sans qu’on lui accroche un boulet au cou.

Le scénario réaliste? Une alternance. Des chiffres sur le deuxième trio au centre quand la situation le sert. Des séquences à l’aile pour respirer, pour faire mal en entrée de zone, pour utiliser sa coupe vers l’intérieur au moment parfait. Une montée progressive, pas un baptême de feu. Le kid gagne, on lui en donne un peu plus. Il peine, on le protège. Simple, mais juste.

Et oui, le timing est cruel. À Montréal, l’euphorie part vite. On veut la trouvaille qui coûte zéro actif. On veut croire que Kent Hughes a réglé la question du deuxième centre. Peut-être. Peut-être pas. Pour l’instant, la seule preuve tangible n’est pas un tableau de profondeur. C’est un cercle de mise au jeu.

Et sur ce cercle-là, Zachary Bolduc a montré deux choses que ce marché respecte plus que tout : de l’intensité, et la volonté de recommencer.

Alors, cauchemar pour Kirby Dach? Non. Plutôt une bonne nouvelle pour lui : il n’a plus à porter la question tout seul. Et une excellente nouvelle pour Kent Hughes : il a, en interne, un jeune qui semble comprendre que dans cette ligue, les petits détails ne sont pas si petits. Ils sont la porte d’entrée.

À Brossard, une vidéo a suffi pour déclencher le débat.

À Montréal, une saison entière décidera du verdict.

Entre les deux, il y a un cercle de mise au jeu, 30 centimètres de glace, et un choix qu’on fait à chaque sifflet : est-ce que je veux cette rondelle plus que l’autre?

Si Bolduc garde cette réponse-là dans ses mains, le reste suivra. Parce qu’ici, une mise au jeu volée n’est jamais juste une mise au jeu.

C’est un énoncé d’intentions.

Et c’est souvent comme ça que naissent les vrais centres.