Congédiement à TVA Sports: le salaire de José Théodore sur toutes les lèvres

Congédiement à TVA Sports: le salaire de José Théodore sur toutes les lèvres

Par David Garel le 2025-05-10

Il y a des erreurs stratégiques qui marquent une entreprise pour des années.

Des décisions qu’on croyait mineures, mais qui finissent par révéler, avec le temps, l’étendue d’un aveuglement corporatif. 

Dans le cas de TVA Sports, l’un de ces gestes irréparables fut de laisser partir José Théodore, non pas pour des raisons éditoriales, mais parce qu’il osait demander le salaire qu’il méritait.

Car oui, Théo coûte cher. Mais le talent, ça se paye. Et ça, Cogeco l’a compris. TVA Sports, non.

La question à un million de dollars: Théodore est-il le chroniqueur le mieux payé au Québec? À la chronique, à l'heure, cela semble clair comme de l'eau de roche.

Dans les coulisses du milieu médiatique, peu de figures sont aussi respectées – et redoutées – que José Théodore lorsqu’il entre dans une salle de négociation. 

L’ancien gardien étoile n’a jamais perdu son flair, ni sur la glace ni dans les bureaux. Lorsqu’il a décidé de mettre fin à son aventure avec TVA Sports, ce n’était pas pour une question de visibilité ou de format. C’était simple : il savait ce qu’il valait, et TVA n’a pas voulu sortir le chéquier.

Résultat? Le chroniqueur sportif le mieux payé à l’heure au Québec œuvre maintenant pour Cogeco, où on lui a déroulé le tapis rouge… et le compte en banque qui va avec.

Dans un secteur déjà ravagé par les coupures, TVA Sports s’accroche à ses parts de marché comme un boxeur sonné accroché aux câbles. Et pourtant, quand elle avait une perle rare sous contrat, elle l’a laissée filer sans même négocier sérieusement.

Dès son arrivée à TVA Sports en 2014, José Théodore a immédiatement haussé le niveau des analyses. Pas de langue de bois. Pas de copier-coller des feuilles de match. Un regard d’ex-gardien MVP, livré avec humour, honnêteté, et une aisance naturelle derrière la caméra.

Mais voilà. En 2018, à la fin de son contrat, TVA Sports a voulu jouer au plus malin. Les négos ont déraillé. Théodore demandait le double? Le triple? On ne saura jamais. Ce qu’on sait, c’est que la chaîne a préféré le voir partir plutôt que de reconnaître sa valeur réelle.

Certains disent que la fameuse histoire de Carey Price qui ne reconnaît pas José Théodore en entrevue aurait laissé une tache à vie dans les corridors de TVA. Une humiliation devenue virale. Une gêne que les cadres n’auraient jamais digérée.

Un moment particulièrement gênant qui a aussi marqué la relation entre José Théodore et TVA Sports. En 2017, alors que Théodore occupait toujours un rôle important au sein de la chaîne, il a eu l’occasion d’interviewer le célèbre gardien du Canadien dans le cadre d’un segment diffusé à la télévision.

Sauf que le malaise a été immédiat et viral : Carey Price, pourtant l’un de ses successeurs dans le filet du CH, n’a tout simplement pas semblé le reconnaître. 

Le regard vide, le ton détaché, comme s’il parlait à un inconnu. Sur les réseaux sociaux, le clip a tourné en boucle. Certains y ont vu un manque de respect, d’autres une simple distraction.

Mais dans les coulisses de TVA Sports, cet épisode aurait laissé un goût amer. Plusieurs se sont demandé si cet affront involontaire avait contribué à fragiliser la position de Théodore à l’interne.

Comme si la direction, humiliée par l’incident, avait commencé à se distancier d’un de ses collaborateurs les plus précieux.

Mais soyons sérieux : est-ce qu’on congédie un analyste de classe mondiale parce que Carey Price a eu un blanc de mémoire? 

Est-ce que TVA Sports s’est pliée à la susceptibilité de son "actif vedette", au point de couper le micro à une légende du club? Si oui, c’est encore plus pathétique que ce qu’on imaginait.

Pendant que TVA Sports faisait la fine bouche, Cogeco préparait l’embuscade. Le 98,5 FM, en quête de talent brut, n’a pas hésité une seconde. Et aujourd’hui, les résultats sont là :

« Plusieurs matchs ont permis à COGECO de rafler jusqu’à 65 parts de marché à travers le réseau au Québec. Avec des pointes à 70 parts. »

« Il faut souligner que les profits ont cependant été amoindris par le talent de négociateur de José Théodore. Mais comme Théo est le meilleur, le talent, ça se paye. »

— Réjean Tremblay, Punching Grace

Dans une industrie où 15 % de part de marché est considéré comme excellent, Théo et Martin McGuire ont carrément écrasé la concurrence. 

On parle ici d’un raz-de-marée. D’un empire sonore. Et Théodore est au cœur de ce tsunami radiophonique. 

Ce n’est pas un hasard si José Théodore divise. Il est cash, sec, parfois cruel. Il ne vend pas le rêve, il vend la réalité crue.

Mais c’est justement pour ça qu’il est écouté. Parce que dans un paysage saturé de faux débats, Théodore est la vérité qui fesse. 

Il ne cherche pas à plaire. Il cherche à comprendre, puis à trancher. Et en 2024-2025, c’est ce genre de personnalité qui fait exploser les cotes d’écoute.

Depuis plusieurs années, TVA Sports semble incapable de fidéliser ses talents. Louis Jean? Écarté. José Théodore? Jeté comme un extra.

Ce n’est plus une coïncidence. C’est une tendance. Un symptôme d’une direction incapable de valoriser ceux qui font vibrer le public. À force de chercher à payer moins, on finit toujours par avoir… moins.

Pendant ce temps, le show continue.

Et pendant que TVA rame, José Théodore flotte sur un nuage doré en Floride, branché à l’application du 98,5, prêt à dégainer ses analyses. Il n’a plus besoin de la télé. Il est devenu un brand à lui seul. Une voix. Un juge. Un sniper.

Et les commanditaires le savent. Les patrons de Cogeco le savent. Le public le sait.

Seuls les dirigeants de TVA Sports ont dormi au gaz.

Ironiquement, Théodore n’a jamais cherché la revanche. Il ne parle jamais de son départ de TVA Sports. Il ne pleure pas dans les médias. Il fait ce qu’il sait faire : parler hockey comme personne. Et c’est ça, la vraie leçon.

Pendant que certains s’enfoncent dans la médiocrité sous-payée, lui s’est battu pour son prix, et il l’a obtenu. C’est ce qu’on appelle du leadership, même hors glace.

TVA Sports aurait pu le garder. L’élever. Le placer au centre de son dispositif. Mais ils ont préféré faire comme s’il n’existait plus.

Aujourd’hui, c’est José Théodore qui n’a plus besoin d’eux.

Et ça, c’est la plus grande punition que TVA Sports pouvait s’infliger… toute seule.