Congédiement à New York: Patrick Roy vit un cauchemar

Congédiement à New York: Patrick Roy vit un cauchemar

Par David Garel le 2025-04-19

Il y a des journées qui marquent une carrière, et parfois, un destin.

Ce 19 avril 2025 aurait pu être le point tournant d’une rédemption magistrale pour Patrick Roy. Un double tremblement de terre a secoué la LNH : Greg Cronin, entraîneur contesté des Ducks d’Anaheim, a été congédié.

Puis, c’est Peter Laviolette, patron des Rangers de New York, qui a été remercié. Deux bancs libres. Deux situations opposées, mais toutes deux parfaites pour le profil de Roy.

Et pourtant, le grand Patrick est resté enfermé dans sa cellule de Long Island, captif d’un contrat qui le lie aux Islanders jusqu’en 2026.

Pour l’homme de Québec, c’est un cauchemar d’autant plus cruel qu’il voit les portes de ses rêves s’ouvrir sans pouvoir y entrer.

La prison de Long Island. C’est ainsi que plusieurs dans son entourage commencent à appeler sa situation. Un amphithéâtre perdu au fond d’un stationnement, une équipe vieillissante sans éclat ni avenir, une direction générale qui le supporte à peine en surface et qui fulmine dès qu’il s’éloigne de la ligne.

Et pendant ce temps-là, deux bancs s’illuminent : Anaheim, l’équipe la plus excitante à coacher pour les prochaines années, avec Leo Carlsson, Trevor Zegras, Cutter Gauthier, et trois choix de première ronde en 2025.

Et les Rangers, à Manhattan, une vitrine dorée dans un marché mythique. Mais Patrick Roy est attaché au sous-sol d’un manoir en ruine.

Et le pire dans tout ça? Il est là parce qu’il a voulu être loyal.

Lorsqu’il a accepté le poste en janvier dernier, il croyait vraiment pouvoir ranimer une équipe en panne d’âme. Il a insufflé une énergie nouvelle, bousculé les vétérans, donné de la liberté à certains jeunes.

Mais l’illusion n’a duré que quelques semaines. Aujourd’hui, Roy est fatigué. Il a vieilli à vue d’œil. Son teint rougeâtre, ses yeux cernés, sa voix plus cassante, tout montre qu’il est en train de s’épuiser dans un combat sans fin.

Et ce samedi 19 avril, quand il a appris les congédiements à Anaheim et New York, il a compris. C’est maintenant ou jamais. Et ce ne sera pas maintenant.

Personne ne peut contester que Patrick Roy aurait été l’entraîneur parfait pour Anaheim. Cette organisation a tout ce qu’il aime : des jeunes fougueux, un directeur général (Pat Verbeek) qui valorise la structure et l’intensité, et un public affamé de renouveau.

Roy connaît la recette pour développer un prodige comme Carlsson. Il a su transformer Radulov, apprivoiser des gars comme Duclair à Québec, motiver des adolescents à jouer comme des hommes.

Il aurait imposé un cadre à Zegras tout en le laissant s’exprimer. Il aurait transformé cette équipe d’enfant-rois désorganisés en une meute de loups affamés.

Mais Roy est pris. Pris dans un contrat jusqu’en 2026, et jamais il ne demandera à Lou Lamoriello de le libérer. C’est une question d’honneur. Et c’est ce même honneur qui le tue aujourd’hui. Il regarde la Californie à travers les barreaux.

Puis il y a eu le choc : Peter Laviolette, out. Les Rangers cherchent un nouveau chef. Roy aurait pu s’y installer comme un roi. Il connaît le marché, il n’a pas peur de la pression, et il aurait su dompter les stars d’un vestiaire plein de talent.

Imaginez Roy derrière un banc au Madison Square Garden. L’image aurait fait frissonner tout le Québec. Un coach québécois, intense, charismatique, menant la plus grande équipe de la plus grande ville du monde.

