Le cœur brisé d’Arber Xhekaj... donne mal au coeur...
C’est maintenant confirmé : Arber ne jouera pas en séries. Et ce n’est pas un oubli. Ce n’est pas une rotation. Ce n’est pas un ajustement tactique temporaire. C’est une mise à l’écart volontaire, assumée, brutale.
C’est un message.
Le message d’un entraîneur-chef, Martin St-Louis, qui refuse de céder à la pression populaire. Qui refuse même d’écouter la logique la plus élémentaire, celle qui crie haut et fort qu’on aura besoin d’un homme comme Arber Xhekaj pour affronter un monstre comme Tom Wilson.
Mais non. Même face aux Capitals de Washington. Même face à une équipe qui fait de l’intimidation une stratégie de série. Même là, Martin St-Louis préfère laisser Xhekaj dans les gradins.
Et pendant que toute une province demande des explications, pendant que même les médias de Washington s’étonnent de son absence, Arber Xhekaj encaisse. Silencieusement. Douloureusement.
Il vit un cauchemar éveillé. Il voit son rêve de faire les séries avec le CH s’envoler. Il voit que son temps à Montréal est compté. Et surtout, il comprend que son entraîneur ne croit plus en lui.
Ce n’est pas seulement une décision sportive. C’est une rupture.
Depuis le début de la saison, la relation entre St-Louis et Xhekaj est tendue. Le coach a toujours tenu à le remettre à sa place, à le redéfinir, à l’arracher à son image de “Shérif”.
Il a nié son surnom publiquement. Il a refusé d’assister à son lancement de burger. Il l’a rétrogradé, écarté, réprimandé. Il l’a remodelé à sa façon. Mais malgré tous ces efforts, il semble n’avoir jamais réussi à aimer ce joueur.
Xhekaj, lui, a essayé. Il a arrêté de se battre à tout bout de champ. Il a travaillé sa discipline. Il a réduit son temps au banc des punitions.
Il s’est effacé pour s’adapter. Mais ce n’était pas assez. Car pour St-Louis, Arber Xhekaj est devenu un symbole de ce qu’il veut éliminer : l’individualisme, l’exubérance, les distractions.
Et pourtant, s’il y a un moment dans l’année où un gars comme Xhekaj devient essentiel, c’est maintenant.
Le message envoyé par St-Louis est clair : il ne veut pas de lui. Il pense qu’il est inutile. Il pense qu’il est une menace pour la stabilité de l’équipe. Il pense qu’il n’est pas un joueur de séries.
C’est une honte.
Parce que dans l’ombre de cette exclusion, il y a un autre drame qui se joue : celui du frère.
Florian Xhekaj, petit frère d’Arber, vient de marquer son 23e but avec le Rocket de Laval. Il est en feu. Tout le monde s’accorde à dire qu’il est déjà NHL-ready.
Il incarne tout ce que Martin St-Louis aime : combativité, sérieux, simplicité. Et il ne fait pas d’ombre. Il ne vend pas de burgers. Il n’a pas de surnom. Il ne brille pas plus que le groupe.
La différence est sans pitiél. Florian monte pendant qu’Arber tombe. Et ce n’est pas seulement une chute sportive. C’est une fracture émotionnelle.
Deux frères qui rêvaient de porter le même chandail, dans le même vestiaire. Deux frères qui se sont battus ensemble dans la rue, dans leur cour arrière, dans les ligues mineures, pour en arriver là.
Et maintenant, l’un est sur le bord de percer, pendant que l’autre est poussé vers la sortie.
Tout le monde dans la ligue le voit. Les rumeurs de transaction explosent. Les Flyers de Philadelphie veulent Arber Xhekaj. Daniel Brière ne s’en cache même plus. Il adore ce type de joueur. Il a besoin de robustesse. Et il sait qu’à Montréal, Xhekaj est devenu indésirable.
D’autres équipes s’informent. Anaheim regarde. San Jose a reculé, maintenant que Vincent Desharnais est arrivé. Mais le marché est là. Il y aura des appels. Et Kent Hughes le sait.
Ce n’est même plus une question de “si”. C’est une question de “quand”.
Et ce qui est encore plus cinglant, c’est que même l’idée d’utiliser Xhekaj comme attaquant – une idée relayée par certains analystes – est rejetée du revers de la main par St-Louis.
Pourquoi? Parce qu’il ne veut pas céder. Xhekaj est dans sa niche... pour l'éternité...
Mais pourquoi autant d’acharnement?
C’est là que plusieurs commencent à parler d’ego. D’un besoin viscéral de contrôle. De rappeler à tous que c’est lui le boss. Que personne, pas même un joueur populaire, ne pourra lui dicter ses décisions.
Et c’est là qu’on revient à la gestion d’Ivan Demidov.
Parce qu’elle aussi fait grincer des dents.
Demidov a été sensationnel dès sa première présence. Un but, une passe, des jeux électrisants. Et pourtant, Martin St-Louis a refusé de le placer sur le premier trio.
Il a refusé de le mettre sur la première unité d’avantage numérique. Il continue de la garder dans une position secondaire, alors qu’il éclabousse tout le monde par son talent.
Pourquoi?
Certains croient que St-Louis est irrité par toute l’attention médiatique autour du jeune russe. Que ça nuit à son fameux “esprit d’équipe”. Que ça met l’accent sur l’individu. Et que ça remet en question son autorité.
La même histoire que pour Xhekaj.
Quand un joueur devient trop gros, trop populaire, trop indépendant… il devient un problème pour St-Louis. Parce que St-Louis veut que le système passe avant les hommes. Parce qu’il veut garder le contrôle du narratif.
Mais en agissant ainsi, il crée l’inverse. Il engendre de la frustration, du ressentiment, de l’incompréhension.
Et au passage, il sacrifie des éléments précieux.
Xhekaj est fatigué. Il est émotivement vidé. Il regarde ça des gradins et se dit qu'il sera échangé cet été.
Silencieux.
Brisé.
Même les médias de Washington s’étonnent de son absence. Ils s’attendaient à une guerre de tranchées. Ils se demandaient comment le Canadien allait répondre à Tom Wilson. Et ils ont vite compris : il n’y aura pas de réponse.
Le Shérif est en prison.
Et il n’y aura personne pour faire respecter la loi.
C’est là que Martin St-Louis a franchi un point de non-retour. Parce que cette décision, il va devoir la défendre. Jusqu’au bout. Même si elle coûte un match. Même si elle coûte une série. Même si elle coûte un joueur.
Mais à quel prix?
Le cœur d’Arber Xhekaj ne se répare pas en un été. Ce n’est pas seulement une saison qui s’éteint. C’est une identité qui est bafouée. Une loyauté qui est trahie.
Et tout ça, parce qu’un entraîneur veut envoyer un message.
Il l’a envoyé.
Et c’est tout le Québec qui l’a entendu.