Controverse à Montréal: le coach des Blue Jackets se sent trahi

Controverse à Montréal: le coach des Blue Jackets se sent trahi

Par Marc-André Dubois le 2025-04-16

Mercredi soir au Centre Bell, ce qui devait être un moment de pur hockey s’est transformé en farce sportive pour certains et en cauchemar pour d’autres.

Non pas pour les partisans du Canadien qui étaient en liesse à l’idée de voir leur équipe se qualifier pour les séries avec une simple victoire ou même un point… mais pour les Blue Jackets de Columbus, laissés pour compte dans un scandale qui fait grincer des dents partout dans la LNH.

La raison? Les Hurricanes de la Caroline ont tout simplement envoyé une équipe B, voire C, à Montréal. Une formation digne de la Ligue américaine. Un affront à l’éthique sportive. Un abandon du respect envers la compétition.

Et à Columbus, on est furieux.

Dean Evason, entraîneur-chef des Blue Jackets, a été cinglant. Selon lui, la LNH devrait obliger toutes les équipes à présenter un minimum de joueurs réguliers dans les derniers matchs de la saison, surtout quand des places en séries sont en jeu.

« C’est une question de respect envers la ligue, envers la course aux séries et surtout envers les partisans. Tu peux donner du repos, mais pas aligner une équipe qui n’a rien à voir avec le calibre de la LNH », aurait-il lâché dans l’entourage de l’organisation, selon plusieurs murmures qui circulent en Ohio.

Evason sait que son équipe devait gagner ses deux derniers matchs en temps réglementaire pour espérer doubler le Canadien… mais il espérait au moins que le CH affronte un adversaire légitime. Ce n’est clairement pas le cas ce soir.

Slavin? Absent.

Aho? Absent.

Jarvis? Absent.

Martinook, Staal, Chatfield? Tous absents.

Skyler Brind’Amour, fils de l’entraîneur, disputera son premier match. Domenick Fensore aussi. Bradly Nadeau jouera son deuxième match en carrière.

Kotkaniemi pilotera le premier trio. Il va avoir sa motivation, lui qui avait fui Montréal en quête de responsabilité.

Bref, la Caroline n’est pas venue pour gagner. Elle est venue pour ne pas se blesser. Et ça, ça fait rager les Blue Jackets, mais aussi plusieurs fans de hockey qui dénoncent déjà le système.

La LNH ne dira rien. Elle ne dira jamais rien. Gary Bettman préfère le statu quo, même lorsque celui-ci coûte cher à la crédibilité du calendrier.

Ce n’est pas la première fois qu’on voit une équipe envoyer ses réservistes à la fin de l’année, mais rarement avec un enjeu aussi criant : une place en séries.

Columbus joue sa vie pendant que Montréal affronte des remplaçants. Il y a une ligne quelque part entre la gestion prudente et l’insulte sportive. Les Hurricanes l’ont clairement franchie.

Pendant ce temps, à Montréal, c’est l’effervescence. Le CH n’a besoin que d’un point pour accéder aux séries, mais personne ne veut se contenter du minimum. L’équipe veut gagner. Et les partisans le veulent encore plus.

Et c’est dans cette ambiance électrique que Martin St-Louis est appelé à prendre les bonnes décisions. Ou à s’écrouler sous la pression.

Parce que cette saison, aussi brillante soit-elle par moments, a été remplie de polémiques. Et la plus récente, c’est son refus obstiné de confier à Ivan Demidov un rôle à la hauteur de son talent.

Malgré les critiques, malgré la performance éblouissante du jeune Demidov lundi soir (un but, une passe, plusieurs feintes à couper le souffle), Martin St-Louis a refusé de le placer sur la première unité d’avantage numérique.

Et quand on lui a posé la question, il a répondu, froidement : « Je suis le coach, je fais ce que je veux. »

Un ton autoritaire, presque enfantin. Un « c’est moi qui décide » digne d’une chicane de cour de récréation. Et c’est justement ce genre d’attitude qui commence à irriter. Car ce soir, ce n’est pas une question d’égo, c’est une question de survie.

À Montréal, toute la presse s’interroge. Toute la province observe. Tout le monde a vu que dès que Demidov a été jumelé à Patrik Laine au dernier match, la magie s’est éteinte.

La chimie de Demidov avec Newhook et Armia était inattendue… mais elle fonctionnait. Pourtant, après la crise de colère de Laine — qui a littéralement exigé de rejouer avec Demidov — Martin St-Louis a cédé.

