Commotion à Montréal : Un père de famille battu à mort par la police

Commotion à Montréal : Un père de famille battu à mort par la police

Par André Soueidan le 2025-04-06

Sur hockey30.com, on s’autorise parfois à sortir de la glace pour plonger dans ce qui brûle.

Parce qu’il y a des moments où le silence devient complice, et où même les passionnés de hockey doivent crier plus fort que les commentateurs de salon.

Ce qui s’est passé à Montréal, dans Saint-Michel, il y a un peu plus d’une semaine, n’est pas juste tragique.

C’est révoltant. Et pire encore : c’est en train de disparaître sous un silence organisé, froid, presque calculé.

Le nom d’Abisay Cruz, un homme de 29 ans, père d’un jeune enfant, n’apparaît que brièvement dans les médias traditionnels.

Un article du Journal de Montréal, publié le 1er avril, relate une version minimaliste, alignée mot pour mot avec celle des autorités policières.

Selon ce récit officiel, Cruz était en crise, aurait eu une altercation avec les policiers, aurait subi un malaise, puis aurait été conduit à l’hôpital, où son décès aurait été constaté.

Quelques paragraphes, un brin de vocabulaire administratif, une mention de ses antécédents judiciaires, et le tout est plié.

Aucune contradiction. Aucun doute exprimé. Aucune place laissée à autre chose que la version du SPVM.

Mais sur le terrain, dans le quartier, dans les communautés, une autre version circule. Une version qu’on tente de faire taire.

C’est là que le travail courageux de ONZ MTL entre en jeu.

Alors que les grands médias se défilent, les gars de ONZ MTL ont donné une plateforme à Angelo Prestige, un proche de la famille d’Abisay, qui a accepté de raconter ce qu’il sait, ce qu’on a vu, et surtout ce qu’on tente de faire oublier.

« La personne, elle est morte parce qu’ils l’ont tabassé tellement… ils l’ont pas laissé respirer, ils l’ont pas respecté. Ils ont essayé de faire croire que c’était à l’hôpital, mais la mort était déjà sur la scène. »

On parle ici d’un homme en crise, sur son propre balcon, encerclé par des policiers qui l’auraient plaqué, neutralisé, puis laissé là.

Selon plusieurs témoins, son corps aurait été traîné sans ménagement, sans respect.

Et une femme du voisinage, qui aurait filmé l’intervention, se serait fait demander son téléphone par les policiers pour effacer la vidéo.

« Ils l’ont descendu d’une façon qu’ils ont pas respecté sa dignité. […] La madame qui avait filmé les faits, la police lui a demandé de lui donner son téléphone pour effacer la vidéo. »

Ce qui est en train de se passer à Montréal avec la mort d’Abisay Cruz, c’est peut-être exactement ça : le George Floyd québécois.

Un homme issu d’une minorité, en crise, qui se fait plaquer au sol par plusieurs policiers, incapable de respirer, et qui meurt sous le regard impuissant du voisinage.

Trois agents sur lui. Un genou sur le dos. Des cris. Une panique.

Et ensuite, une tentative de maquiller les faits, de contrôler le récit, d’effacer les preuves, même numériques. La seule différence, c’est qu’ici, la machine médiatique n’a pas suivi.

On a tenté de l’enterrer dès la première heure.

Mais ce qui s’est passé sur ce balcon, sous les yeux de témoins, de téléphones, de proches en pleurs, c’est ni plus ni moins qu’un meurtre public, dans une indifférence institutionnelle glaciale.

Ce n’est pas une bavure. C’est une violence d’État. Et c’est notre responsabilité de ne pas fermer les yeux cette fois.

L’entrevue complète d’Angelo Prestige, livrée avec émotion, lucidité et courage, est disponible ci-dessous.

Elle mérite d’être écoutée en entier, partagée, et prise au sérieux.

Ce n’est pas seulement une intervention policière qui tourne mal.

C’est une tentative d’étouffer l’affaire. D’imposer une seule version. Et surtout, de faire taire ceux qui auraient vu, vécu ou filmé autre chose.

Il y a un mot pour ça : abus de pouvoir.

Et un autre : manipulation.

Des dizaines de personnes se sont rassemblées devant l’immeuble, ont crié « Justice pour Abisay », ont déposé des fleurs, des photos, et leur colère.

Mais les grands médias, eux, ont disparu.

« Ils l’ont laissé mourir comme un chien », a lancé Dan Aguiar, un voisin présent ce soir-là.

Et depuis, presque rien. Pas d’approfondissement. Pas de suivi. Pas d’enquête journalistique sérieuse. Rien.

Pourquoi cette prudence? Pourquoi cette omerta médiatique?

Pourquoi le passé judiciaire d’un homme devrait-il justifier qu’on banalise sa mort, qu’on en minimise les circonstances, qu’on ignore les voix de ceux qui l’ont connu?

Abisay Cruz avait un enfant.

Il avait une mère. Il avait un père. Il avait une communauté.

Et aujourd’hui, il y a une petite fille de neuf ans qui n’aura plus jamais la chance de serrer son papa dans ses bras.

La famille a lancé un GoFundMe pour l’aider à traverser ce deuil aussi brutal qu’injuste.

Et pour soutenir cette fillette qui, du jour au lendemain, s’est retrouvée sans père.

« Ce n’est pas la première fois que ça arrive à Montréal. Freddy Villanueva, on s’en rappelle. Cinq ans d’attente. Aucun coupable. Aucune justice. Là, on a dit : cette fois-ci, ça va pas passer pareil. »

La communauté latine s’est mobilisée, avec calme mais détermination.

Une première marche a eu lieu, suivie d’une vigile. Une deuxième est annoncée ce dimanche, au parc Ovila-Légaré.

Et partout, sur TikTok, Instagram, Snapchat, les témoignages se multiplient.

Mais pendant ce temps, le SPVM garde le silence.

Et les médias traditionnels, eux, se font complices d’une narration unique : celle qui déresponsabilise, qui classe, qui archive.

« Pourquoi il n’y a pas de body cam à Montréal? Pourquoi la police demande à une voisine d’effacer sa vidéo? Pourquoi le Journal de Montréal ne parle que du casier judiciaire et pas de la brutalité? »

Dans une société démocratique, les policiers ne sont pas au-dessus des lois.

Les médias ne sont pas là pour relayer les communiqués sans les questionner.

Et surtout, le public mérite la vérité, même quand elle dérange.

Aujourd’hui, une famille pleure.

Un enfant est orphelin. Et une ville est en train de passer à autre chose trop rapidement.

Pas nous.

Pas ici.

Pas sur hockey30.com.

Nos pensées sont de tout coeur avec la famille...