C’est le genre de nouvelle qui aurait dû provoquer une alerte rouge à l’hôtel de ville : le Grand Prix du Canada est en danger de disparaître.
Le Journal de Montréal l’a confirmé aujourd'hui et les informations de François-David Rouleau ne laissent aucune place au doute : le processus de renouvellement du contrat avec la Formule 1 est au point mort. Et si l’édition 2025 ne se déroule pas de façon exemplaire, c’est la fin d’un demi-siècle d’histoire qui nous pend au nez.
Pendant que des villes du monde entier signent à long terme avec Liberty Media — la maison-mère de la F1 — Montréal patauge.
La FOWC (Formula One World Championship), qui gère les droits commerciaux de la F1, n’a toujours rien reçu de concret de la part du promoteur Octane (Bell) ni de la Ville.
Un statu quo inquiétant, d’autant plus que l’on parle ici d’un événement qui coûte 22 M$ en fonds publics chaque année, mais qui en rapporte des centaines de millions à l’économie montréalaise.
Et pourquoi ce silence radio ? Parce que Valérie Plante et son administration sont devenues synonymes de fiasco logistique, de rigidité idéologique et d’amateurisme opérationnel.
Ce n’est plus seulement une question d’infrastructures vieillissantes, mais de volonté politique absente, voire nuisible.
Le patron de la F1, Stefano Domenicali, a personnellement présenté ses excuses aux écuries après la catastrophe organisationnelle de l’année dernière. Et ce n’est pas rien. Voici ce qui s’est passé sous l’œil médusé du monde entier :
Fermeture illogique du circuit par la STM, quelques heures avant la première séance d’essais libres.
Accès bloqué aux spectateurs et aux membres des équipes, faute de coordination avec le SPVM.
Paddocks inondés, stationnements boueux, loges VIP prises en flagrant délit de fuite d’eau.
Spectateurs sur la piste après la course, un manquement de sécurité gravissime.
Terrasses fermées au centre-ville, en plein week-end du Grand Prix, à cause d’inspections surprises du Service de sécurité incendie de Montréal.
Six de ces erreurs sont directement attribuables à la Ville de Montréal. Et aucune n’a été corrigée de manière crédible à ce jour.
Pendant que Montréal s’enfonce dans le ridicule, la F1 regarde vers l’avenir. Et cet avenir pourrait bien s’écrire ailleurs.
Comme le rapportait récemment l’AFP, l’Afrique du Sud est en très bonne position pour accueillir une course dès 2027. Deux projets sont en compétition : le circuit urbain du Cap et l’historique Kyalami à Johannesburg. Et les discussions avancent rapidement.
Le ministre des Sports sud-africain, Gayton McKenzie, a affirmé qu’il n’y avait “aucun doute” que la F1 serait chez eux en 2027.
Lewis Hamilton lui-même en est un fervent défenseur. Pendant ce temps, la Formule 1 négocie aussi avec la Thaïlande et l’Argentine. Autant dire que si Montréal échoue en 2025, il y a une file d’attente pour prendre sa place.
Non, la Formule 1 ne manque pas de prétendants pour combler le vide que laisserait Montréal si elle venait à être rayée du calendrier.
Outre l’Afrique du Sud, qui est désormais en pôle position pour un retour en grande pompe, la Thaïlande multiplie les démarches auprès de Liberty Media pour organiser un Grand Prix nocturne à Bangkok, en plein cœur de la capitale.
Le gouvernement thaïlandais aurait même déjà identifié un tracé semi-urbain autour du parc Lumpini, inspiré du succès retentissant du Grand Prix de Singapour.
La proposition thaïlandaise coche toutes les cases : ambiance exotique, fuseau horaire stratégique pour la télévision européenne, et surtout, un appui financier massif de l’État.
L’Argentine, quant à elle, veut ressusciter le circuit d’Autódromo Juan y Oscar Gálvez à Buenos Aires, qui a accueilli la F1 jusqu’en 1998.
L’économie argentine étant en pleine restructuration sous l’administration Milei, des investisseurs privés lorgnent le projet comme une vitrine idéale pour le retour du pays sur la scène internationale. Le lobbying est actif, les démarches progressent, et la FIA regarde ce dossier avec beaucoup d’intérêt.
Pendant ce temps, Bell, propriétaire d’Octane Racing Group et principal bailleur du Grand Prix de Montréal, est en furie contre la Ville.
Derrière les portes closes, les dirigeants de Bell ne cachent plus leur frustration face aux ratés organisationnels répétés.
Et s’ils défendent encore publiquement l’événement à Montréal, ils n’ont jamais fermé la porte à un déménagement stratégique à Toronto, advenant une rupture entre la Formule 1 et la métropole québécoise.
Pour Bell, l’enjeu n’est pas uniquement Montréal, mais le maintien du Grand Prix au Canada à tout prix. Si cela signifie le faire migrer vers une ville plus stable, plus "big", mieux gérée et alignée avec les exigences du circuit mondial, Toronto deviendrait l’option de rechange la plus naturelle.
Pire encore : même l’entente actuelle, qui devait courir jusqu’en 2031, semble avoir été discrètement réouverte. L’édition 2026 a été déplacée au mois de mai, soi-disant pour des raisons écologiques.
Mais ce changement de date, présenté comme anodin, est un signal clair que la F1 garde toutes les cartes en main. Montréal n’impose plus rien. Elle subit.
La Société du parc Jean-Drapeau, responsable des installations du circuit, a même engagé le cabinet d’avocats Lavery, De Billy dans un mandat à 40 000 $ autour des “ententes GPF1”, refusant de dévoiler les détails sous prétexte de “secrets commerciaux”.
Autrement dit : les négociations sont tendues, opaques, et rien ne garantit que Montréal sera encore sur la grille en 2032.
Selon Le Journal, Bell, qui possède le promoteur Octane, aimerait prolonger le contrat jusqu’en 2035. Elle veut sauver ce joyau qu’elle contrôle, et qui attire des millions de téléspectateurs sur ses ondes chaque année.
Mais comment négocier un contrat solide avec Liberty Media quand la Ville elle-même multiplie les erreurs et les affronts ?
On le voit clairement : le problème, ce n’est pas l’argent. C’est Valérie Plante.
Son administration est perçue à Londres comme hostile à la F1. Elle a toujours affiché une posture idéologique antivoiture, antiévénement, antiéconomie. Et maintenant, le résultat est là : la Formule 1 ne fait plus confiance à Montréal. Le test de 2025 sera son dernier examen. Et si la Ville échoue, le verdict tombera comme une guillotine.
Si Montréal perd le Grand Prix, ce ne sera pas la faute de Bell, ni d’Octane, ni même de la F1. Ce sera la faute d’une administration municipale qui a manqué de vision, de professionnalisme et de respect pour un des rares joyaux mondiaux que la ville possède encore.
Valérie Plante quittera la mairie en 2025. Mais elle laissera derrière elle un champ de ruines. Le Grand Prix, qui rapporte plus de 63 millions $ en retombées directes par année, est en train de lui filer entre les doigts.
Et Montréal, déjà privée de son équipe de baseball, de grands concerts et de compétitions internationales majeures, n’aura plus rien.
Le départ du Grand Prix ne sera pas seulement la fin d’un événement. Ce sera la fin d’un rêve collectif.
Et lorsque les moteurs rugiront ailleurs, sous le soleil de Kyalami ou de Bangkok, les Montréalais se souviendront d’une seule chose : c’est sous Valérie Plante que le moteur a calé.