Et aujourd’hui, c’est ce même Laine qui se retrouve à nouveau sur l’aile droite du trio avec Demidov. Un cadeau au vétéran? Une soumission du coach? Ou une simple erreur stratégique?

Qu’importe. Le mal est fait. La majorité des fans souhaitait voir Demidov sur le premier trio, ou du moins protégé par des joueurs capables de garder la rondelle. Pas un ailier en perte de vitesse qui la perd à chaque entrée de zone.

Mais au-delà de la frustration légitime des partisans, il faut aussi prendre un instant pour reconnaître l’ampleur de l’œuvre de Martin St-Louis.

En trois ans, il a pris une équipe en ruines, une organisation éclatée, et il l’a ramenée aux portes des séries. Ce n’est pas rien.

Il a traversé les critiques, les blessures, les attentes irréalistes… et aujourd’hui, il est à un match de la consécration. S’il réussit ce soir, il mérite pleinement d’être considéré pour le trophée Jack Adams.

Et surtout, il l’a fait avec cœur. Avec des principes. Avec une philosophie qui ne cède pas au chaos. Lors de son point de presse émotif d’avant-match, St-Louis a livré un message fort :

« On ne veut pas quitter ce match avec des regrets. On n’aura pas l’occasion de recommencer, alors il faut tout laisser sur la glace. »

Parce que ce soir, c’est aussi notre maison collective, le Centre Bell, qui risque de trembler sous le poids du stress.

Mais St-Louis a tenu à recentrer tout le monde. Il a répété à ses joueurs que c’était exactement pour ce genre de moment qu’on joue au hockey.

Pour ressentir l’urgence. Pour vivre l’émotion brute d’un match qui peut changer une saison entière.

« C’est la raison pour laquelle on joue. Peu importe l’issue de la rencontre, on va s’en rappeler pour le restant de nos jours. »

Il a même ajouté, le regard fier :

« Je ne m’ennuie pas de jouer au hockey, mais des matchs comme aujourd’hui, ça me manque. »

Ce soir, peu importe ses décisions louches, on ne pourra jamais enlever à Martin St-Louis cette capacité unique à rallier son groupe dans l’adversité. Et si son instinct le trahit parfois sur le plan tactique, il ne faut jamais douter de son humanité et de son intégrité.

Les joueurs, eux, savent ce que ce match représente. Kaiden Guhle a résumé la chose sans détour :

« On ne veut pas quitter ce match avec des regrets. On n’aura pas l’occasion de recommencer. »

Alexandre Carrier, l’un des nouveaux venus, l’a dit avec émotion :

« Si on m’avait dit ça en décembre, j’aurais mis de l’argent pour qu’on soit dans cette situation. »

Et Emil Heineman, de retour dans l’alignement, veut faire sa part.

« On s’est battus toute l’année pour être là. »

Même Martin St-Louis a laissé transparaître son stress, tout en affirmant que c'est normal.

Il joue sa saison ce soir. Il joue son crédit. Il joue sa crédibilité.

Et au milieu de cette tempête, Ivan Demidov continue de briller. Il ne parle pas beaucoup. Il laisse son bâton parler. Trois tirs lundi soir. Un but. Une passe. Des milliers de cœurs conquis. Des partisans qui scandaient son nom dès sa première présence.

Espérons que ça enflamme l'équipe au lieu de la figer, comme ce fut le cas avec Juraj Slafkovsky, qui semble affecté par l'arrivée du Russe tellement il a peur de perdre sa place.

Et si le CH échappe ce match? Et si Columbus gagne jeudi? Martin St-Louis pourra-t-il regarder les partisans dans les yeux? Pourra-t-il dire, sans mentir, qu’il a utilisé toutes ses cartes?

Ce soir, Montréal va retenir son souffle. Non pas parce que l’adversaire est dangereux. Non. Parce que la peur de l’échec est immense. Parce que l’occasion est parfaite. Parce qu’on veut voir l’histoire s’écrire. Parce qu’on veut voir Demidov faire basculer un match, une saison, une ville.

Mais ce rêve pourrait s’effondrer. À cause d’un coach têtu. À cause d’une ligue complaisante. À cause d’une adversité artificielle.

À Columbus, on hurle à l’injustice. À Montréal, on prie pour ne pas se faire voler notre moment.

Et dans le bureau de Martin St-Louis, on espère. On espère que ce soir, les bonnes décisions seront prises. Car demain, il sera trop tard pour les regrets.