Frissons dans la chambre: Martin St-Louis livre un discours à Arber Xhekaj

Frissons dans la chambre: Martin St-Louis livre un discours à Arber Xhekaj

Par David Garel le 2025-08-22

Il y a des discours qui marquent une génération. Des mots simples, mais cinglants.

Des phrases qui transpercent la peau, qui collent à l’âme. Dans la deuxième saison de la série La Reconstruction, diffusée sur Crave, Martin St-Louis a livré un monologue si chargé d’émotion, si brutalement honnête, qu’on aurait dit une lettre ouverte. Pas aux partisans. Pas aux journalistes. Mais à un seul joueur : Arber Xhekaj.

Et dès cet instant, il ne faisait plus aucun doute : le message était personnel.

Un cri du cœur à glacer le sang.

La scène se déroule dans une salle fermée, loin des caméras de match, loin des flashs médiatiques. Martin St-Louis, les yeux humides, le ton émotif, se livre :

« Il y a des jours où j’ai pensé que je ne rejouerais plus jamais dans cette ligue. Des jours où j’ai pensé que je ne marquerais plus jamais un foutu but dans cette ligue. Et comme entraîneur, et je suis émotif parce que je suis vrai, je n’ai pas peur d’être émotif comme entraîneur, parfois, cette foutue ligue est difficile. Parfois, tu as l’impression que tu ne gagneras plus jamais un match dans cette ligue. »

Et il poursuit, plus intense que jamais :

« Je te le dis maintenant : le hockey, la vie, c’est pas toujours juste. Tu dois juste continuer à te battre. »

Silence. Frissons. Une claque. Une confession.

Mais aussi, une flèche.

Arber Xhekaj est visé sans être nommé

Dans les coulisses de l’organisation, plusieurs ont compris l’allusion. Le timing. Le ton. La charge émotionnelle. Ce discours-là, c’était un miroir tendu à Arber Xhekaj. Un jeune défenseur au parcours atypique, adoré du public, mais bousculé depuis des mois par les incertitudes.

Martin St-Louis n’a pas besoin de nommer ses joueurs pour leur parler. Il a choisi l’émotion brute, la vulnérabilité, pour passer son message. Et tout concorde : depuis plusieurs mois, Xhekaj semble de moins en moins dans les bonnes grâces de son entraîneur.

Utilisé sporadiquement. Largué dans les estrades. Puis rappelé. Puis rayé. Une gestion floue, parfois cruelle. Et dans l’ombre, une rumeur qui refuse de mourir : le Canadien envisagerait sérieusement de l’échanger.

Mais attention. Arber Xhekaj n’est pas n’importe qui. C’est un symbole. Un guerrier sorti de nulle part, jamais repêché, formé à Laval, devenu l’un des hommes les plus redoutés du circuit pour sa robustesse… et l’un des plus aimés de la foule montréalaise.

Son chandail se vend. Son nom se chante. Son image est utilisée par le club pour des campagnes promotionnelles. Et sa famille, d’origine modeste, a trouvé à Montréal un tremplin inespéré.

Alors, le Canadien de Montréal sait une chose : s’il l’échange, ce ne sera pas à rabais.

Selon les informations obtenues par le journaliste Brian Wilde, l’organisation aurait reçu des appels pour Xhekaj. Mais la réponse est catégorique : ce sera un choix de première ronde, ou il ne part pas.

Wilde explique qu’un simple choix de deuxième ronde, aussi élevé soit-il, ne reflète pas la vraie valeur d’Arber Xhekaj. Pas sur le plan hockey, ni sur le plan marketing, ni sur le plan humain.

Et il a raison. Repêcher un défenseur qui a l’impact de Xhekaj en deuxième ronde est un coup de dés. Il y a des exceptions, Lane Hutson en est une, mais ce n’est pas la norme.

Et échanger Xhekaj pour une autre loterie de deuxième ronde serait une faute stratégique et symbolique.

Mais voilà le dilemme. À gauche de la défense, c’est l’autoroute 40 à l’heure de pointe.

Lane Hutson est déjà l’un des 20 meilleurs défenseurs de la LNH.

Mike Matheson est un vétéran rapide, productif et apprécié.

Kaiden Guhle, malgré les blessures, est un pilier.

