Cayden Primeau abandonné: le rêve de Jacob Fowler

Cayden Primeau abandonné: le rêve de Jacob Fowler

Par David Garel le 2025-04-13

Ce cauchemar, Primeau le vit depuis longtemps. Il s’est d’abord fait tasser par Jake Allen.

Puis, à chaque occasion où il aurait pu s’imposer à Montréal, il a flanché. Trop d’hésitations, trop de buts accordés à mauvais moment, trop de performances ordinaires. Il a ensuite été devancé par Jakub Dobeš, qui a profité d’un moment clé pour montrer qu’il était prêt à faire le saut dans la LNH.

Et maintenant, voici Jacob Fowler.

Fowler n’est pas juste un autre jeune prometteur. C’est un phénomène. Une fiche de 25-7-2 dans la NCAA. Une moyenne de 1,63. Un taux d’efficacité de ,940. Une sélection parmi les quatre finalistes au trophée Mike-Richter. Et surtout, une aura, un calme, une capacité à performer dans les grands moments qui rappellent un certain Carey Price.

Et devinez quoi? Il vient de livrer un match parfait contre Syracuse, dans un duel âprement disputé, comme s’il jouait déjà depuis des années dans les rangs professionnels. Pascal Vincent, l’entraîneur-chef du Rocket, ne s’est pas gêné pour le dire.

« J’ai été impressionné par lui. J’ai aimé son calme et sa rapidité. J’avais l’impression que ce n’était pas son premier match. On m’avait dit que c’était un gars qui aimait les moments importants, et j’ai vu ça ce soir. »

Ajoutez à cela le fait que Primeau, dans un geste qui a tout d’une scène de fin, a lui-même ramassé la rondelle pour l’offrir à Fowler après la victoire. Le symbole est trop fort pour qu’on l’ignore. Primeau sait.

Il faut aussi se souvenir que ce même Pascal Vincent avait affirmé, il n’y a pas si longtemps, que Cayden Primeau était « trop dominant chez nous pour que ce ne soit pas un gardien de la LNH ».

« Pour moi, c’est un gardien de la LNH. C’est inimaginable qu’il ne le devienne pas. Il est trop dominant chez nous pour que ce ne soit pas le cas. »

Et pourtant, aujourd’hui, c’est ce même entraîneur qui annonce, sans gêne, que Fowler va jouer d’autres matchs. Et même que « ce n’est pas impossible » qu’il joue en séries.

Le même Vincent qui affirmait que Primeau était son numéro un ouvre maintenant la porte à un partage... ou pire. À une éjection.

C’est ça, le cauchemar de Primeau. Se faire rassurer, se faire flatter, pour ensuite se faire tasser à nouveau. C’est l’histoire de sa carrière. Et maintenant, il ne fait même plus partie du futur.

Car à 25 ans, il n’est ni assez jeune pour incarner l’avenir, ni assez solide pour incarner le présent.

Et pendant que la grogne monte dans le camp Primeau, il faut savoir que Kent Hughes a déjà son plan. Il va soumettre une offre qualificative à Primeau cet été.

Pas parce qu’il croit encore à son potentiel, mais parce qu’il refuse de le perdre pour rien.

Primeau est joueur autonome avec compensation. Et Daniel Brière, le DG des Flyers de Philadelphie, le veut. Primeau est natif de là-bas. Son père Keith est une légende de la franchise. Tout le monde sait que Cayden rêve de revêtir l’uniforme orange et noir.

Mais Hughes ne va pas laisser Primeau filer pour rien. Il va déposer une offre qualificative pour garder ses droits, quitte à négocier un échange ensuite.

Car l’agent de Primeau, lui, ne veut rien d’autre qu’un contrat de la LNH. Pas un two-way. Pas un contrat d’extra dans une organisation où il est clair qu’il ne jouera plus jamais.

Et voilà pourquoi l’étau se resserre. La tension monte. L’agent de Primeau est furieux que son client ait été humilié publiquement, rétrogradé au profit de Dobeš, puis maintenant tassé à Laval par Fowler. C’est l’insulte ultime.

Sur les réseaux sociaux, le Québec ne se cache plus. Fowler est le choix. Comme Price à l’époque. Le gardien calme, méthodique, inébranlable. Celui qui inspire la sérénité.

Primeau n’a jamais eu cette aura. Même à son meilleur, il avait toujours l’air nerveux, instable, incertain. Aujourd’hui, il regarde l’étoile montante s’imposer devant lui, et il sait qu’il ne peut plus lutter.

Fowler est tout simplement en train de prendre le filet, à Laval comme un jour à Montréal. Primeau, lui, va bientôt faire ses valises.

Cayden Primeau a probablement disputé son dernier match significatif dans l’organisation du Canadien. Peut-être commencera-t-il le premier match des séries, question de respect, mais la vérité est déjà écrite : les partisans veulent Fowler, et même Vincent commence à le vouloir aussi.

Primeau, lui, n’a plus rien à espérer à Laval. Il n’est plus qu’un obstacle dans le parcours d’un phénomène. Son avenir est ailleurs. À Philadelphie, peut-être. Mais une chose est certaine : son cauchemar, lui, est bien réel.

Et il porte le nom de Jacob Fowler.

Mais peut-être que le plus cruel dans ce cauchemar pour Cayden Primeau, ce n’est pas le regard froid de l’organisation.

Ce n’est pas Martin St-Louis, ni même Kent Hughes. Ce n’est pas la présence écrasante de Jacob Fowler dans le vestiaire, ou les tapes dans le dos hypocrites. Non. Le plus dur pour Primeau, c’est le regard du public.

Le peuple québécois du hockey l’a abandonné.

Sur les réseaux sociaux, c’est l’hystérie. On ne parle que de Fowler mania. Des montages photos avec Carey Price. Des clips au ralenti de ses arrêts. Des vidéos avec des musiques épiques, comme si Jacob Fowler était déjà la réponse aux prières d’une génération de fans. C’est lui, maintenant, l’enfant prodige.

Et Cayden Primeau, pendant ce temps, regarde ça sur son téléphone. Il est encore à Laval. Encore sur le banc. Encore en train de sourire pour la galerie. Mais son cœur saigne.

Il n’a jamais senti qu’il appartenait vraiment à cette ville. Il a été accueilli avec curiosité, mais jamais avec l’amour réservé aux enfants du pays. Et maintenant qu’un autre jeune gardien est arrivé, c’est comme si on lui disait : « Merci pour les services rendus, mais tu peux partir. »

Le plus grand choc? Ce n’est même pas la direction qui le pousse dehors, c’est le peuple. Les mêmes partisans qui réclamaient qu’on lui donne enfin sa chance, réclament aujourd’hui qu’on ne lui en donne plus aucune.

Ce sentiment de rejet est brutal. Ça rappelle l’époque où un jeune Carey Price était monté avec les Bulldogs de Hamilton en séries, et avait éclipsé Jaroslav Halak pour conduire l’équipe à la Coupe Calder.

C’était exactement ça : l’éclosion d’un prodige, et la fin annoncée d’un autre.

Halak, pourtant, avait tout donné. Mais rien ne pouvait arrêter l’élan d’un Price en mission. Aujourd’hui, c’est Fowler qui incarne ce destin. Il est plus jeune, plus confiant, plus spectaculaire. Il est le prochain.

Primeau, lui, n’est plus « prochain » de rien. Il est l’éternel entre-deux. Trop fort pour la AHL. Trop fragile pour la LNH. Trop tard pour devenir ce qu’on attendait de lui. Et trop tôt pour qu’on lui accorde le pardon.

La suite arrive… et ce sera probablement sans lui.