Jacob Fowler est le prince couronné du Centre Bell... et un message qui résonne jusqu’au bureau de Kent Hughes
Il existe des soirs où un bâtiment ne se contente pas d’être une patinoire : il devient un théâtre de passion collective.
Ce samedi soir, le Centre Bell a cessé d’être l’aréna du Canadien pour devenir la scène d’un couronnement. Jacob Fowler, 21 ans, quatre petits départs dans le corps, a signé un blanchissage (4-0, 30 arrêts) qui n’appartient déjà plus à la simple statistique. Il appartient à la mémoire. À l’histoire.
À ce moment où une ville entière reconnaît son nouveau gardien, son nouveau fils, son nouveau prince. Et la foule a décidé que ce match serait bien plus qu’une victoire : ce serait une déclaration.
Le moment qui a tout figé dans le temps n’a pas été un arrêt spectaculaire ni une poussée héroïque en fin de match.
Ce fut la première étoile. Ce fut l’instant où Michel Lacroix, fidèle voix légendaire du Centre Bell, s’est installé pour annoncer le nom du héros… et que le son n’a pas fonctionné.
Silence technique. Silence forcé. Silence improbable. Et c’est dans cette fracture du protocole que la magie a explosé.
Parce que Montréal n’a pas attendu que la machine se réveille pour faire entendre son choix. Comme un seul être, comme une marée qui s’élève sans qu’on l’appelle, vingt mille personnes se sont levées et ont hurlé “FOW-LER! FOW-LER! FOW-LER!” jusqu’à ce que les murs vibrent, jusqu’à ce que la glace tremble, jusqu’à ce que tout doute s’effondre.
Voici le moment qui a donné des frissons dans le dos du Québec en entier:
Ce cri n’était pas une ovation. C’était un serment.
Et Fowler lui-même, pris dans la lumière, incapable de retenir une émotion brute qui lui traversait le visage, ne savait plus s’il devait sourire, respirer, ou simplement s’abandonner à ce vacarme qui venait de décider de son destin. Ce n’était plus un public. C’était une ville qui adoptait son nouveau gardien.
Lorsque le son est finalement revenu, alors que Renaud Lavoie tentait d’arracher une entrevue à travers le tonnerre d’un amphithéâtre devenu incontrôlable, tout devenait encore plus irréel.
Les mots de Fowler, pourtant simples, humbles, émergés du cœur, se perdaient sous la bruit fou du public qui refusait de le laisser parler, comme si chaque seconde où sa voix disparaissait sous la clameur ne faisait qu’amplifier le message : ce gars-là nous appartient, ce filet-là lui appartient, cette ville-là l’a choisi.
«C’était mon premier samedi soir au Centre Bell et je ne suis pas déçu, a-t-il lancé sur la patinoire. J’ai attendu toute ma vie pour ce moment-là. Je suis tellement reconnaissant d’être ici avec ce groupe. En espérant pouvoir revivre plusieurs moments comme celui-ci.» a affirmé le prodige sous les acclamations de la foule.
«Il y a beaucoup de gens qui se sont sacrifiés pour que je sois ici et beaucoup de joueurs qui ont fait de bonnes choses ce soir».
Et on aurait pu croire que Montréal allait se calmer, redescendre, se reprendre. Non. Personne n’a quitté. Vingt mille personnes sont restées, figées, prêtes à célébrer un gardien de 21 ans avec la même ferveur qu’elles avaient autrefois réservée à Price ou à Roy.
Les téléphones filmaient, les enfants scandaient son nom, les vétérans secouaient la tête dans la tête, conscients qu’ils venaient d’assister à quelque chose de rare, d’inédit, de profondément montréalais : la naissance d’un lien.
Parce que Fowler, ce n’est pas juste un jeune talent. C’est un phénomène. Un kid qui joue avec l’arrogance tranquille d’un futur numéro un, avec la technique d’un vétéran, avec la désinvolture heureuse d’un gars qui ne comprend pas encore qu’il porte le poids d’une franchise.
Et pourtant, il le porte déjà. Ce blanchissage, son premier en carrière, seulement à son quatrième départ, est venu cimenter ce que tout le monde voyait depuis son arrivée : c’est lui.
Pendant ce temps, derrière la célébration, derrière le vacarme, derrière l’euphorie spontanée, il y avait un autre silence… celui qui s’étouffait dans les bureaux du Canadien.
Celui qui vient quand tu réalises que ton plan ne tient plus. Celui qui vient quand tu sais que tu ne pourras plus reculer. Parce que Montréal a parlé. Montréal a choisi. Montréal a décidé.
Et ce choix n’inclut plus Samuel Montembeault... sérieusement troublé mentalement au moment où l'on se parle...
On ne peut plus faire semblant. La ville ne veut plus du ménage à trois. Elle ne veut plus attendre que Montembeault retrouve sa mitaine, son équilibre, son rythme, son mental.
Elle ne veut plus de cette histoire qui s’étire, qui s’use, qui fatigue tout le monde. La foule n’a pas chanté Montembeault. Elle n’a pas chanté Dobeš. Elle a chanté Fowler. Encore et encore. Jusqu’à ce que son nom devienne un verdict.
Et le message est limpide : le tandem, c’est Fowler–Dobeš. Pas autre chose. Pas d’intermédiaire. Pas de compromis.
Il va maintenant falloir choisir. Échanger Montembeault. Ou le soumettre au ballottage. Ou accepter l’humiliation de le voir devenir le troisième homme d'un ménage à trois toxique.
Car un ménage à trois avec deux "studs" et un rejet... c'est triste en maudit.
La vérité, c’est que le choix appartient déjà à la ville. Le Centre Bell l’a fait. Le vestiaire le sait. L’organisation ne pourra plus s’accrocher à un équilibre artificiel.
Parce que samedi soir, au cœur d’une soirée qui n’avait rien d’ordinaire, Jacob Fowler n’a pas seulement remporté un match.
Il a pris possession de Montréal.
Et Montréal, elle, a accepté de le suivre... et d'abandonner le pauvre Sam... à jamais...
