C’est une vraie bombe que vient de larguer Jonathan Bernier du Journal de Montréal : Ivan Demidov sera non seulement sur le deuxième trio du Canadien aux côtés de Kirby Dach et Patrik Laine, mais il aura aussi une place assurée sur la première unité de l’avantage numérique.
Le genre d’information qui secoue tout le camp du Canadien de Montréal à quelque jours du tournoi de golf du CH et qui change les plans… pour tout le monde.
Voici la phrase qui a enflammé Montréal:
« Des 26 joueurs invités au camp des recrues du Canadien, 25 tenteront de prouver à l’état-major de l’organisation qu’ils méritent une place au sein de l’équipe. L’autre s’appelle Ivan Demidov et connaît déjà son sort. L’attaquant russe de 19 ans occupera le flanc droit du deuxième trio et patrouillera un poste sur la première vague de l’attaque massive. »
Et une question s’impose immédiatement : qui va écoper?
La réponse qui fait le plus mal, c’est Juraj Slafkovsky. Depuis plusieurs mois, Slaf s’entraîne sans relâche, de la Slovaquie à Brossard, répétant inlassablement ses one-timers dans l’espoir de conserver sa place sur la première unité du power play.
Il avait enfin trouvé une zone de confort dans ce rôle, posté dans le cercle droit, là où il peut décocher son tir.
C’était devenu son “bureau”. Il s’est battu pour l'obtenir cet été. Et voilà que Demidov arrive avec son flair, ses mains de magicien et son instinct d’élite, et il le déloge… avant même le début du vrai camp?
Le message envoyé à Slafkovsky est brutal : tu as peut-être été le premier choix au total en 2022, mais on a un bijou russe plus complet que toi, et lui, il commence directement en haut.
Mais cette décision, rendue publique dans les pages du Journal de Montréal, met également une pression énorme sur Martin St-Louis.
D’où provient cette fuite? Est-ce que le journaliste Jonathan Bernier a obtenu cette information directement de St-Louis ou de son entourage? Si oui, c’est que l’organisation a volontairement voulu envoyer un message clair : le temps du développement progressif est terminé.
Le Canadien n’est plus en reconstruction. Ivan Demidov ne fera pas ses classes lentement. Il arrive comme une vedette. Point.
Et ça, c’est Martin St-Louis qui devra en porter le poids. S’il donne ce rôle à Demidov et que le jeune flanche, les critiques ne tarderont pas à pleuvoir.
Car il y a une énorme différence entre dominer au tournoi des recrues contre les espoirs des Jets ou des Leafs, et produire sous pression en octobre contre des vétérans de la LNH.
Pascal Vincent, entraîneur du Rocket, a tenté de relativiser l’impact en évoquant l’exemple de Lane Hutson l’an dernier.
Lui aussi avait participé au camp des recrues, et bien que spectaculaire, il n’avait pas nécessairement dominé. Ce n’est que dans les matchs avec les pros qu’il avait montré à quel point il était spécial. C’est peut-être aussi le pari fait avec Demidov : ses flashs seront visibles au bon moment.
Mais la différence, c’est que Hutson a dû attendre son tour. Il a attendu avril pour jouer son premier match. Demidov, lui, est propulsé directement sur l’avantage numérique, là où les joueurs sont censés être les plus créatifs et décisifs.
Mathias Brunet l’avait bien résumé dans La Presse : le Canadien est passé du club qui lançait quatorze recrues en 2022-2023, à une organisation qui n’en fera jouer presque aucune cette année. Il y a trop de joueurs avec des contrats garantis, et Demidov a volé le dernier siège disponible… avec style.
Il faut dire que le top 12 du Canadien est déjà complet. Entre Suzuki, Caufield, Slafkovský, Laine, Dach, Newhook, Gallagher, Anderson, Evans, Bolduc, Veleno et maintenant Demidov, on atteint douze attaquants confirmés. Ajouter à cela Samuel Blais comme plombie réserviste et la marge devient inexistante.
Et quand on regarde les unités de jeu de puissance potentielles, la première pourrait ressembler à ceci :
Nick Suzuki
Cole Caufield
Ivan Demidov
Lane Hutson
Patrik Laine
C’est une formation terrifiante sur papier, mais cela signifie que Slafkovský, Bolduc et Dach devront attendre leur tour avec Noah Dobson sur la 2e unité. À moins que Renaud Lavoie ait raison et que Dobson soit sur la première unité et Hutson sur la 2e. Mais personne n'y croit.
Une annonce planifiée?
Le fait que cette annonce sorte via Jonathan Bernier et non via une conférence de presse ou un point de presse de l’équipe soulève aussi des questions.
Est-ce que cette fuite était planifiée par l’état-major? Est-ce que Kent Hughes et Jeff Gorton cherchent à sécuriser psychologiquement Demidov en lui montrant dès maintenant qu’il est un joueur-clé? Ou au contraire, est-ce une façon de tester la réaction du vestiaire et de la base partisane?
Ou est-ce seulement l'opinion d'un journaliste qui fait comme s'il avait une info exclusive?
Dans tous les cas, c’est un pari risqué.
Avec autant d’attentes, Ivan Demidov devra livrer la marchandise dès les premières semaines. Il n’aura pas le droit à une séquence de dix matchs sans produire, comme l’a vécu Slafkovský à ses débuts. Il ne sera pas protégé. Il sera jugé comme un vétéran.
Et c’est aussi là que l’on voit le poids du narratif : quand Bernier écrit que Demidov est le seul des 26 joueurs au camp des recrues qui n’a rien à prouver, il vient de définir toute la saison du jeune russe. Le Canadien le traite déjà comme une star. À lui maintenant de le prouver.
Ce n’est pas qu’une bombe tactique. C’est un changement de scénario. Pour la première fois depuis le début de la reconstruction, le CH traite une recrue comme un joueur d’élite avant même qu’il ait disputé un seul match régulier. Fini les précautions. Fini le développement patient. Avec Ivan Demidov, Montréal parie gros. Et mise tout.
Et pour Juraj Slafkovský, cette décision vient de leur faire comprendre une chose :
L’ère Demidov ne fait que commencer. Et elle ne laissera personne indemne.