Jayden Struble vient de signer un contrat plus lucratif que Xhekaj.

Adam Engström, qu’on oublie trop souvent, est prêt pour la LNH et refuse de retourner à Laval.

David Reinbacher est NHL-ready.

Le résultat est sans pitié : un de ces joueurs devra partir.

Et c’est ici que le discours de Martin St-Louis devient encore plus troublant.

Un appel à la résilience… ou un adieu déguisé?

Quand Martin St-Louis parle de continuer à se battre, de ne pas abandonner, de sentir qu’on ne marquera plus jamais, il ne parle pas à Cole Caufield. Il ne parle pas à Lane Hutson. Il parle à celui qu’il a rayé de l’alignement quand ça comptait. Celui qui a perdu la confiance de l’état-major.

Il parle à Arber Xhekaj.

Le message, au fond, est double. C’est à la fois un encouragement… et un test.

« Tu veux rester dans cette ligue? Montre-le. Bats-toi. »

Mais tout le monde comprend aussi ce qui n’est pas dit : Sinon, quelqu’un d’autre prendra ta place.

Au-delà des statistiques, des présences, des revirements ou des punitions, il y a ce que Xhekaj incarne. Il est le cœur brut. L’émotion incarnée. L’âme ouvrière d’un club qui veut retrouver son identité.

L’échanger, c’est prendre un risque. Celui de briser quelque chose dans la chambre. Dans les estrades. Et dans l’image publique du club.

Ce n’est pas un détail.

Et c’est pourquoi Kent Hughes, bien qu’il soit prêt à écouter, exige un prix fort. Un premier choix. Une preuve de respect.

Une transaction de plus en plus probable?

Cela dit, malgré tout cet attachement, l’écriture est sur le mur. Avec l’émergence de jeunes comme Engström et Protz, avec le contrat de Struble, et avec la volonté de l’organisation d’avoir des défenseurs mobiles et propres, la marge de manœuvre de Xhekaj s’effondre.

S’il connaît un bon début de saison, il deviendra une cible d’échange encore plus convoitée. Et une équipe désespérée, à l’approche des séries, pourrait bel et bien céder un choix de première ronde.

Et à ce moment-là, Kent Hughes devra trancher.

Il faut aussi regarder autour.

Adam Engström a prouvé qu’il était prêt. Il a dominé les séries à Laval. Des membres du personnel de d’autres équipes ont affirmé qu’ils « coachaient activement pour éviter Engström sur la glace ». Il est fiable, discipliné, intelligent et il a joué à gauche… et à droite.

Et surtout, il a dit lui-même en entrevue : 

« Je ne veux pas commencer l’année dans la ligue américaine. Je suis prêt pour la LNH. »

Un message clair. Une pression directe.

Engström n’attendra pas gentiment. Et il est exempté du ballottage.

Alors pour lui faire de la place, quelqu’un devra céder. Et si Kent Hughes veut éviter de perdre un joueur pour rien, il devra monnayer ce trop-plein. Xhekaj est l’option la plus logique.

La saison qui s’en vient pourrait donc être la dernière d’Arber Xhekaj avec le Canadien de Montréal. À moins qu’il ne parvienne à reconquérir Martin St-Louis.

À moins qu’il ne montre une constance défensive irréprochable. Qu’il évite les punitions inutiles. Qu’il accepte un rôle plus limité, plus ingrat. Qu’il devienne ce que le club cherche.

C’est une montagne. Mais il en a déjà gravi plusieurs.

Et si quelqu’un peut faire mentir les prédictions, c’est bien lui.

Le discours de Martin St-Louis restera comme un moment pivot. Une balise émotionnelle. Un électrochoc.

Il ne s’adressait pas qu’à une équipe.

Il s’adressait à un homme.

Arber Xhekaj est au carrefour de sa carrière à Montréal. Il peut encore forcer la main de son entraîneur, rallumer la flamme, devenir indispensable.

Mais le sablier est enclenché.

Et s’il ne parvient pas à convaincre, le prix de son départ est déjà fixé : un choix de première ronde. Rien de moins.

Parce qu’ici, à Montréal, on échange peut-être des joueurs.

Mais on ne liquide pas les symboles.