À Manhattan, c’est une tout autre réalité. Les Rangers ne sont pas en reconstruction. Ils sont prêts à gagner, maintenant. Tout le monde le sait. Leur alignement regorge de talents : Artemi Panarin, Adam Fox, Igor Shesterkin, Mika Zibanejad… Ce n’est pas une équipe à bâtir, c’est une équipe à réveiller.

Sans oublier les jeunes Alexis Lafrenière, K'Andre Miller et compagnie qui deviendraient en feu avec Patrick Roy qui leur botte le derrière.

Et justement, les Rangers ont sous-performé. C’est exactement là qu’un Patrick Roy aurait été le fit parfait. L’électrochoc. L’homme capable de secouer les égos, d’imposer le respect, de rallumer la flamme sous les patins.

Roy au Madison Square Garden, sur Broadway, dans la ville qui ne dort jamais… c’était écrit dans le ciel. Et pourtant, ça n’arrivera pas. 

Mais non. Roy est enfermé. Il regarde cette opportunité lui glisser entre les doigts, et il sait qu’il ne la reverra jamais. Les Rangers n’attendront pas un an.

Pendant ce temps, il est coincé avec une équipe qui va de plus en plus mal. Brock Nelson a été échangé. Mathew Barzal est blessé. Sorokin est à bout de souffle.

Et il n’y a rien, rien dans la banque d’espoirs. Le club-école est un cimetière. Des joueurs de 31 ans qui marquent un point par match. Roy le sait : les prochaines années seront pires que celle-ci. Et cette saison est déjà une plaie ouverte.

Il en est réduit à s’acharner contre ses propres joueurs. Duclair est rentré à la maison en pleine saison parce que Roy le maltraitait... après l’avoir supplié de le suivre.

Il utilise des méthodes de survie pour éviter la noyade. Mais le bateau coule. Lentement, douloureusement.

Ce contrat qui devait le sécuriser est devenu une chaîne. Trois ans. Trois longues années. Et même si on sent que Lou Lamoriello n’est pas convaincu, il ne le libérera pas.

Pourquoi? Parce qu’ils sont tous pris au piège ensemble. Roy n’est pas en position de force. Il a accepté un contrat pour rester dans la LNH. Il pensait pouvoir rebâtir. Il n’avait pas prévu l’ampleur de la désolation.

Et le plus alarmant, c’est qu’on voit Roy vulnérable. Plus que jamais. Il ne crie plus de la même façon. Il s’effondre dans les points de presse. Il tente des gestes désespérés : retirer son gardien à 12 minutes de la fin, changer ses trios à toutes les présences. Il cherche l’étincelle dans un désert.

Et aujourd'hui, il joue au golf...son équipe éliminée comme une vulgaire paire de chaussettes.

Et pendant ce temps, Martin St-Louis, son rival, celui à qui on a donné le poste à Montréal, est en train de se préparer pour  les séries. Dans une reconstruction. Avec des jeunes. Avec de l’avenir.

Roy, lui, est seul, dans un amphithéâtre sans âme, devant une foule en chute libre, avec une équipe qui n’a rien devant elle.

Ce samedi 19 avril 2025 est le résumé cruel de l’histoire de Patrick Roy. Deux bancs se libèrent. Deux opportunités parfaites. Mais Roy est prisonnier. Prisonnier d’un contrat, d’une équipe sans avenir, d’un vestiaire qui ne répond plus, et d’un directeur général qui ne partage pas sa vision.

Aujourd'hui, Patrick Roy a peut-être compris qu’il ne règnera plus jamais. Pas tant qu’il sera à Long Island. Pas tant qu’il ne sera pas libre.

Et c’est ça, le cauchemar. Pas la défaite. Pas les critiques. Mais l’impossibilité de sortir du tunnel. Alors que la LNH ouvre ses portes, Roy les regarde se refermer devant lui. Le roi est captif.

Et personne ne semble avoir la clé.