C’est un samedi soir, à Toronto. Maple Leafs contre Canadiens. Un classique canadien, un marché immense, une ambiance électrique… et un événement planétaire qui n’aura pas lieu.
Ivan Demidov, le prodige russe que toute la province attend avec impatience, ne sera pas en uniforme. Et soyons clairs : c’est une décision ridicule. Inacceptable. Et totalement symptomatique d’une Ligue nationale de hockey qui ne comprend rien au marketing moderne.
Le jeune homme est arrivé au pays jeudi. Il a obtenu son visa de travail. Il est passé par Istanbul, il a été acclamé à l’aéroport par des partisans, il a déjà patiné deux fois.
Il est en forme, il sort d’une série de séries éliminatoires en KHL. Il est dans un état d’esprit de série. Il est prêt. Il est excité. Le Québec est en feu. Et le Canadien décide de le garder sur le banc. Pourquoi?
Parce que dans la LNH, on a encore cette mentalité d’un autre siècle : il faut attendre, il faut voir, il faut observer, il faut acclimater.
Non. Quand un Lionel Messi débarque dans un club, il joue. Quand un prodige en NBA débarque, il joue. Quand un phénomène débarque en NFL, il joue. Et quand Ivan Demidov débarque à Montréal, il devrait jouer.
Mais au lieu de ça, on va l’envoyer contre les Blackhawks lundi, un match sans éclat, un lundi soir, contre une équipe éliminée.. Pourquoi?
Parce qu’on est frileux. Parce que Martin St-Louis ne veut pas s’enflammer. Parce que la LNH n’a aucun flair pour le moment. Parce qu’on manque cruellement de culot.
Et pendant ce temps-là, Martin St-Louis continue d’être bête comme jamais avec les journalistes. À chaque question sur Demidov, il serre les dents. Il évite. Il esquive. Il grince.
On l’a vu, Martin St-Louis n’en peut plus. Il a perdu patience avec les journalistes, et ça se voit dans chacun de ses regards, dans chacune de ses réponses coupées au couteau.
Vendredi, un journaliste a tenté de revenir à la charge sur Ivan Demidov, pour savoir s’il allait jouer bientôt, s’il s’intégrait bien, s’il avait parlé avec lui. Et St-Louis a coupé sec :
“Je ne pense pas à ça.” Il l’a répété deux fois. Froid, détaché, presque méprisant.
C’est toujours le même réflexe chez Martin : il déteste les projecteurs braqués ailleurs que sur le collectif. Il ne supporte pas les cas spéciaux, les électrons libres, ceux qui viennent avec un peu trop de “buzz”.
On l’a vu avec Arber Xhekaj, quand ce dernier lançait des produits marketing, donnait des entrevues virales et se faisait appeler “le Shérif” : St-Louis l’a mis à sa place.
Aujourd’hui, c’est Demidov qui subit, sans même avoir encore joué une seule présence.
Pour Martin St-Louis, le joueur parfait, c’est celui qui entre dans le moule. Qui parle peu, qui s’écrase dans le vestiaire, qui attend son tour et ne fait pas de vagues. Demidov, sans le vouloir, fait déjà trop de bruit. Et ça l’irrite profondément.
Parce que Martin n’aime pas ça, les gars qui brillent autrement que par la sueur. Il n’a jamais aimé les étoiles venues d’ailleurs. Il est mal à l’aise avec ce qui dépasse, avec ce qui fait du bruit, avec ce qui vole la vedette à son groupe soudé.
Demidov ne l’a jamais demandé, mais il est déjà une star. Et St-Louis n’aime pas que l’attention dévie du groupe. Il n’a jamais aimé que les projecteurs quittent Suzuki ou Caufield, ou que les journalistes posent des questions sur un gars qui n’a pas encore joué. Martin, c’est l’anti-spectacle.
Et ce soir, il a gagné : il a éteint la lumière sur ce qui aurait pu être un feu d’artifice.
Demidov, pendant ce temps, fait des feintes à l’entraînement. Il mange Xhekaj tout rond devant tout le monde. Il sourit. Il écoute. Il s’adapte. Il est poli. Il patine comme un dieu. Il est tout ce qu’on veut voir. Il est ce qui manque à cette ligue qui tourne en rond depuis trop longtemps.
Mais non. Ce soir, c’est Toronto sans Demidov. C’est samedi sans magie. C’est une occasion manquée, une de plus. Et pendant ce temps-là, la NBA, la NFL et la MLS nous regardent et rient.
Lundi soir, le CH n’aura plus d’excuse.
Pas d’horaire serré. Pas de deuxième match en deux soirs. Pas de voyage. Pas de justification bidon. Ivan Demidov doit jouer, point final. Il doit commencer fort, avec du temps de jeu, sur l’avantage numérique, avec des ailiers capables de suivre son rythme.
Et si Martin St-Louis ose encore parler de prudence, d’évaluation, de “ce n’est pas une garantie qu’il joue dès lundi”, là, ce sera un manque total de vision.
Parce que la vérité, c’est qu’il aurait dû jouer samedi. On a manqué un samedi soir à Toronto, contre les Leafs, devant tout le pays. Un geste marketing manqué, une vitrine ratée.
Et tout ça pourquoi? Pour préserver l’état d’esprit du vestiaire? Pour ne pas bousculer l’ordre établi? Quel ordre, au juste?
Celui du deuxième trio qui n’a encore rien prouvé? Celui de gars qui peinent à générer une seule séquence offensive par match?
La décision de samedi, c’est un choix de frilosité. Mais lundi, il n’y aura plus de place à l’hésitation. La ville attend. L’équipe a besoin de punch. Et les partisans, eux, n’achèteront pas un autre délai déguisé en décision stratégique.
Si le Canadien veut se faire respecter dans cette ligue, il doit arrêter d’agir comme un petit club frileux. Il a un joyau entre les mains. Un phénomène qui arrive avec toute la ville derrière lui. Tu ne fais pas asseoir un phénomène quand tu n’as aucun top 6 établi.
Ivan Demidov est prêt. Il l’était samedi. Il le sera lundi. S’il ne joue pas, ou s’il est caché sur un troisième trio avec deux joueurs incapables de compléter une passe, ce ne sera pas une gestion prudente — ce sera une erreur.
Et ce sera sur Martin St-Louis, et sur l’organisation au complet.