Course effrayante en Uber: Samuel Blais nous donne la chair de poule

Course effrayante en Uber: Samuel Blais nous donne la chair de poule

Par David Garel le 2025-12-22

Samuel Blais a vécu, en quarante-huit heures, une séquence qui résume à elle seule ce qu’est devenue la vie d’un joueur de profondeur dans la LNH moderne : imprévisible, brutale, parfois absurde… mais aussi profondément émouvante quand on prend le temps de la raconter.

De quoi donner la chair de poule.

Samedi, Blais n’était pas dans un hôtel cinq étoiles ni dans un avion nolisé de la Ligue nationale. Il revenait de Cleveland avec le Rocket de Laval, fatigué mais productif, lui qui empilait les points depuis le début de la saison dans la Ligue américaine.

Le téléphone a sonné alors que la fin de semaine semblait déjà écrite. À l’autre bout du fil, Pascal Vincent. Le Canadien venait de le rappeler. Il devait rejoindre l’équipe immédiatement pour le match du lendemain soir à Pittsburgh. La machine s’était remise en marche.

Ce qui a suivi tient presque de la scène de film dogne d'Hollywood. L’autobus du Rocket l’a laissé à Erie, en Pennsylvanie, comme on dépose un sac au bord de la route.

Pas de glamour, pas de mise en scène. De là, un Uber. Deux heures de route vers Pittsburgh, avec un chauffeur qu’il ne connaît pas, direction un vestiaire où il n’était pas certain d’avoir une place il y a encore quelques jours.

Imaginez combien le Uber à coûté. Heureusement pour lui, c'est Geoff Molson qui a payé.

Quand Samuel Blais raconte la scène au journaliste Richard Labbé, il en rit presque. Il ne sait pas combien la course a coûté, il sait seulement qu’il fallait y être. Et il y était.

Cette fameuse "ride" en Uber est devenue virale parce qu’elle dit tout. Elle raconte une saison faite de détours imprévus, de décisions qui tombent sans avertissement, de bagages qu’on ne défait jamais complètement.

Embauché par le Canadiens de Montréal le 1er juillet pour 775 000 dollars, Blais arrivait au camp avec l’espoir raisonnable de se tailler un rôle précis, celui du joueur honnête, physique, capable de stabiliser un bas de formation.

Quelques semaines plus tard, il était soumis au ballottage. Réclamé par les Maple Leafs de Toronto, il a joué, contribué et fait sa job.

Huit matchs. Trois points. Rien de honteux. Mais à Toronto, la profondeur est un luxe cruel. Quand vient le temps de libérer une place, ce sont rarement les stars qui paient le prix.

Fin novembre, le couperet retombe. Ballottage à nouveau. Cette fois, le Canadien le rapatrie. Laval devient son point d’ancrage. Et là, Blais répond comme le guerrier qu’il est depuis toujours : neuf points en neuf matchs avec le Rocket de Laval, de l’impact physique, de l’énergie, du leadership discret. Il ne se plaint pas. Il ne dramatise pas. Il joue sans se poser de questions.

Puis, soudainement, Pittsburgh. Le rappel. La course contre la montre. L’Uber. Et le lendemain soir, sur la glace face aux Penguins de Pittsburgh, Samuel Blais récolte une aide. Son premier point avec le Canadien.

Un détail, diront certains. Pour lui, c’est énorme. Parce qu’il sait ce que ça représente. Parce qu’il sait d’où il arrive. Parce qu’il sait que chaque présence est peut-être temporaire.

Ce qui frappe dans ses propos, rapportés par Labbé, c’est l’absence totale d’amertume. Blais ne parle pas comme un joueur aigri par le système.

Il parle comme un homme conscient de la réalité du métier. Il reconnaît que Toronto lui a donné une chance. Il reconnaît que la concurrence était féroce. Il répète qu’il est simplement heureux d’être là. Heureux de porter le chandail du club de son enfance. Heureux d’avoir encore une opportunité, même si elle arrive dans un Uber, au milieu de la Pennsylvanie, entre deux villes sans éclat.

Quand on additionne les kilomètres, les formations, les niveaux, on arrive à un chiffre qui donne le vertige : neuf équipes différentes, LNH et LAH confondues, depuis ses débuts professionnels.

Peu de joueurs traversent autant de vestiaires sans se perdre. Blais, lui, s’accroche. Il comprend son rôle. Il comprend que sa valeur ne se mesure pas seulement en buts, mais en fiabilité, en capacité d’absorber les coups, au sens propre comme au figuré.

Son histoire donne effectivement des frissons parce qu’elle rappelle une vérité que l’on oublie trop souvent : pour chaque superstar qui voyage en jet privé, il y a des dizaines de joueurs comme Samuel Blais, toujours prêts à partir, toujours prêts à s’adapter, toujours à un appel près de disparaître de l’écran radar.

Et pourtant, ce sont souvent eux qui tiennent les organisations debout quand la saison s’étire, quand les blessures s’accumulent, quand l’énergie baisse.

Cette fin de semaine, Samuel Blais n’a pas seulement vécu un rappel. Il a vécu une reconnaissance silencieuse.

Celle d’un joueur qui refuse de lâcher, qui accepte le chaos comme vie, et qui transforme une ride d’Uber en symbole de persévérance.

Dans une ligue qui ne fait aucun cadeau, il continue d’avancer, sac sur l’épaule, casque à la main, prêt à embarquer dans le prochain véhicule, peu importe lequel, tant qu’il mène à une patinoire.

Quel guerrier...